2008 est une année de désaccord et de réconciliation pour le pays

Publié le 23 décembre 2008 Lecture : 6 minutes.

Pour les Somaliens, 2008, comme les 17 années précédentes, a été une année de conflits et de controverses, mais les perspectives du retrait des troupes éthiopiennes et l’accord de paix conclu entre le gouvernement de transition et une des principales factions de l’opposition est une lueur d’espoir pour ce pays est-africain ravagé par la guerre.

Peu après son investiture à la fin de l’année dernière, le Premier ministre somalien, M. Nur Hassan Hussein, a déclaré son intention de faire la paix avec tous les Somaliens, indépendemment de leur affiliation. En mai, des pourparlers engagés sous l’égide de l’ONU ont eu lieu à Djibouti, pays voisin, entre la coalition de l’opposition, à savoir l’Alliance pour une nouvelle libération de la Somalie (ARS), dirigée par le Cheik Sharif Cheik Ahmed, considéré comme un modéré, et le gouvernement fédéral transitoire de Somalie.

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Le représentant spécial de l’ONU pour la Somalie, Ahmedou Ould-Abdallah, a exprimé son optimisme au sujet des pourparlers. "C’est la première fois que les partis somaliens acceptent de se rencontrer avec un nombre limité de délégués, à une date convenue à l’avance, dans un laps de temps défini et à un endroit précis", a déclaré Ould-Abdalla, qui a joué un rôle de pivot essentiel pour garantir le succès des pourparlers.

Suite aux premières réunions à Djibouti, les deux parties ont fait des compromis susceptibles d’ouvrir la voie pour les futurs cycles de négociations. Ces résultats ont cependant conduit à l’écroulement de l’ARS, qui s’est divisée en deux camps, l’un d’entre eux dirigé par le leader islamiste radical, Cheik Hassan Dahir Qweys, qui a déclaré avoir remplacé Cheik Ahmed, dont la faction de l’ARS est basée à Djibouti.

Les deux parties de l’ARS, à savoir la faction d’Asmara et la faction de Djibouti, ont échangé des accusations de trahison. La faction de Djibouti s’est engagée à poursuivre le processus de paix avec le gouvernement de transition, mais la faction d’Asmara a laissé entendre qu’elle ne négocierait pas avec ce qu’elle a qualifié de "gouvernement fantôme et traître", promettant de continuer à lutter aussi longtemps que les soldats éthiopiens resteront sur le sol somalien.

D’autres groupes armés en Somalie, dont le mouvement extrémiste al-Shabaad, accusé par les Etats-Unis d’avoir des liens avec Al-Qaida, ont manifesté leur opposition à tout entretien avec le gouvernement de transition et déclaré leur détermination à poursuivre la lutte contre les forces gouvernementales et les troupes éthiopiennes ainsi que contre les soldats de l’Union africaine de maintien de la paix à Mogadiscio.

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"Faire la paix est plus difficile que faire la guerre", a indiqué Oul-Abdallah en mai dernier, peu avant la réunion en face à face entre les partis somaliens. "C’est avant tout avec des adversaires que l’on fait la paix, pas avec des amis", a-t-il ajouté.

Le 9 juin dernier, le gouvernement de transition et l’ARS ont signé un accord de cessez-le-feu à la suite de près de deux semaines de négociations difficiles. En vertu de l’accord, les deux parties ont accepté "la fin de tous les actes de confrontation armée" et le cessez-le-feu "doit entrer en vigueur dans les 30 jours suivant la signature de cet accord sur l’ensemble du territoire du pays".

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Les parties ont également demandé aux "Nations unies, en conformité avec la résolution 1814 du Conseil de sécurité de l’ONU et dans une période de 120 jours, d’autoriser et de déployer une force de stabilisation internationale composée des pays amis de la Somalie, en excluant les Etats voisins".

Deux commissions conjointes du gouvernement de transition et de l’ARS, soit la Commission de sécurité conjointe et la commission de haut niveau, ont été établies pour suivre les l’évolution des négociations concernant la sécurité, la coopération politique entre les deux parties, ainsi que la justice et la réconciliation.

La communauté internationale a accueilli favorablement l’accord de Djibouti en le considérant comme la seule solution viable après deux décennies de violence. Cependant, la violence sur le terrain ne décroît pas. Des centaines de civils ont été tués et d’autres grièvement blessés dans des affrontements presque quotidiens. De nombreux habitants dans la capitale sont obligés de quitter leurs domiciles pour rejoindre des centaines de milliers d’autres qui campent dans de mauvaises conditions dans les banlieues de Mogadiscio.

