En Algérie, l’ancien général-major Ali Ghediri à nouveau devant les juges
Ancien haut gradé de l’armée, Ali Ghediri avait tenté de se présenter à la présidentielle de 2019. Incarcéré depuis, il doit être libéré en juin mais sa défense s’inquiète d’un appel de dernière minute.
À la veille de son procès en appel avancé au 16 mai, l’entourage de l’ancien général-major aujourd’hui à la retraite, Ali Ghediri, assure qu’il a l’intention de respecter la sanction prononcée durant l’audience de janvier 2022 qui le prive de ses droits civiques et politiques pendant cinq ans, si celle-ci est reconduite par cette nouvelle audience de la session criminelle.
Depuis juin 2019, le haut gradé purge une peine de quatre ans à la prison de Koléa pour « atteinte au moral de l’armée en temps de paix », suite à sa déclaration dans une interview accordée fin 2018 au quotidien El Watan dans laquelle il appelait l’institution militaire à barrer la route au cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika qui se profilait alors. En octobre 2022, après un appel introduit par ses avocats, la Cour suprême a annoncé le renvoi de son dossier devant la chambre criminelle de la Cour d’Alger.
Programmation impromptue
La rapidité avec laquelle la date d’une audience en appel a été fixée inquiète la défense de Ghediri. Son nom ne figurait pas sur le tableau de programmation de la session d’appel affichée en avril dernier, et a été ajouté par le greffe. « C’est très bizarre. On a créé une session spéciale pour lui », confie à Jeune Afrique Nabila Slimi, membre de son collectif de défense qui espère une issue sans mauvaises surprises.
Le 13 juin prochain, l’ex-candidat à la présidentielle avortée d’avril 2019 aura purgé la totalité de sa peine, et aurait dû comparaitre libre en appel. Mais la programmation impromptue de son procès inquiète sa famille qui a tenu à affirmer via les réseaux sociaux que « son seul souci est qu’Ali Ghediri retrouve sa liberté » loin de toutes ambitions politiques. « Aujourd’hui, son seul souhait est de quitter les geôles de la prison de Koléa et de rejoindre les siens. Monsieur Ghediri n’a ni le droit de voter, ni le droit de se présenter s’il le veut… », appuie Nabila Slimi.
« Manège dégueulasse »
À l’origine de cette mise au point, des vidéos diffusées sur YouTube qui prêtent à l’ancien général-major des velléités de renouer avec la politique à sa sortie de prison. « Arrêtez ce manège dégueulasse et laissez l’homme rejoindre sa famille qui l’attend depuis quatre ans », s’insurgeait le 7 mai l’avocate sur sa page Facebook, tout en confirmant la détermination d’Ali Ghediri à suivre les procédures judiciaires pour réclamer son acquittement. Pour sa défense, l’ancien officier reste un « détenu politique victime d’un règlement de comptes » de la part d’un clan qui voulait, à l’époque, l’évincer de la course à la présidence de la république.
Interpellé à son domicile, le 12 juin 2019, l’officier supérieur qui a dirigé pendant quinze ans la direction centrale des ressources humaines du ministère de la Défense nationale, a initialement été poursuivi pour « participation à la fourniture à des agents de pays étrangers d’informations qui portent atteinte à l’économie nationale » et « faux et usage de faux », des accusations – qui ont fini par être annulées par la chambre d’accusation de la cour d’Alger – soutenues par son étrange rencontre avec l’homme d’affaires Hocine Gasmi, en septembre 2018.
Fausse identité
À l’époque, Gasmi, qui se présentait comme chef de parti, avait proposé au major-général Ghediri, novice en politique et ne disposant d’aucun soutien partisan, de l’aider à collecter les 5 000 signatures de soutien à sa candidature au scrutin présidentiel, raconte aujourd’hui l’avocate qui l’assiste depuis son placement sous mandat de dépôt. Rassuré par la pléiade de photos des pontes du système qui ornaient tout un mur du bureau de son interlocuteur, Ghediri accepte la proposition.
Problème : selon le dossier judiciaire, Hocine Gasmi est en réalité un repris de justice qui se cachait dernière la fausse identité de Hocine Gouasmi pour créer une formation politique, le Forum de l’Algérie de demain, et s’approcher des hauts responsables algériens. Selon la justice, il avait des contacts avec une diplomate israélienne qu’il rencontrait pendant ses fréquents voyages en France. Il a depuis écopé de dix ans de prison ferme.
Phase d’apaisement
De son côté, Ali Ghediri avait été innocenté par la chambre d’accusation du chef d’inculpation « de trahison à travers la fourniture à des parties étrangères des informations pouvant nuire à l’économie nationale ». Par la suite, il s’est lancé dans un plaidoyer visant à démontrer sa légitimité sur le plan politique : mettant en avant son doctorat en sciences politiques, il a également rappelé qu’il était auteur de plusieurs contributions politiques dans la presse nationale « qui l’habilitent à postuler pour la magistrature suprême ».
« C’est à partir de là que la deuxième accusation d’atteinte au moral de l’armée en temps de paix, à laquelle on s’attendait pas, est tombée », témoigne sa défense. Qui poursuit : « Ali Ghediri a voulu user de son droit constitutionnel en se portant candidat à la présidentielle. Cette époque est derrière lui, malgré ce que certains pensent ou craignent », conclut l’avocate qui veut croire que « la phase d’apaisement que met en avant actuellement le président Tebboune » va enfin permettre de tourner la page.
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