Madagascar – États-Unis : les guitares Gibson hors la loi

Soupçonné d’utiliser du bois précieux d’origine illégale en provenance de Madagascar pour fabriquer ses guitares, le célèbre luthier Gibson clame son innocence. Il cherche désormais à modifier la loi.

La Les Paul, conçue en 1952 par le célèbre luthier Gibson. © D.R

La Les Paul, conçue en 1952 par le célèbre luthier Gibson. © D.R

NICOLAS-MICHEL_2024

Publié le 23 février 2012 Lecture : 2 minutes.

La protection de l’environnement va-t-elle tuer le rock’n’roll ? En dramatisant un tantinet, c’est la question que l’on pourrait formuler tant la querelle opposant le fabricant américain de guitares Gibson aux militants écologistes prend un tour épique. Imagine-t-on, en effet, Keith Richards (Rolling Stones) ou Jimmy Page (Led Zeppelin) privés de leurs légendaires Les Paul ? Et pourtant ! Le Lacey Act, loi de 1900 amendée en 2008, interdit l’importation de bois coupé, transporté ou vendu de manière illégale. Certains instruments, comme la Les Paul, contiennent des éléments – les touches – en ébène ou en bois de rose qui leur confèrent une sonorité particulière. Selon la loi américaine, un fabricant tel que Gibson, qui produit quelque 700 guitares par jour et en vend pour 500 millions de dollars (380 millions d’euros) par an, se doit de maîtriser l’ensemble de la chaîne de fournisseurs qui garantit ses approvisionnements en bois précieux.

Gibson respecte-t-il cette obligation ? Selon la chanteuse malgache Razia Saïd, non. Née à Antalaha, un centre névralgique de l’exportation illégale du bois de rose, à Madagascar, à l’origine de la pétition Musicians Against Illegal Logging et d’une campagne de reboisement à Masoala, l’artiste a violemment dénoncé, le 19 janvier dernier, les profits énormes engrangés par les compagnies étrangères sur le dos de ses concitoyens. Aux États-Unis, les fédéraux du US Fish and Wildlife Service et du Department of Homeland Security prennent le sujet très au sérieux. Après une première descente en 2009 dans l’usine Gibson de Nashville, ils ont remis le couvert en août 2011, à plus de trente, embarquant instruments, manches, réserves de bois et milliers de documents. Le patron du luthier, Henry Juszkiewicz, a aussitôt réagi, dénonçant une attitude disproportionnée et assurant que les bois indiens et malgaches utilisés dans ses ateliers étaient « certifiés ».

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Recul

Gibson affirme que l’intervention fédérale l’a obligé à changer de fournisseur : « Après plus de deux ans, aucune plainte n’a été déposée. Cette enquête a souligné l’importance et la continuité de l’engagement de Gibson en faveur du développement durable. » Des affirmations qu’il convient de prendre avec recul. Non seulement Gibson a sous-entendu que tout musicien voyageant avec sa guitare pourrait être inquiété pour trafic de bois précieux – ce qui est faux -, mais en outre, au sein de la National Association of Music Merchants (NAMM), le luthier milite ardemment en faveur du Relief Act, proposé par le démocrate Jim Cooper afin de réduire la portée du Lacey Act. Sous contrat avec Gibson, le cabinet d’avocats Crowell & Moring travaille dans ce sens. Cherchez la fausse note.

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