Avec l’Afrique du Sud à sa tête, l’Union africaine sera plus forte

Maite Nkoana-Mashabane, ministre sud-africaine des Affaires étrangères.

Publié le 23 février 2012 Lecture : 3 minutes.

L’élection du nouveau président de la Commission de l’Union africaine (UA) était l’un des moments les plus attendus du 18e sommet de l’UA, qui s’est tenu début février à Addis-Abeba. Avec l’aval et l’appui de la Communauté des États de l’Afrique australe (SADC), l’Afrique du Sud a présenté la candidature de la ministre de l’Intérieur, Nkosazana Dlamini-Zuma. L’élection a été reportée au mois de juin, mais, après mûre réflexion, le 12 février, la sous-région nous a redemandé de présenter un candidat au service de l’Afrique et c’est ce que nous ferons*.

D’ici là, voici quelques faits importants qui ne sont que rarement mentionnés. Tout d’abord, depuis la création de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, l’ancêtre de l’UA), en 1963, la présidence de la Commission n’est jamais revenue à un représentant de la SADC. Ensuite, l’Afrique du Sud n’a jamais présenté de candidat pour ce poste par le passé. Nos représentants au sein de l’UA ont toujours servi l’organisation avec humilité et quitté leurs fonctions à la fin de leur mandat. Pas une seule fois nous n’avons tenté d’agir contre le souhait des États membres.

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Nous sommes une démocratie constitutionnelle et progressiste, et notre politique étrangère est guidée par ces valeurs. Nous sommes parfaitement conscients que, pour avoir un monde et une Afrique meilleurs, il faudra passer par un processus long et complexe.

Il est utile aussi de rappeler que, pendant les heures les plus sombres de notre histoire, le continent a été divisé par des allégeances à des puissances coloniales. Nous, Africains, sommes allés jusqu’à nous battre en leur nom. C’est bien pour cela que, quand les pères fondateurs de l’OUA se sont réunis à Addis-Abeba, au début des années 1960, ils ont insisté sur la nécessité de s’unir pour décider de notre destin. En 1961, un des architectes de l’unité africaine, Kwame Nkrumah, a fait cette déclaration restée dans les mémoires : « Individuellement, les États indépendants d’Afrique, pour certains potentiellement riches, pour d’autres pauvres, ne peuvent faire que peu de choses pour leur peuple. Ensemble, en s’aidant mutuellement, ils peuvent obtenir beaucoup. » Nkrumah ajoutait que le plus important était « d’éviter les dangers inhérents à la désunion, en créant une union politique qui, par ses succès, deviendra un exemple pour un monde divisé ».

Jamais le présidence de la Commission de l’UA n’a été laissée à l’Afrique australe et jamais elle n’a été occupée par une femme.

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Aujourd’hui, le visage de l’Afrique a changé. Ce qui l’affligeait a été en grande partie corrigé : l’apartheid, par exemple, a été aboli en Afrique du Sud, et plusieurs États ont fêté leurs cinquante ans d’indépendance l’année dernière. L’économie du continent s’est mise en mouvement.

Que faire pour poursuivre le travail accompli et relever les défis hérités des divisions du passé ? L’Afrique du Sud est convaincue que le continent a besoin d’une UA plus forte. Nous sommes allés à Addis-Abeba avec une candidate solide et capable de la mener dans cette direction, et elle aurait pu devenir la première femme à occuper ce poste depuis la création de l’OUA – même si c’est d’abord pour ses qualités de leader que le choix s’est porté sur elle.

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Nous ne pensons pas que cette élection – ou que l’incapacité à départager Jean Ping, le président sortant, et Mme Dlamini-Zuma – ait été un échec. Cette absence de résultat clair est liée au fonctionnement démocratique de l’institution. Au Royaume-Uni, l’une des plus vieilles démocraties au monde, la dernière élection nationale n’a pas donné de gagnant absolu et a conduit à un accord de partage du pouvoir. Le fait qu’un résultat similaire se produise dans un organe politique africain n’est pas un signe de division, mais l’expression d’une démocratie en action.

Affirmer que l’Afrique du Sud n’aurait pas dû présenter de candidat en raison des divisions héritées du passé, comme le font certains médias, est paradoxal. C’est justement en traçant notre propre chemin dans l’Histoire que nous pouvons nous rassembler. C’est ce que pourrait faire l’Afrique avec Nkosazana Dlamini-Zuma à la présidence de la Commission de l’UA. 

* Si le comité des sept chefs d’Etat qui doit se réunir en mars autorise Jean Ping et Nkosazana Dlamini-Zuma à prétendre au poste, NDLR.

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