Corée du Nord : jeu de dupes à Pyongyang

La conclusion d’un moratoire sur le nucléaire nord-coréen en échange d’une aide alimentaire américaine a toutes les apparences d’un trompe-l’oeil.

Kim Jong-Un avec l’état-major de la IVe armée (date non précisée). © KCNA KCNA/Reuters

Kim Jong-Un avec l’état-major de la IVe armée (date non précisée). © KCNA KCNA/Reuters

Publié le 20 mars 2012 Lecture : 2 minutes.

« En cas de conflit, l’armée et le peuple de la République populaire démocratique de Corée contraindront l’ennemi à se mettre à genoux et, cette fois, exigeront sa totale capitulation. » En visite le 3 mars dans la zone démilitarisée (DMZ), Kim Jong-un, le nouveau maître de Pyongyang, n’a pas mâché ses mots. Dès le lendemain, plus de 150 000 personnes ont manifesté dans la capitale et scandé leur volonté de « mettre à mort le traître psychopathe ». Autrement dit Lee Myung-bak, le président sud-coréen.

Cette vague de rhétorique agressive survient après l’annonce par les États-Unis, le 29 février, que la Corée du Nord avait accepté la mise en place d’un moratoire sur les lancements de missiles longue portée, les essais nucléaires et les activités d’enrichissement de l’uranium menés dans l’usine de Yongbyon. En retour, l’accord prévoit la reprise prochaine de l’aide américaine sous la forme d’une livraison de 240 000 m3 de nourriture. Porte-parole du département d’État, Victoria Nuland y voit un « progrès important ». Reste à savoir si Pyongyang ne joue pas double jeu.

Plusieurs milliers de centrifugeuses de petite taille sont disséminées à travers le pays.

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Car ce pas de géant, qui conduira sans doute à la reprise des négociations à six (Corée du Nord et Corée du Sud, Chine, Japon, Russie et États-Unis) sur la dénucléarisation de la péninsule, a toutes les apparences d’un jeu de dupes. Maître dans l’art du chantage stratégique, Pyongyang avait déjà, en 2008, surmédiatisé la destruction d’une des tours de refroidissement du principal réacteur de Yongbyon. Une éphémère marque de bonne volonté contredite, dès l’année suivante, par l’expulsion des inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

Cette fois, Pyongyang aurait accepté leur retour, afin de superviser le moratoire sur les installations de la filière plutonium, mais aussi, c’est inédit, celles de l’enrichissement de l’uranium. L’accord porte toutefois exclusivement sur le site de Yongbyon. Or, parallèlement à la filière plutonium, Pyongyang a, grâce au Pakistan, largement développé son programme nucléaire basé sur l’enrichissement de l’uranium. La Corée du Nord posséderait ainsi plusieurs milliers de centrifugeuses de petite taille, bien plus discrètes que les centrales au plutonium, réparties dans de nombreux sites de pointe à travers le pays. Et inaccessibles, elles, aux inspecteurs de l’AIEA… 

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