Dans l’affaire Pegasus, le Maroc débouté de son action contre Ignacio Cembrero
La justice espagnole a rejeté la plainte du Maroc contre le journaliste Ignacio Cembrero, qui accuse le royaume d’avoir espionné son téléphone avec le logiciel israélien Pegasus, sans en apporter les preuves et malgré une expertise policière concluant à l’absence de contamination de l’appareil.
C’est un nouvel épisode, de la très vaste et complexe affaire Pegasus qui vient de se jouer devant le tribunal de première instance de Madrid. Les juges espagnols ont décidé de rejeter la plainte déposée par le Maroc contre Ignacio Cembrero. Le royaume accuse le journaliste espagnol d’El Confidencial de s’être « vanté » d’avoir été espionné par les services secrets marocains avec le logiciel Pegasus, sans pouvoir le prouver. Un verdict contre lequel les avocats du royaume ont l’intention de faire appel.
Depuis la publication en juillet 2021 de l’enquête « Projet Pegasus » par le consortium international de journalistes Forbidden Stories, Ignacio Cembrero a affirmé de nombreuses fois que le Maroc était responsable du piratage de son téléphone, tout en admettant ne pas en avoir la preuve.
180 journalistes ciblés
L’enquête journalistique en question soutient qu’environ 50 000 personnalités à travers le monde ont pu être espionnées par plusieurs gouvernements, dont celui du Maroc, au moyen du désormais fameux logiciel espion Pegasus conçu par la société israélienne NSO Group. Vendu à de nombreux pays, ce programme permet d’accéder aux messageries, aux données ou encore d’activer à distance la caméra et le micro d’un smartphone. Les autorités marocaines ont toujours nié avoir jamais disposé du logiciel Pegasus.
Le journaliste espagnol, spécialiste du Maghreb, fait partie des 180 journalistes présentés dans l’enquête comme des cibles potentielles. Mais l’analyse de son téléphone, réalisée en août 2021 par la police espagnole, a conclu qu’il n’était pas contaminé par le logiciel espion. Un arrêt rendu le 10 mars par la juge Sonia Lence Muñoz précise par ailleurs que même dans le cas où le programme aurait été détecté, « il est très difficile de prouver ou de démontrer que c’est le Maroc qui aurait introduit le logiciel informatique Pegasus ».
La « vantardise réfutée »
En parallèle, la juge a réfuté les accusations d’ « action de vantardise », estimant que les sorties médiatiques de Cembrero étaient légitimes du fait de « la gravité de tels faits qui ont donné lieu à une enquête pénale », ainsi que des demandes d’explications du Parlement espagnol et du Parlement européen.
« Ce jugement ne fait pas une juste appréciation des faits car il ne prend pas en compte la responsabilité de Forbidden stories, en disculpant à tort Cembrero », explique Me Boussier, avocat du royaume. « L’essentiel est que le rapport de police judiciaire espagnole établit que le Royaume n’a pas utilisé Pegasus et que toutes ces allégations sont mensongères », poursuit-il. Déterminé à « rétablir la vérité », il se dit certain que la Cour d’appel « rendra justice au royaume du Maroc ».
« Mesquinerie »
« Le Maroc est condamné à payer les frais. Peu probable qu’il le fasse : il invoquera l’immunité », a tweeté Ignacio Cembrero, le 16 mars après la délibération. Ce que conteste fermement Me Boussier : « Le Royaume assumera tout. C’est un procès d’intention sans fondement qui prouve le peu de sérieux et la mesquinerie de l’adversaire. »
Dans le cadre des charges le visant en France, le royaume a également poursuivi en diffamation des ONG et des médias français. Des poursuites jugées irrecevables par le tribunal de Paris. Là encore, les avocats du Maroc ont indiqué qu’ils faisaient appel de cette décision.
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