Ousmane Sonko ramené de force à Dakar
L’opposant sénégalais a été interpellé dimanche par des gendarmes dans le sud du pays et ramené de force à son domicile de Dakar alors qu’il venait d’entamer sa « caravane de la liberté » vers la capitale.
Le ministre de l’Intérieur, Antoine Félix Abdoulaye Diome, a invoqué les heurts entre partisans d’Ousmane Sonko et forces de l’ordre qui ont accompagné depuis vendredi le retour de l’opposant à Dakar en convoi par la route et dans lesquels un homme a été tué par balle.
« Il y a eu mort d’homme à Kolda, est-ce que l’État va rester les bras croisés ? (…) La réponse ne peut être que négative », a déclaré le ministre à la chaîne de télévision publique RTS. Il a fait valoir qu’Ousmane Sonko aurait dû formuler une demande d’autorisation préalable avant d’organiser ce qu’il a baptisé la « caravane de la liberté ». « On a pu, de ce fait, encadrer le leader du (parti) Pastef jusqu’à son domicile (à Dakar) où il a été déposé », a-t-il dit.
Une source proche des autorités a précisé qu’Ousmane Sonko avait été interpellé près de Koungheul par les gendarmes et ramené par eux vers la capitale. Le ministre de l’Intérieur a rapporté que des armes avaient été trouvées dans le véhicule transportant l’opposant.
Bras de fer
Le sort d’Ousmane Sonko, engagé dans un bras de fer avec le pouvoir qui n’a fait que se durcir depuis sa mise en cause par la justice dans une affaire de viols, en mars 2021, donnait lieu à des spéculations depuis plusieurs heures.
Ousmane Sonko, candidat déclaré à la présidentielle mais menacé d’inéligibilité par des affaires judiciaires qu’il dénonce comme un complot de l’État, n’avait en effet plus donné de nouvelles à son entourage depuis dimanche matin.
Dans un communiqué publié en milieu d’après-midi, son parti l’avait déclaré « introuvable et injoignable », alimentant les conjectures et provoquant de vives réactions sur les réseaux sociaux. Quelques minutes seulement avant la prise de parole du ministre de l’Intérieur, à 20 heures, El Malick Ndiaye, le secrétaire national des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) en charge de la communication, affirmait encore à Jeune Afrique n’avoir « aucune nouvelle » d’Ousmane Sonko.
Une intervention filmée du Président des Pastef avait été annoncée pour 23 heures locales, dimanche, sur sa page Facebook. Mais El Malick Ndiaye a précisé sur Twitter en fin de soirée que « les forces de l’ordre ayant refusé l’accès à notre équipe technique au domicile du président Ousmane Sonko, sa déclaration a été reportée [au] lundi 29 mai 2023. »
Ce dernier avait entamé vendredi, dans le sud du pays, un retour par la route vers Dakar dont il comptait faire une démonstration de force. Son passage a drainé des foules de jeunes supporteurs enthousiastes et les rassemblements spontanés autour de son convoi ont parfois été émaillés de heurts entre ses partisans et les forces de sécurité, dans lesquels un homme a été tué à Kolda.
Spéculations
Alors qu’Ousmane Sonko relaie volontiers ses faits et gestes en direct sur les réseaux sociaux, ce qu’il a fait durant les deux premières journées de son périple, il a cessé de le faire dimanche après avoir adressé, dans une courte vidéo, ses vœux à la communauté catholique à l’occasion de la Pentecôte.
Depuis mars 2021, la mobilisation des supporteurs d’Ousmane Sonko a régulièrement donné lieu à des débordements. Il avait alors été interpellé à Dakar alors qu’il se rendait en cortège à la convocation d’un magistrat dans l’affaire de viols qui l’oppose à Adji Sarr, une femme qui l’accuse de l’avoir violée dans un salon de massage qu’il fréquentait et où elle travaillait alors. Sa longue rétention avant de comparaître devant le juge puis de ressortir libre, sous contrôle judiciaire, avait contribué à déclencher des émeutes à Dakar et dans plusieurs grandes villes du pays, lesquelles avaient causé une douzaine de morts.
La chambre criminelle du tribunal de Dakar doit rendre le 1er juin un verdict très attendu dans cette affaire de viols présumés. Le 23 mai, Ousmane Sonko, qui dénonce un complot du pouvoir pour l’écarter de la présidentielle de février 2024, s’était abstenu de comparaître à l’audience en prétextant n’avoir pas reçu de convocation. En plus d’une éventuelle condamnation à une peine de prison ferme, il risquerait de devenir inéligible si la justice le déclarait coupable.
(Avec AFP)
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