La Russie à « Paris 2024 » ? Funambulisme diplomatique africain, version sport
Les comités olympiques d’Afrique se sont prononcés en faveur de la participation des athlètes russes aux prochains Jeux olympiques de Paris, sous condition…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 6 mars 2023 Lecture : 2 minutes.
L’important étant de participer, selon la formule empruntée par Pierre de Coubertin à un évêque de Pennsylvanie, la venue de sportifs de nationalité russe aux Jeux olympiques d’été de 2024 commence à faire couler encre et salive, 17 mois avant l’événement parisien. Si les J.O. ont été plusieurs fois boycottés, notamment ceux de Montréal, en 1976, par de nombreux pays africains, en rapport avec l’apartheid, les refus volontaires de participer ont parfois concerné la Russie. Les États-Unis refusèrent d’aller aux olympiades à Moscou en 1980 et les Russes de se rendre à Los Angeles en 1984.
C’est aujourd’hui la crise ukrainienne qui suscite l’hypothèse d’un refus, non pas de participer, mais de laisser participer les athlètes russes et biélorusses aux prochaines compétitions. C’est ce que revendique Kiev, évoquant, dans le cas contraire, un présumé boycott de sa délégation. Les Russes et Biélorusses sont exclus du sport mondial depuis l’invasion de l’Ukraine.
Ce samedi 4 mars, soucieux de ne pas ostraciser le pays de Vladimir Poutine, les comités olympiques africains se sont prononcés, à l’unanimité, en faveur de la participation des sportifs de la Fédération de Russie et de la république du Bélarus aux J.O. de Paris. C’était à l’occasion du comité exécutif de l’Association des comités nationaux olympiques d’Afrique (Acnoa) qui se tenait à Nouakchott.
« Drapeau neutre »
Sur ce point, l’Afrique n’est pas isolée. En janvier, le Conseil olympique d’Asie (COA) avait embouché la même trompette en proposant d’intégrer les athlètes russes à ses compétitions régionales, comme les Jeux asiatiques. Ils rejoignent l’exécutif du Comité international olympique (CIO), qui assure qu’« aucun athlète ne devrait être interdit de compétition sur la seule base de son passeport ». Le communiqué de l’Acnoa enfonce le clou, déniant à la politique la légitimité à « faire pression sur le sport et [à] retirer à celui-ci toutes ses valeurs de noblesse qui tournent autour de la paix, de l’Unité et de la solidarité ».
Pour convaincre un maximum de pays, d’ici aux J.O. 2024, les partisans de la réintégration évoquent des aménagements. Primo, les sportifs accueillis, individuellement, ne devraient pas avoir « activement soutenu la guerre en Ukraine ». « Les athlètes ne doivent en aucun cas payer le lourd tribut d’un conflit quel qu’il soit et où qu’il soit », précise l’Acnoa.
Secundo, depuis janvier, l’instance olympique mondiale évoque la possibilité, pour des sportifs de pays jugés « infréquentables », de participer aux J.O. « sous drapeau neutre ». Leurs hymnes nationaux et leurs drapeaux seraient bannis et les éventuelles médailles engrangées par ces athlètes ne seraient pas comptabilisées dans les statistiques officielles russes ou biélorusses.
Le 11 février, les ministres des Sports d’une trentaine de pays – dont la France, la Grande-Bretagne, la Suède, la Pologne, les États-Unis et le Canada – demandaient au CIO des « clarifications » sur ce concept de neutralité… « Ce sera eux ou nous », affirme l’Ukraine. « Eux et vous », souhaite l’Afrique…
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