Côte d’Ivoire : le gabonais BGFI à la conquête de l’Ouest
Après le Bénin, le groupe bancaire gabonais BGFI vient d’ouvrir une filiale en Côte d’Ivoire, associé au négociant local Yeshi Group. Un marché très concurrentiel où il faudra innover pour parvenir à se faire une place.
Le 5 janvier au Plateau – le quartier d’affaires d’Abidjan -, un nouveau venu s’est installé avenue Joseph-Anoma, communément appelée « rue des banques ». Sans grand bruit, le gabonais BGFI Bank a ouvert, non loin des sièges de la Société générale de banques en Côte d’Ivoire (SGBCI), de Banque Atlantique Côte d’Ivoire (Baci), de BIAO Côte d’Ivoire et de bien d’autres établissements financiers, les portes de sa filiale locale. Cette nouvelle implantation est la deuxième du groupe en Afrique de l’Ouest, après le Bénin en 2010. Elle est l’aboutissement d’un processus entamé en 2009 et qui a conduit, en mai 2011, à l’obtention d’un agrément.
L’arrivée de BGFI Bank vient porter à 21 le nombre de groupes bancaires opérant sur le marché ivoirien. « La Côte d’Ivoire va servir de base pour la suite de notre développement en Afrique de l’Ouest », indique-t-on à la direction du groupe, à Libreville. BGFI Bank, qui réalise déjà 41 % de ses revenus hors du Gabon, compte profiter de la reprise économique annoncée à Abidjan. Selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), le PIB ivoirien devrait croître de 8,5 % cette année, après avoir perdu 5,8 % en 2011.
« Le contexte macroéconomique est très favorable à l’arrivée de nouveaux groupes bancaires. Deuxième producteur mondial de cacao, la Côte d’Ivoire vient de sortir d’une longue période de crise et va lancer des grands chantiers de reconstruction [plus de 3 milliards d’euros d’investissement sur les quatre prochaines années, NDLR]. Le secteur bancaire est donc appelé à exploser », explique un analyste du fonds d’investissement américain Intangis Holdings.
Quasi-duopole
Reste à BGFI Bank à faire ses preuves sur un marché réputé très difficile, notamment sur ses créneaux de prédilection : la banque de financement et d’investissement, mais aussi la banque privée (gestion de patrimoine des particuliers fortunés). « Les groupes déjà présents dans le pays couvrent très bien ces activités. Les filiales locales de BNP Paribas et de Société générale y sont en position de quasi-duopole », estime le cadre d’une autre banque installée en Côte d’Ivoire. Deux établissements auxquels il faut encore ajouter les groupes panafricains Baci – dont le réseau est le plus grand du pays -, Bank of Africa et Ecobank, très bien implantés. « L’activité de financement des opérations des grandes entreprises est surtout basée sur le relationnel que ces institutions entretiennent avec elles. Et en la matière, les banques qui sont entrées en premier sur le marché ont une longueur d’avance », explique un autre analyste, qui juge que le rachat d’une banque locale (certes plus coûteux) aurait permis à BGFI Bank d’aller plus vite.
Afriland bientôt en Guinée
Numéro deux au Cameroun et numéro un en Guinée équatoriale, Afriland First Group avance timidement en Afrique de l’Ouest. Le groupe de Yaoundé a vendu il y a quelques années sa participation minoritaire dans l’ivoirien Omnifinance (aujourd’hui Access Bank Côte d’Ivoire) et regarde Abidjan, pour l’instant, de loin. La banque, détenue majoritairement par Paul Fokam, mène une stratégie d’expansion au coup par coup. « Nous ne nous fixons pas de liste de pays, nous regardons les opportunités quand elles viennent et décidons en fonction de notre capacité à rentabiliser rapidement l’investissement », souligne Albert Nigri, directeur général. En 2011, Afriland a débuté à partir de zéro ses activités au Liberia, un pays nettement sous-bancarisé. Il vient par ailleurs d’obtenir un agrément pour opérer en Guinée. Frédéric Maury
Selon les spécialistes, l’activité banque commerciale pure est celle qui offre le plus grand potentiel de croissance, d’autant qu’en Côte d’Ivoire la proportion de personnes ayant accès aux services bancaires est encore inférieure à 10 % de la population. BNP Paribas vient d’ailleurs de lancer un nouveau produit visant les populations non bancarisées dans quatre pays ouest-africains (Côte d’Ivoire, Sénégal, Mali et Burkina Faso). Pour un coût de 1 000 F CFA (1,52 euro), le groupe français propose à ce type de clientèle un compte courant et une carte de retrait.
Un partenaire de poids
Mais à Abidjan, BGFI Bank mise sur un atout majeur. Il peut en effet compter sur un partenaire local de poids : Yeshi Group, dont l’un des dirigeants est administrateur de BGFI Côte d’Ivoire. Très discrète, cette société de négoce (distribution de produits de consommation, de matériaux de construction, etc.) est implantée en Côte d’Ivoire depuis plus de trente ans. Elle possède des filiales dans de nombreux pays comme le Sénégal, le Congo, la Centrafrique, le Cameroun et le Gabon – où elle réalise en moyenne un chiffre d’affaires de 30 millions d’euros par an.
En attendant de déployer sa stratégie à l’ouest, c’est en Afrique centrale que BGFI Bank est le mieux implanté, avec quatre filiales hors Gabon : en RD Congo, au Cameroun, au Congo et en Guinée équatoriale. Une nouvelle ouverture est attendue dans les prochaines semaines à São Tomé e Príncipe. En tout, la banque sera ainsi présente dans dix pays (dont Madagascar et la France). Un chiffre que ses dirigeants entendent porter à dix-huit à l’horizon 2015.
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