Présidentielle au Sénégal : le scrutin peut-il être transparent ?
À l’heure du vote pour la présidentielle au Sénégal, les suspicions de fraude électorale sont plus nombreuses que jamais. Mais les observateurs veillent au grain.
Pour l’opposition, si le président sénégalais Abdoulaye Wade se présente, c’est qu’il est sûr de l’emporter. Et s’il est sûr de l’emporter, c’est parce que les élections seront truquées. « Il y a plusieurs motifs d’inquiétude », note le juriste Babacar Guèye. Le premier concerne les militaires et les paramilitaires, qui ont voté une semaine avant tout le monde. Même s’ils ne représentent que 23 000 électeurs, sur un total de 5,1 millions d’inscrits. Autre souci : les électeurs touchés par le récent redécoupage administratif pourraient rencontrer des difficultés pour voter – bien que, selon le gouvernement, ils ne soient que 83 000. Inquiétude encore au sujet d’une éventuelle fraude informatique, via un « logiciel magique », qui donnerait à coup sûr la victoire à Wade dès le premier tour. La rumeur avait couru en 2007, elle circule à nouveau aujourd’hui.
La Casamance, peu sécurisée (le 13 février, un accrochage entre l’armée et des rebelles a provoqué la mort de quatre soldats, selon des sources officielles), est également l’objet de spéculations. « On hésite à y aller », indique un collaborateur de Macky Sall. « Les gens pourront-ils aller voter, et les observateurs seront-ils dans les bureaux de vote ? », s’interroge un élu local, qui évoque de « possibles bourrages d’urnes en faveur du président sortant ».
"Il est impossible de truquer des élections au Sénégal en 2012"
Le Premier ministre, Souleymane Ndéné Ndiaye, jure qu’« il est impossible de truquer des élections au Sénégal en 2012 ». Il est vrai que les garde-fous sont nombreux et « bien rodés », selon Doudou Ndir, le président de la Commission électorale nationale autonome (Cena), qui affirme que le fichier électoral est « bon ». C’est sur la base de ce fichier que l’opposition avait remporté les élections locales en 2009. Mais aujourd’hui, elle le juge peu crédible, évoque des « bureaux de vote fictifs » et des doublons de cartes d’électeur.
Doudou Ndir assure qu’à chaque étape du scrutin les représentants de tous les candidats auront leur mot à dire – la Cena mobilise pour sa part 16 000 contrôleurs. Les observateurs étrangers aussi veillent au grain. Jamais ils n’auront été aussi nombreux pour une élection au Sénégal : à elle seule, la mission d’observation électorale de l’Union européenne, à l’oeuvre depuis le 20 janvier, comptera plus de 90 membres la semaine précédant le premier tour (ils étaient 150 en République démocratique du Congo). « Nous n’accepterons aucun abus. Nous serons très vigilants », indique un diplomate européen.
Reste l’insondable : l’achat des consciences. Le 10 février, le candidat Ibrahima Fall a évoqué des « fraudes massives » à Touba, là où Abdoulaye Wade a lancé sa campagne et multiplié les visites ces derniers mois. Là aussi où l’inflation de nouveaux inscrits sur les listes électorales a été l’une des plus importantes en 2011.
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