Les migrants africains, outils de diversion et otages des débats politiciens européens ?
Avec son intervention à Mayotte ou dans un concours de populisme avec l’Italie, le gouvernement français tente de déplacer le curseur politique de la réforme des retraites vers la gestion de l’immigration.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 5 mai 2023 Lecture : 2 minutes.
Gérer différemment les flux migratoires démange toujours Gérald Darmanin, en dépit du fait que le ministre français de l’Intérieur et des Outre-mer est encore confronté à la gestion de rues françaises agitées par les manifestations. C’est que le gouvernement a besoin de diversion, en cette période de contestation de la réforme des retraites. C’est aussi que la droite radicale semble tirer les marrons du feu contestataire, si l’on en croit les sondages qui anticipent de présumés résultats électoraux à venir sur le Vieux Continent…
Déporter le débat
Or, fin avril, faute de pouvoir rassembler une majorité au Parlement, la Première ministre Elisabeth Borne annonçait le report d’une loi immigration, marotte de Gérald Darmanin et d’Olivier Dussopt, son collègue ministre du Travail essoré par la crise sociale. Le « premier flic de France » tente tout de même de déporter le débat des retraites vers celui des migrations, à la fois dans ses actes et dans ses paroles.
Du côté des actes, dans le 101e département français, la région insulaire de Mayotte, les autorités françaises déploient, avec peine et fracas, l’opération Wuambushu, vaste action de lutte contre l’immigration illégale, notamment venue des autres composantes de l’ancien protectorat français sur l’archipel des Comores.
Faire de la surenchère
Du côté des paroles, après avoir fait état d’ « un afflux de personnes migrantes et notamment de mineurs » dans le sud de la France – selon lui via la Tunisie et l’Italie –, Gérald Darmanin a rejeté la « faute », ce 3 mai, sur l’actuelle présidente du Conseil des ministres italien qu’il juge « incapable […] de gérer cette pression migratoire ». Des propos que le ministre italien des Affaires étrangères a qualifié d’ « offense ». Des déclarations que beaucoup perçoivent comme de la surenchère, quand on sait que Giorgia Meloni préside le parti national-conservateur « Frères d’Italie » et qu’elle qualifia, par le passé, le dictateur fasciste Benito Mussolini de « bon politicien »…
Déjà confrontés aux flots tourmentés de la Méditerranée, les migrants sont aujourd’hui ballotés par les vagues populistes européennes de compétitions électoralistes transnationales. Et que ceux qui s’étonnent de voir le ministre d’un gouvernement autoproclamé « centriste » participer à une course à l’échalote de droite radicale se souviennent de février 2021. Sur un plateau de télévision publique, Gérald Darmanin jugeait « Marine Le Pen pas assez dure, (…) un peu branlante, un peu molle », sur les questions migratoires.
Et d’enfoncer aujourd’hui le clou, en comparant les deux femmes politiques : « Meloni, c’est comme Le Pen, elle se fait élire sur “vous allez voir ce que vous allez voir” et puis ce qu’on voit c’est que ça ne s’arrête pas et que ça s’amplifie. » « Ça », ce sont des êtres humains dont une partie périt en mer…
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