Côte d’Ivoire : bataille pour la primature

L’impatience monte au sein du PDCI ivoirien d’Henri KonanBédié, où l’on convoite le poste de chef du gouvernement. Mais pour l’instant, toujours rien…

Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara en 1993. © AFP

Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara en 1993. © AFP

silver

Publié le 4 mars 2012 Lecture : 3 minutes.

« Monsieur le président, votre voyage a-t-il été agréable ? » Jamais, depuis Houphouët-Boigny, Henri Konan Bédié n’était allé accueillir une personnalité à l’aéroport d’Abidjan. Le 7 février, l’ex-président et patron du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) a pourtant souhaité la bienvenue (akwaba, en baoulé) au chef de l’État, Alassane Dramane Ouattara, de retour d’une visite en France. Un geste très symbolique au moment où Bédié doit user de tact pour calmer le mécontentement et l’impatience des militants.

Il y a d’abord les résultats des législatives de décembre 2011 : le PDCI est arrivé deuxième, certes, mais loin derrière le Rassemblement des républicains (RDR), qui a frôlé la majorité absolue. Il y a surtout cette promesse faite en novembre 2010 entre les deux tours de la présidentielle : la primature en échange d’un ralliement autour de Ouattara. Dix mois après la chute de Laurent Gbagbo, le PDCI n’a toujours rien vu venir. Le 8 février, Bédié, fragilisé en son parti, a affirmé que « des petits réglages doivent être effectués pour un meilleur fonctionnement de notre alliance [avec le RDR, NDLR] » – petite phrase qui aura peut-être permis de rassurer les troupes, inquiètes à l’idée que le poste de Premier ministre « reste une promesse électorale », selon les mots du secrétaire général du PDCI, Alphonse Djédjé Mady.

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En attendant, dans le huis clos du PDCI, la bataille est rude. Sur la short list de « premiers ministrables » de Bédié figurent au moins quatre noms. Le premier est celui de Jeannot Ahoussou Kouadio, ministre de la Justice et président de l’Association des élus et cadres du Grand Centre, qui a une solide expérience gouvernementale. Les chefs baoulés, qui ont pesé dans l’élection de Ouattara et qui lui avaient demandé de nommer un Premier ministre baoulé (comme Bédié), pensaient sans doute à Ahoussou. Mais un autre Baoulé est également sur les rangs : Jean Claude Kouassi, président du conseil d’administration du Fonds d’entretien routier (FER) et initiateur du Grand Centre. Président du conseil général de Bouaké, il a été ministre de Bédié et directeur de cabinet du Premier ministre Charles Konan Banny.

La bataille pour la primature vue par Glez ©

Grogne

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S’il n’avait pas à proposer un Baoulé, Bédié pourrait choisir son ancien Premier ministre, Daniel Kablan Duncan, actuel ministre des Affaires étrangères. Duncan a l’estime de Ouattara, dont il a été le ministre des Finances quand l’actuel président était Premier ministre d’Houphouët. « La question est de savoir comment Bédié va gérer la grogne des Baoulés, noyau du PDCI, si Duncan, un N’Zima du Sud, est nommé Premier ministre ? » s’interroge un diplomate. Enfin, Charles Diby Koffi espère lui aussi rafler la mise. Ministre de l’Économie et des Finances depuis 2007, il a les faveurs des bailleurs de fonds, mais n’a que tout récemment rejoint – sur conseil de Bédié – les rangs du PDCI.

Ouattara, lui, prend son temps. La bataille renforce son autorité sur chaque camp, suspendu à sa décision. Surtout, il doit aussi se prononcer sur l’avenir de son actuel Premier ministre, Guillaume Soro, que l’on disait intéressé par le perchoir. Mais rien n’est gagné : le président de l’Assemblée nationale est le dauphin constitutionnel du président. À ce titre, il doit être un homme de confiance. Certes, les relations sont aujourd’hui bonnes entre Ouattara et Soro, mais le passé de l’ex-rebelle ne rassure pas les proches du chef de l’État. Amadou Gon Coulibaly, secrétaire général de la présidence, est donc aussi pressenti, de même que Tiémoko Yadé Coulibaly, un membre de la direction du RDR. Dernier paramètre à prendre en compte : Soro aura 40 ans en mai prochain et n’est pas éligible au perchoir avant cette date. Reste à savoir si Ouattara est disposé à attendre. À Abidjan, il se murmure d’ailleurs que Soro pourrait aussi vouloir conserver le poste de ministre de la Défense, qu’il occupe actuellement.

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André Silver Konan, à Abidjan

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