En Algérie, de nouvelles mesures anti-inflation en prévision du ramadan
À l’approche du mois sacré, les autorités multiplient les mesures pour s’assurer que les denrées alimentaires seront disponibles en quantité suffisante et à des prix raisonnables. Les salaires et indemnités ont également été revus à la hausse, mais uniquement dans le secteur public.
En Algérie, s’il est un sujet qui fasse consensus entre les autorités, les partis politiques et les différents syndicats, c’est celui de l’insoutenable cherté de la vie. Pour 2022, le taux d’inflation estimé s’est élevé à 9,3 %, contre 7,2 % en 2021, son plus haut niveau depuis vingt-six ans.
Les voitures, pièces détachées et articles scolaires ont connu une augmentation comprise entre 50 % et 100 %. Tous les produits de large consommation suivent une courbe ascendante, y compris la viande de poulet (+13 %) et les œufs (+11,2 %), qui jusqu’à maintenant restaient plus au moins accessibles aux petites bourses. Dans ce contexte de flambée quasi générale, le dossier de l’approvisionnement du marché pendant le mois de ramadan, qui commence la troisième semaine du mois mars, a fait l’objet, dès le 20 février, d’une réunion du conseil des ministres, qui a ordonné la mise en place d’un dispositif de veille pour suivre l’approvisionnement du marché en produits de base.
Afin de casser la flambée des prix et d’alléger la pression, les autorités algériennes promettent le plafonnement du prix du kilo de poulet à 350 dinars grâce à l’arrivée sur le marché de 47 000 tonnes de viande blanche, dont 10 000 assurées par l’Office national des aliment du bétail (ONAB) et 37 000 tonnes par des opérateurs privés soumis au contrôle sanitaire.
Importation de plus de 20 000 tonnes de viande rouge
En outre, la récolte locale des fruits et légumes sera, assure-t-on, suffisante pour couvrir les besoins nationaux, estimés par les spécialistes à 1,5 million de tonne pendant le ramadan. Également au programme pour cette période de fête, l’importation depuis la Colombie de plus de 20 000 tonnes de viande rouge qui seront distribuées via 114 points de vente directe, répartis à travers le territoire national. Des quantités qui viendront s’ajouter aux 54 500 tonnes de viande locale, l’objectif annoncé étant de stabiliser le prix du kilo à 1 200 dinars.
Certains bouchers de la capitale estiment toutefois déjà que les quantités ne seront pas suffisantes pour maintenir les prix. Selon eux, en dehors des points de vente contrôlés par l’État, le kilo de viande devrait atteindre les 3 000 dinars pendant le mois sacré (un chiffre à rapprocher de celui du salaire minimum, fixé à 20 000 dinars). Car depuis l’interdiction, en 2020, de l’importation de viande congelée, le pays a consommé une grande partie de son cheptel, et aucun chiffre n’est disponible pour connaitre le volume exact des réserves. Des données qui ne rassurent pas l’association nationale des consommateurs, qui constate qu’à environ deux semaines du mois sacré les « prix sont déjà plus élevés que pendant le ramadan de l’année dernière ».
Guerre aux spéculateurs
Pour les produits préservés des hausses de tarif grâce aux subventions publiques, comme le lait, l’huile, la farine et la semoule, c’est le problème de leur disponibilité qui risque de se poser avec plus d’acuité pendant le ramadan. Les autorités n’arrivent pas à venir à bout de la spéculation, en dépit des mesures répressives pouvant aller jusqu’à la condamnation à la perpétuité. Depuis octobre 2022, le traitement de ce genre d’affaire est confié au pôle antiterroriste et chargé de la lutte contre le crime organisé du tribunal algérois de Sidi M’Hamed, et non plus aux juridictions ordinaires. Objectif : éradiquer les réseaux de spéculation, accusés de ruiner les efforts des autorités, qui mobilisent une grande partie de la manne budgétaire offerte par l’envolée des cours des hydrocarbures provoquée par la guerre en Ukraine pour parer aux tensions sociales.
Des instructions ont aussi été données pour augmenter les salaires sur les deux années 2023-2024, afin que ces hausses atteignent 4 500 à 8 500 dinars par an selon les grades. Soit une valorisation en fin de parcours allant jusqu’à 47 %. Un enseignant de l’éducation nationale verrait ainsi son salaire progresser de 13 500 dinars durant les deux prochaines années.
Le chef de l’État Abdelmadjid Tebboune a également demandé que le minimum retraite soit porté à 15 000 dinars pour les personnes touchant moins de 10 000 dinars, et à 20 000 dinars pour celles qui perçoivent 15 000 dinars, tandis que l’allocation chômage doit être revalorisée, passant de 13 000 dinars à 15 000 dinars. La pression est mise sur le gouvernement pour le versement de ces différentes augmentations avant le ramadan, sous la forme d’un versement progressif entre le 10 et le 20 mars.
Près de 8 millions de personnes sont concernés par ces hausses des salaires, pensions de retraite et allocations chômage, dont 2,8 millions de fonctionnaires, indique le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, Youcef Chorfa. Une façon de combler l’écart de salaire avec certains pays du monde arabe, alors que l’Algérie a vu ses revenus en gaz et pétrole augmenter considérablement ces deux dernières années.
Seul bémol : ces mesures d’amélioration immédiate du pouvoir d’achat ne concernent que la fonction publique. Dans le secteur privé, l’augmentation des salaires dépendra de la convention collective et des négociations entre les partenaires sociaux. Avec un fort risque de mouvements de grève si les discussions ne devaient déboucher sur rien de concret.
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