Tunisie : pour SFBT, le succès coule de source

Ultradominatrice dans le secteur des boissons, la Société frigorifique et brasserie de Tunis (SFBT) enregistre des résultats records. Une valeur à suivre sur la place de Tunis.

SFTB contrôle environ 85 % du marché de la bière en Tunisie. © Hichem

SFTB contrôle environ 85 % du marché de la bière en Tunisie. © Hichem

Julien_Clemencot

Publié le 6 février 2012 Lecture : 4 minutes.

La Société frigorifique et brasserie de Tunis (SFBT) n’est pas à un paradoxe près. Elle a beau avoir atteint un chiffre d’affaires de 554 millions de dinars (284,8 millions d’euros) en 2010 et être une des plus importantes entreprises privées de Tunisie, leader sur le secteur des boissons, sa notoriété est quasi nulle. Même aujourd’hui, un an après la révolution, alors que ses revenus devraient bondir d’environ 8 % et son résultat net atteindre 70 millions de dinars, selon le cabinet d’analyse financière AlphaMena.

Certes, la SFBT a connu quelques incidents, comme le blocage de la production de son usine de Bab Saadoun au mois de novembre, mais, selon la direction, la situation s’est normalisée depuis. Pour 2012, les voyants seraient donc tous au vert. Pas question cependant pour Moustapha Abdelmoula, directeur général adjoint, de se montrer trop optimiste. Notamment en raison de la nouvelle donne politique, bien que, pour l’heure, le discours des islamistes d’Ennahdha « soit plutôt rassurant ». Reste que religion et alcool faisant rarement bon ménage, la SFBT, premier producteur de bière du pays, préfère se montrer prudente.

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En raison du niveau des taxes, aucune autre société ne peut s’installer durablement.

Moustapha Abdelmoula

D’ailleurs, elle n’a pas encore reçu les autorisations administratives nécessaires à la création – annoncée fin 2011 – de 58 plate­formes de distribution de ses produits. Pourtant, ces installations pourraient générer environ 650 emplois. La création d’une unité de production de bouteilles en plastique PET à Gabès a en revanche débuté, avec une première tranche d’investissements de 40 millions de dinars. Élaborée en partenariat avec le groupe Castel, son actionnaire de référence propriétaire de 49 % du capital, l’usine pourrait créer 900 emplois. D’autres réalisations concernant le transport, le tri et le recyclage des déchets sont également prévues à moyen terme.

Au-delà des nouveaux impératifs écologiques, ces projets illustrent le potentiel du marché tunisien, notamment dans le secteur des eaux minérales, qui, depuis une décennie, connaît une progression annuelle à deux chiffres. La consommation atteint désormais près de 100 litres par an et par personne, selon les autorités tunisiennes. Celle des jus de fruits est aussi en forte augmentation, même si le chiffre d’affaires reste encore limité. Il a tout de même bondi de 23 % entre 2009 et 2010 et approché les 6 millions de dinars. Et si les exportations de bière vers la Libye se sont effondrées, la consommation locale a plus que compensé ce manque à gagner. Sur les neuf premiers mois de 2011, la SFBT a enregistré une hausse des ventes de plus de 30 %.

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Monopole

Il faut dire que l’entreprise jouit d’un quasi-monopole. En Tunisie, elle contrôle environ 85 % du marché de la bière, 90 % de celui des sodas, entre 40 % et 50 % de celui de l’eau minérale. Chaque année, elle investit d’ailleurs entre 3,4 et 3,8 millions de dinars en publicité pour maintenir son leadership, d’après Sigma Conseil. « Nous ne sommes pas d’affreux tueurs qui empêchent l’émergence de concurrents », plaide cependant Moustapha Abdelmoula. Selon le directeur général adjoint, si d’autres sociétés ne parviennent pas à s’installer durablement, c’est avant tout en raison du niveau de taxes imposé par l’État. Elles représentent presque les trois quarts du prix d’une bière, mais aussi 47,5 % de celui d’un soda. De fait, la part qui revient à l’entreprise est très limitée. Seule une société implantée de longue date comme la SFBT, fondée en 1925, peut selon lui conserver suffisamment de rentabilité. « Ni Pepsi-Cola, malgré trois tentatives, ni Turborg n’ont réussi en Tunisie. Et Heineken, qui a investi près de 50 millions d’euros depuis son arrivée [en 2007, NDLR] perd de l’argent chaque année », affirme Moustapha Abdelmoula.

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SABMiller-Castel, le rapprochement ?

Souvent évoquée par le passé, l’acquisition des activités africaines du français Castel par SABMiller serait de nouveau envisagée par le groupe anglo-saxon. Estimée à 4,7 milliards d’euros, cette opération réunirait les deux principaux brasseurs du continent. Castel s’est refusé à tout commentaire, préférant saluer la mise en place d’une direction unique pour les deux groupes au Nigeria et en Angola. Cette mesure renforce l’alliance nouée en 2001, qui a vu l’entreprise française prendre 38 % de la filiale africaine de SABMiller et cette dernière acquérir 20 % des activités bières et boissons non alcoolisées de Castel sur le continent. J.C.

Confortablement installée sur son marché, la SFBT fait sans surprise figure de valeur refuge sur la Bourse de Tunis. Et même si les étrangers ne peuvent acheter ses actions parce que leur part du capital, pour les brasseries comme pour les banques, ne peut dépasser 50 %, son titre a grimpé de 15 % au dernier trimestre 2011. Il faut dire qu’en approchant des 5 % son rendement net par action est des plus attractifs.

La seule faiblesse de l’entreprise pourrait être l’âge du capitaine, Mohamed Bousbia, son PDG étant presque octogénaire. Un patron emblématique, ancien vice-gouverneur de la Banque centrale tunisienne, dont on dit qu’il gère la maison à l’ancienne, de manière très centralisée. « Ne craignez rien, rassure néanmoins Moustapha Abdelmoula, tout est déjà prévu. ».

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