La bonne étoile du chef sud-africain Jan Hendrik
Distingué par le Guide Michelin en 2016, le restaurant niçois JAN sert de vitrine à son propriétaire, qui développe sa marque en Afrique du Sud.
Un navire amiral a jeté l’ancre dans le port de Nice, et il bat pavillon sud-africain. Installé sur la Côte d’Azur depuis 2013, le restaurant JAN est le porte-étendard du groupe gastronomique que dirige le chef Jan Hendrik van der Westhuizen. Il l’appelle plus précisément « mon vaisseau mère » car il est celui par qui le succès est arrivé et qui permet à ses autres établissements d’exister.
JAN est auréolé d’une étoile au Guide Michelin depuis sept ans. Les enquêteurs du Bibendum apprécient le subtil aperçu de la cuisine sud-africaine proposé par Jan Hendrik. Car on ne va pas chez JAN comme on partirait en safari. « Il n’y a pas de peaux de zèbre ou de tambours dans mon restaurant pour indiquer d’où je viens, prévient le chef. On veut montrer au monde que l’Afrique du Sud peut être plus sobre et plus élégante que cela. Le pays ne se résume pas à ses animaux sauvages. Il est riche, aussi, de ses différentes cultures. »
« Fièrement Sud-Africain »
Celle du chef prend racine dans une famille afrikaner, cette minorité blanche originaire d’Europe du Nord. Les plats servis à JAN racontent par petites touches l’enfance d’un garçon élevé dans une ferme de Middelburg, dans la province rurale du Mpumalanga.
Le biltong, cette viande séchée épicée qui pend au plafond des boucheries, est servie en poudre dans un sandwich en guise d’amuse-bouche. Jan Hendrik travaille également le melkkos, un porridge au lait et à la cannelle. Ou le bobotie, un hachis sucré-salé qu’il sert à la sud-africaine selon une recette de sa grand-mère, ou bien à la française avec du foie gras et de la truffe.
Même si la cuisine de Jan Hendrik (comme sa salade niçoise) fait une place importance à la gastronomie française, Jan est « fièrement sud-africain », comme on dit chez lui. Oubliez le champagne ; le chef vous proposera du Méthode Cap Classique (MCC), un vin pétillant de son pays. « Si les convives ne sont pas snobs, ils se rendront compte que c’est un très bon vin », lance-t-il. Une sommelière zimbabwéenne, Loraine Magombo, prendra bientôt du service pour les aider à se repérer dans la carte des vins. Le menu proposé doit s’accorder avec des vins sud-africains ou avec des infusions aux plantes, comme le rooibos, le fynbos ou le buchu.
Touristes comme habitants du cru se pressent chez JAN pour embarquer sur ce pont aérien qui relie Le Cap à Nice. Les critiques apprécient le voyage. « Il emporte les clients dans son monde sud-africain et les séduit par son amour pour la cuisine niçoise et pour la Riviera », savoure Lionel Leoty, critique gastronomique au Petit Lu Gourmand.
« Le succès et la reconnaissance du Michelin m’ont donné plus d’autorité pour faire ce que je veux », observe Jan Hendrik. « L’étoile a changé ma vie et celle de mon équipe, mais c’est très dur. Je prends beaucoup plus de plaisir dans mes autres restaurants », confie-t-il depuis la terrasse d’un grand hôtel de Johannesburg, où il transite avant de se rendre dans l’un de ses établissements sud-africains.
Dans la brousse du Kalahari
À 40 ans, le chef assure que la chasse aux étoiles est terminée. Il préfère se concentrer sur le développement de son groupe, qui compte 50 employés. Il revient justement d’un séjour à Klein JAN (« le petit JAN »), un restaurant de l’extrême, perdu au milieu de la brousse du Kalahari, dans une réserve de luxe. « Là-bas, les chefs vivent comme dans un camp militaire parce que c’est un endroit très difficile d’accès et où il est également difficile de vivre. Au niveau de la nourriture, il n’y a rien ! Il faut dénicher des aliments comestibles, les mettre en conserve et les ranger dans le cellier. Vous préparez votre menu, et soudain il se met à pleuvoir ou le vent emporte tout, et il n’y a plus rien. C’est un défi incroyable », s’émerveille le chef, qui apprécie les sensations fortes.
Jan Hendrik se rend ensuite à Franschhoek, une ville viticole et touristique du Cap-Occidental. Il y supervise un restaurant saisonnier dans le domaine La Motte. Il y a installé une grande table commune et éphémère de 16 couverts, où l’on sert des plats sud-africains à la française (en soufflé, en meringue, etc). Jan Hendrik y adapte les recettes qu’il invente dans son émission télévisée diffusée sur une chaîne privée du câble sud-africain.
Graine de star
L’étoile au Guide Michelin a mis le chef sur orbite et l’a rendu célèbre. Son nom et son visage se déclinent sur une large gamme de produits dérivés : JAN The Journal, une revue biannuelle arty et lifestyle, JAN Innovation Academy, des cours en ligne de développement personnel et de cuisine, JAN Online, un blog avec des recettes, des récits et une boutique.
Est-ce à la distance qu’il prend avec les fourneaux que l’on reconnaît un grand chef ? « Je ne suis pas un chef traditionnel, je fais beaucoup d’autres choses », se défend Jan Hendrik. L’homme est un storyteller et la gastronomie est l’un de ses médiums comme le sont la photographie, la mode, la décoration ou l’écriture. L’exigence du Michelin ne sera pas sa prison, la guerre des étoiles n’est pas son obsession. « Personne n’a le droit de vous assigner à la cuisine », professe cet affranchi.
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