Pap Ndiaye et la suspension de Franklin Nyamsi : alibi inespéré ou ironie du sort ?

Accusé de « non-respect du devoir de réserve » pour ses critiques à l’égard de « la politique africaine de la France », le professeur de philosophie dénonce une « persécution politique ». Le ministre français de l’Éducation nationale, lui, évoque des « propos d’une très grande violence ».

© Damien Glez

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Publié le 10 mai 2023 Lecture : 2 minutes.

Faut-il renoncer à une mesure quand celle-ci paraît à ce point « téléphonée » qu’elle offre du grain à moudre à ses pourfendeurs ? Vu d’Afrique, le vote, ce mardi 9 mai, par les députés français, d’une résolution destinée à demander officiellement à l’Union européenne la qualification du groupe Wagner de « terroriste » ressemble pour certains à une expression de rancœur. Il y a quelques mois, le Mali organisait un chassé-croisé expéditif entre les éléments français de la force Barkhane et des « instructeurs russes »

Non-respect du devoir de réserve

De même, la suspension temporaire de ses fonctions du professeur de philosophie de l’Université de Rouen Franklin Nyamsi n’était-elle pas de nature à déclencher un tombereau de réactions activistes, bien au-delà du trimestre concerné ? Manifestement droit dans ses bottes, le ministère français de l’Éducation nationale et de la Jeunesse dit s’appuyer sur une « procédure stricte » pour « non-respect du devoir de réserve » sur « les réseaux sociaux ».

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Ne dévoilant publiquement que des données jugées « fragmentaires » par l’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public (Appep) et s’exprimant, en même temps, sur deux cas de suspension d’enseignants de philo, le ministre Pap Ndiaye évoque, dans la presse, des « propos d’une très grande violence »…

Autoproclamé « défenseur des opprimés » et s’affirmant « persécuté par la Françafrique », Franklin Nyamsi ne reste pas, lui, allusif. Sur une page Twitter dont la bannière le montre avec le Malien Assimi Goïta, le professeur – proche de Guillaume Soro – fait vibrer la corde sensible en se qualifiant de « père d’une famille de quatre enfants » privé « de son emploi pour avoir usé de sa liberté d’expression hors de son lieu de service », précisément sur le thème de « la politique africaine de la France ». Suivi par près de 160000 twittos, il n’évoque rien de moins que « la destruction évidente des libertés individuelles en France » et ajoute que « Pap Ndiaye devra répondre de ses actes, quand la justice reviendra vers lui ».

Alibi inespéré ou ironie du sort, le ministre présumé suppôt de la Françafrique est sénégalais par son père – ce qui ne saurait décontenancer les activistes qui critiquent une politique « africaine » de la France à laquelle ils attribuent des relais originaires du continent. Fait plus déroutant et largement exploité par Franklin Nyamsi sur les réseaux sociaux : l’intellectuel Pap Ndiaye contribua, avant son accession au gouvernement, au Livre noir du colonialisme. Le ministre est d’ailleurs toujours caricaturé, par ses pourfendeurs, comme un chantre présumé du wokisme…

La rentrée scolaire de septembre sera certainement chaude. Reste à savoir si, après un trimestre de suspension mâtiné de vacances, le dossier Nyamsi, lui, aura refroidi.

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