En Tunisie, la « mainmise » de Kaïs Saïed sur la justice contestée dans la rue
Il y a un an, le président tunisien révoquait 57 magistrats, expliquant vouloir « purger » le système judiciaire. Une décision dénoncée par les manifestants rassemblés ce 1er juin à Tunis.
Des dizaines de magistrats, d’avocats et de militants de la société civile ont protesté ce jeudi 1er juin à Tunis contre la révocation, il y a un an, par le président Kaïs Saïed de plus de 50 juges, dénonçant la « mainmise » du pouvoir sur la justice. « Le peuple veut des magistrats et non des esclaves », « la magistrature est un pouvoir et non pas une fonction », ont scandé les manifestants, rassemblés devant le Palais de justice, sous le contrôle étroit de policiers en civil.
Le 1er juin 2022, Kaïs Saïed avait révoqué 57 magistrats par décret présidentiel, les accusant de corruption et d’entrave à plusieurs enquêtes. En août, la justice administrative a suspendu cette décision pour 49 d’entre eux et annoncé qu’ils pouvaient reprendre leur travail. Mais ils n’ont pas pu réintégrer leurs postes, leurs salaires n’ont pas été versés et ils ont été privés de couverture sociale.
Intimidations
« Malgré cette décision définitive de la justice, le président et la garde des Sceaux refusent d’appliquer la loi, ce qui représente un crime », déplore le porte-parole du comité de défense des magistrats révoqués, l’avocat Hammami Ayachi. Selon cet ancien opposant au régime du président déchu Zine el-Abidine Ben Ali, 37 plaintes ont été déposées depuis janvier contre la ministre de la Justice, Leila Jaffel, pour « violation de la loi ».
Le chef de l’État « intimide les magistrats par ses déclarations, exprimant sa position sur plusieurs affaires politiques et juridiques, accuse-t-il. Certains magistrats ont peur d’être révoqués eux aussi s’ils n’appliquent pas les ordres. » « Nous sommes punis par le pouvoir parce que nous avons refusé d’émettre des mandats d’arrêt contre des personnalités politiques », a affirmé Hamadi Rahmani, l’un des magistrats révoqués, en dénonçant « la mainmise du pouvoir sur la magistrature et des tentatives d’intimidation des juges ».
Réforme des institutions
Début 2022, quelques mois après s’être emparé des pleins pouvoirs, Kaïs Saïed avait dissous le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) pour le remplacer par un conseil provisoire dont il a nommé les membres. Selon la nouvelle Constitution qu’il a fait promulguer mi-2022, le président désigne les magistrats sur proposition du CSM, dont c’était auparavant la prérogative.
(avec AFP)
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