Entre temps, des différences de point de vue au sein de la direction du gouvernement de transition sur différentes questions et une divergence sur le processus de paix de Djibouti sont progressivement apparues. Fin juillet, le Premier ministre Hussein,a limogé le maire de Mogadiscio, M. Mohamed Omar Habeb, un allié proche du président Abdulahi Yusuf Amed, en accusant le maire d’incompétence, de déclaration mensongère et d’insubordination.

Mais le président a réhabilité le maire tandis que le Premier ministre a nommé un remplaçant. Début août, sur fond d’escalade des discordances, 10 ministres proches de M. Yusuf ont démissionné, alléguant que le Premier ministre avait violé la Constitution nationale, mais l’accusation a été catégoriquement rejetée.

Quelques jours plus tard, M. Hussein a nommé de nouveaux ministres pour remplacer ceux qui avaient démissionné, mais M. Yusuf a refusé d’entériner leur nomination. Un certain nombre de tentatives de médiation par le gouvernement éthopien et l’Autorité intergouvernementale est-africaine pour le développement (IGAD) n’ont pas pu faire disparaître le désaccord croissant entre les deux dirigeants somaliens.

Fin octobre, l’IGAD a invité tous les dirigeants somaliens, y compris l’ensemble des parlementaires, à un sommet qui s’est tenu dans la capitale kenyane, Nairobi, pour tenter de résoudre les différends entre les hauts dirigeants somaliens. Le sommet a recommandé la formation d’un nouveau cabinet, affirmant qu’il respectait la décision du Parlement somalien d’exclure les ministres qui avaient démissionné des postes ministériels et soutenait les efforts de paix du Premier ministre.

Le sommet a exprimé également son soutien au processus de paix de Djibouti, menaçant d’imposer des sanctions à tout ‘"obstacle à la paix". La délégation du gouvernement somalien et les représentants de l’opposition ont enfin finalisé à Djibouti les négociations de paix par la signature d’un accord de partage du pouvoir.

Néanmoins, le président a exprimé son insatisfaction, déclarant que l’accord n’était plus qu’un "accord factionnel", tandis que les autres factions armées ont rejeté l’accord et ont fait savoir qu’elles continueraient à attaquer les forces gouvernementales, les soldats de maintien de la paix de l’Union africaine et les troupes éthiopiennes qui ne contrôlent actuellement que Mogadiscio et la ville de Baidoa (sud), siège du Parlement.

En vertu de l’accord signé fin octobre, les deux parties ont convenu d’augmenter le nombre de sièges de l’actuel Parlement somalien à 550, avec 200 nouveaux membres venant de l’opposition, alors que 75 sièges seront distribués entre les membres de la société civile somalienne, la diaspora et les femmes somaliennes.

Le nouveau Parlement élargi devrait élire une "nouvelle direction" pour le pays au début de l’année prochaine.

En novembre, le Premier ministre a nommé un cabinet sur proposition du Parlement, soutenu par l’IGAD, mais le président somalien ne l’a pas accepté.

Cependant, le gouvernement éthiopien a annoncé qu’il avait "irrévocablement" décidé de retirer ses forces de Somalie à la fin de l’année conformément à l’accord de Djibouti conclu entre les deux parties.

Le 14 décembre, le président somalien a suscité la surprise en annonçant qu’il avait limogé le Premier ministre Hussein, l’accusant d’incompétence, de corruption et de trahison", mais le lendemain, le Parlement a déclaré illégale la démarche du président et a soutenu le Premier ministre et son cabinet nouvellement nommé par une majorité écrasante.

Le lendemain, le président somalien a nommé l’ancien ministre de l’Intérieur, Mohamed Mohamoud Guled "Gamadhere", au poste de nouveau Premier ministre. Les parlementaires somaliens ont toutefois déposé une motion accusant le président de mettre en péril le processus de paix, alors que le Kenya a annoncé qu’il envisageait d’imposer des sanctions à M. Yusuf pour la même raison.

Les ministres des Affaires étrangères de l’IGAD ont condamné la décision de M. Yusuf de limoger M. Hussein et de nommer un nouveau Premier ministre à sa place. Dans le communiqué publié à l’issue de la réunion, les ministres de l’IGAD ont décidé d’imposer des sanctions à M. Yusuf et ses collaborateurs.

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