Loi sur les génocides : Sarkozy aussi a un problème de mémoire

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Publié le 30 janvier 2012 Lecture : 2 minutes.

Quand les politiques, pardon, les politiciens – la nuance est de taille -, se hasardent à s’emparer de l’Histoire, c’est la foire aux billevesées assurée. Quand, en outre, ils décident de légiférer sur ces questions, alors là… Le Sénat français a ainsi définitivement adopté, le 23 janvier, une loi votée le 22 décembre par l’Assemblée nationale. Désormais, toute personne qui aura nié ou « minimisé de manière outrancière » un génocide « reconnu par la loi » sera passible de 45 000 euros d’amende et de un an de prison. Celui des Arméniens (1915-1916), en l’occurrence, contesté par la Turquie (qui reconnaît cependant des « massacres »), et celui des Juifs, bien entendu (loi Gayssot de 1990, article 9).

Pourquoi les Arméniens et pas les Rwandais, par exemple ? Pourquoi maintenant ? Réponse, dit-on : mesure électoraliste de Sarkozy, qui n’a pas l’air de porter la Turquie dans son coeur et encore moins son Premier ministre, Erdogan. Les 500 000 membres de la communauté arménienne de France sauveront-ils le capitaine « Sarko » du naufrage annoncé pour avril ? L’affaire, si elle se résumait véritablement à cela, ne brille ni par sa moralité ni par son intérêt. On se demande d’ailleurs à quoi servira une telle loi, qui ne doit concerner, chez le pékin français moyen, qu’une infime minorité de hères avinés attablés au zinc d’un troquet à qui il viendrait l’idée de se pencher sur la question un soir de déprime. Quant à hérisser des Turcs pour le moins sourcilleux dès lors que l’on égratigne leur patrie, ce n’est guère plus malin. Réponse du berger à la bergère, au grand dam d’Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères bien seul dans sa lucidité sur ce coup-là, lui qui s’est permis de critiquer cette loi « inopportune » : menace de rupture diplomatique brandie par Ankara, mesures de rétorsions promises à la France et, last but not least, accusation de « génocide » en Algérie lancée par Erdogan. Quand on vous dit que les politiques ne devraient pas se sentir une âme d’historien…

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Au-delà de ces joutes verbales indécentes et sans intérêt « historique », pourquoi Sarkozy, dont la mémoire semble bien sélective, se permet-il de faire la leçon aux Turcs ? « La Turquie […] s’honorerait à revisiter son histoire comme d’autres grands pays dans le monde l’ont fait […], a-t-il expliqué. On est toujours plus fort quand on regarde son histoire, et le négationnisme n’est pas acceptable. » Il doit le faire exprès… Et le passé colonial de la France ? De la conquête aux indépendances, l’histoire française est jalonnée d’atrocités commises en Afrique comme en Asie (Indochine). De massacres perpétrés à l’encontre de combattants de la liberté, mais aussi de civils, femmes et enfants compris. La guerre du Rif (Maroc), Sétif (Algérie), la « pacification » malgache, le massacre du camp de Thiaroye (Sénégal), la fusillade de Séguéla (Côte d’Ivoire), la répression au Cameroun entre 1955 et 1962, pour ne citer que les plus récents et les plus meurtriers. N’est-ce pas plutôt la France qui, au lieu de vanter les « aspects positifs de la colonisation », s’honorerait de revisiter son histoire, monsieur Sarkozy

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