Par la grâce d’Emmerson Mnangagwa
Pure coïncidence ? Au Zimbabwe, à quelques semaines des élections générales, le président Mnangagwa a décidé de gracier près d’un cinquième des prisonniers du pays.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 19 mai 2023 Lecture : 2 minutes.
Au Zimbabwe, ce sont 4 200 détenus – dans un pays qui en comptent 22 000 – qui devraient bientôt être libérés, soit 19 % de la population carcérale nationale. Le chef de l’État a en effet pris la décision, le 18 mai, de les gracier. Et depuis, chacun y va de son explication.
Pour un observateur peu au fait de la politique zimbabwéenne, la raison de cette mesure spectaculaire semble déchiffrable dans les statistiques. Comme bien des pays, l’ancienne Rhodésie du Sud souffre d’une inextricable surpopulation carcérale : ses quelque 50 prisons ont une capacité totale de 17 000 places et abritent donc 29 % de prisonniers en trop.
Un « geste noble » ?
Pour les autorités, la grâce collective accordée par Emmerson Mnangagwa n’a néanmoins rien à voir avec la nécessaire décongestion des lieux d’incarcération. Porte-parole des services pénitentiaires, Meya Khanyezi affirme que cette décision doit être lue comme « un geste noble de la part du président ».
Pour l’opposition politique, le lyrisme de ces propos cache mal une manœuvre politicienne. Ses représentants notent que les élections présidentielle, législatives et sénatoriales doivent se tenir en août prochain et rappellent que le président Mnangagwa est candidat à sa réélection. Tout comme nombre de membres de son parti, la Zanu-PF.
Technique électoraliste
Dans ce pays d’Afrique australe, dont l’histoire politique a été marquée par des violences diverses, le successeur octogénaire de Robert Mugabe promettait, en avril dernier, « des élections libres, équitables et crédibles ». Les détenus libérés, principalement des hommes, auront donc la possibilité de voter et d’entraîner leurs proches avec eux.
Si l’amnistie de plusieurs milliers de prisonniers peut apparaître comme un témoignage d’humanité, la technique inquiète parfois les populations qui ne prisent pas la remise en liberté anticipée et collective d’auteurs de crimes et délits.
Aussi, pour satisfaire des électeurs potentiels sans en froisser d’autres, l’État précise que la grâce présidentielle ne concerne que les détenus qui ont effectué les trois quarts de leur peine. De même, sont exclus les condamnés pour vols, trahison et atteintes à la sécurité. En mai 2016, 2 000 prisonniers avaient été amnistiés, essentiellement des mineurs délinquants et des femmes.
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