La Ligue arabe réintègre le régime syrien après plus de 11 ans d’absence
Les ministres arabes des Affaires étrangères ont décidé le 7 mai au Caire de réintégrer le régime syrien à la Ligue arabe après l’avoir écarté en 2011 pour la répression du soulèvement populaire ayant dégénéré en guerre sanglante.
« Les délégations du gouvernement de la République arabe de Syrie siègeront de nouveau à la Ligue arabe », indique le texte voté dimanche par l’ensemble des ministres dans une réunion à huis clos au siège de la Ligue arabe au Caire.
Isolé diplomatiquement depuis 2011, le président syrien Bachar al-Assad est récemment sorti de son statut de persona non grata et certains observateurs estiment qu’il pourrait même assister le 19 mai à Jeddah au sommet annuel des chefs d’État de l’organisation panarabe.
Un demi-million de morts
Il s’agit d’un retournement spectaculaire : en 2013, l’opposition anti-Assad avait pu occuper le siège de la Syrie lors d’un sommet de la Ligue arabe à Doha au Qatar. Des pays arabes avaient soutenu des rebelles au début de la guerre, devenue depuis un terrain d’affrontement entre forces étrangères, et qui a fait environ un demi-million de morts et des millions de réfugiés et de déplacés.
Si le réchauffement diplomatique se préparait depuis des mois, Bachar al-Assad a bénéficié de l’élan de solidarité mondial après le tremblement de terre dévastateur du 6 février, qui a fait des milliers de morts en Turquie et en Syrie.
Le président et ses ministres ont ainsi vu défiler à Damas les représentants de nombreux pays arabes qui refusaient jusqu’alors de normaliser leurs relations avec la Syrie – certains faisant même de leur départ du pouvoir une condition sine qua non.
Précieux soutiens
Damas mise désormais sur une pleine normalisation avec les pays arabes, notamment les riches monarchies du Golfe – un temps plus grands alliés de l’opposition à Bachar al-Assad, pour financer la coûteuse reconstruction du pays aux infrastructures ravagées par les conflits à répétition.
Avec le temps et le soutien précieux de la Russie et de l’Iran, le régime de Bachar al-Assad a repris le contrôle de la majeure partie du territoire, même si quatre millions de personnes vivent dans le nord-ouest sous contrôle des rebelles et des jihadistes.
Samedi à Damas, le président iranien Ebrahim Raïssi et son homologue syrien annonçaient renforcer leurs liens diplomatiques et économiques, mettant l’accent sur la reconstruction.
Ex-paria
En novembre 2011, 18 des 22 membres de la Ligue arabe avaient suspendu la participation du gouvernement syrien à leurs réunions, suscitant l’approbation des pays occidentaux et de la Turquie, mais l’ire de la Russie, de l’Iran, de l’Irak et du Liban.
L’organisation panarabe avait également imposé des sanctions économiques à la Syrie et la fin des liaisons aériennes, après des mois de mesures économiques américaines et européennes contre des dirigeants et intérêts économiques syriens.
En février 2012, les pays du Conseil de coopération du Golfe avaient rappelé leurs ambassadeurs de Syrie. Mais dès fin 2018, les Émirats arabes unis, qui multiplient les coups d’éclats diplomatiques et tentent de s’imposer en leader sur la scène arabe, avaient rouvert leur ambassade à Damas. Bachar al-Assad leur avait réservé en retour en mars 2022 sa première visite dans un pays arabe depuis le début de la guerre.
Réchauffement avec la Turquie
En 2023, la donne régionale change radicalement : l’Arabie saoudite sunnite et l’Iran chiite, grands ennemis, se réconcilient en mars. Dans la foulée, le 12 avril, le ministre syrien des Affaires étrangères effectue une visite surprise en Arabie saoudite, une première depuis le début du conflit. Deux semaines plus tard, la Tunisie nomme un ambassadeur à Damas.
Avant cela, peu après le séisme, le chef de la diplomatie égyptienne – poids lourd de la Ligue arabe – avait été dépêché à Damas pour une visite « humanitaire ». En dehors de la Ligue arabe, la Turquie, grand soutien des anti-Assad depuis 2011, amorce également un réchauffement.
Fin 2022, les ministres turc et syrien de la Défense se sont entretenus lors d’une réunion tripartite à Moscou. Mais Bachar al-Assad insiste : pas de rapprochement sans « la fin de l’occupation » turque du territoire syrien.
(Avec AFP)
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