En Tunisie, un journaliste voit sa peine quintuplée en appel
Khalifa Guesmi a été condamné à cinq ans de prison, une peine d’une lourdeur inédite dans le pays pour un journaliste. Plusieurs organisations dénoncent une mascarade et une dérive répressive du régime de Kaïs Saïed.
Khalifa Guesmi, un journaliste de la radio privée tunisienne Mosaïque FM, a été condamné en appel à cinq ans de prison pour avoir divulgué des informations sur les services de sécurité, a indiqué le 16 mai son avocat. La justice l’avait condamné en novembre 2022 à un an de prison en première instance, mais le reporter avait fait appel.
Il a été reconnu coupable d’avoir « participé à la divulgation intentionnelle d’informations relatives aux opérations d’interception, d’infiltration, de surveillance audiovisuelle ou des données qui y sont collectées », a précisé Me Rahal Jallali. Guesmi a déposé un recours en cassation et est pour le moment maintenu en liberté provisoire, selon son avocat.
« C’est la plus lourde condamnation prononcée par la justice tunisienne contre un journaliste », a souligné Amira Mohamed, vice-présidente du SNJT, le syndicat des journalistes tunisiens. « C’est une dérive autoritaire dangereuse et une atteinte flagrante à la liberté de la presse », a-t-elle déploré.
Peines alourdies en appel
Un policier, poursuivi dans la même affaire et accusé d’avoir fourni des informations au journaliste, a été condamné à dix ans de prison en appel. Il avait été condamné à trois ans de réclusion en première instance.
Khalifa Guesmi avait été arrêté et détenu pendant une semaine en mars 2022, après la publication sur le site de Radio Mosaïque d’une information portant sur le démantèlement d’une « cellule terroriste » et l’arrestation de ses membres. Les peines du policier et du journaliste ont été alourdies en vertu d’une loi antiterroriste.
Plusieurs ONG locales et internationales, dont la Ligue tunisienne des droits de l’homme, I Watch et l’Union internationale de la presse francophone, ont dénoncé le 16 mai dans un communiqué commun « un verdict mascarade » et « un revers majeur pour le système judiciaire ». Elles ont mis en garde « contre la gravité de l’orientation répressive du pouvoir actuel » et appelé les militants et la société civile « à se mobiliser pour défendre les libertés et les droits de l’homme ».
Ces ONG ont critiqué à plusieurs reprises un « recul » des libertés en Tunisie depuis que le président Kaïs Saïed s’est arrogé les pleins pouvoirs le 25 juillet 2021. Dans un rapport publié au début de mai, le SNJT a alerté sur des « menaces sérieuses » pesant sur la liberté de la presse dans le pays.
(avec AFP)
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