Télécoms : Sotelma, trop cher ou pas ?
L’introduction en Bourse (BRVM) de l’opérateur malien Sotelma, contrôlé par Maroc Telecom, est annoncée pour juin. Un cours trop élevé pourrait cependant lui réserver un réveil douloureux.
Un troisième opérateur télécoms coté. C’est la bonne nouvelle qu’a annoncée fin février Jean-Paul Gillet, le directeur général de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), à Abidjan. Le malien Sotelma devrait emboîter prochainement le pas du sénégalais Sonatel et du burkinabè Onatel avec l’espoir de rencontrer le même succès que le premier, très apprécié des épargnants locaux et internationaux, mais aussi le risque de connaître le sort, moins enviable, du second.
Introduit en avril 2009 à 45 000 F CFA [68,60 euros, NDLR], Onatel, filiale de Maroc Télécom, vivote depuis, avec un cours de 40 000 F CFA fin février. « Onatel a fait son introduction à un niveau très élevé, surtout pour une société qui était en pleine restructuration », rappelle Hermann Boua, analyste financier chez Hudson & Cie. Boudée par les épargnants, la sixième capitalisation de la Bourse ivoirienne a été sortie l’an dernier de l’indice phare de la place, le BRVM 10. Sur l’ensemble de 2011, 11 254 titres Onatel ont été échangés (pour moins de 1 million d’euros), faisant de l’opérateur burkinabè la quatorzième valeur transigée sur la Bourse, très loin derrière Sonatel et ses 292 000 actions échangées…
Sotelma devrait quant à lui être introduit en juin à un cours de 35 000 F CFA l’action. « À ce jour, nous ne connaissons pas les hypothèses précises de valorisation, notamment le business plan futur, souligne un analyste financier. Mais si vous regardez les données financières passées de Sotelma, il est clair que le cours annoncé est élevé. Selon nos calculs, pour être attractif, il ne devrait pas dépasser les 20 000 F CFA. » Une sévère décote qu’on imagine mal être acceptée par les deux actionnaires actuels de Sotelma : l’État malien (49 %) et Maroc Télécom (51 %).
RÉTICENCES. Le premier est à l’origine de l’introduction en Bourse et compte céder à cette occasion 19 % du capital au public et 10 % aux salariés. Il est peu probable qu’il revoie à la baisse le gain potentiel (environ 152 millions d’euros) qu’il pourrait tirer de l’opération. Le second, qui a payé à un prix élevé la prise de contrôle de Sotelma en 2009, pourrait aussi se montrer réticent. « Le prix de 35 000 F CFA par action est en ligne avec le montant payé par Maroc Télécom en 2009 [180 milliards de F CFA, soit 274 millions d’euros]. L’affaire est intéressante, car depuis cette date Sotelma affiche des performances financières exceptionnelles », assure l’un des conseils de la future introduction en Bourse.
Avec un chiffre d’affaires d’environ 194 millions d’euros en 2011, en hausse de 33,7 %, l’opérateur malien possède en effet de beaux atouts. Le nombre de ses abonnés dans le mobile est ainsi passé en un an de 2,2 millions à 4,4 millions, tandis que sa part de marché a fait un bond de neuf points, à 40 %. Surtout, le Mali est un marché tranquille, peu concurrentiel, pour les deux opérateurs mobiles, Malitel (Sotelma) et Orange Mali (filiale de Sonatel). « Ni Maroc Télécom ni Sonatel n’ont comme habitude de se battre sur les prix, et leurs marges restent donc élevées », note un observateur. L’arrivée imminente du duo Planor-Monaco Télécom, qui a remporté l’appel d’offres pour la troisième licence, ne devrait pas bouleverser la donne, du moins à court terme.
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