Sur les labels RSE, il est temps de passer à l’échelle supérieure
Que ce soit sur le volet environnemental ou social, la clé de la réussite de la certification des entreprises sur le continent réside dans la capacité à conjuguer exigences internationales et locales, assure le spécialiste Thierry Téné.
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Thierry Téné
Associé et directeur du cabinet Afrique RSE, cofondateur du label Doing Good in Africa (DGIA).
Publié le 25 juin 2023 Lecture : 3 minutes.
Dans le domaine RSE, la lente montée en régime des entreprises africaines
Verdissement des stratégies commerciales, mise en valeur des ressources humaines et des formations, développement des certifications… Les actions concernant la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) progressent sur le continent, mais la route est encore longue.
Dans un contexte africain où il y a peu de lois sur la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et où lorsque celles-ci existent les décrets d’application sont encore attente, la labellisation RSE reste à date l’instrument préféré des entreprises.
Plusieurs initiatives ont ainsi vu le jour sur le continent. L’une des plus anciennes est le label de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), mis en place après l’adoption d’une charte RSE par l’organisation patronale 2006. Plus d’une centaine d’entreprises l’ont obtenu aujourd’hui.
Initiative de l’Ohada
La Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (Conect), créée en 2011, propose le même outil, quand le Conseil national du patronat du Sénégal (CNP) a lancé le sien l’an dernier. Sans oublier l’initiative de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada) qui doit permettre à ses 17 pays membres de déployer le label RSE le plus important du continent.
Ce mouvement s’accompagne de l’implantation progressive de certifications portées par des structures privées, dont les entités françaises Lucie (Lucie 26 000) et Afnor (Engagée RSE) et l’organisation américaine B-Corp. À travers le label que nous développons, Doing Good in Africa (DGIA), nous entendons accompagner, à travers une plateforme digitale, les entreprises dans l’amélioration continue de leur démarche de durabilité au-delà de la simple labellisation.
Quel que soit le label choisi, la réussite de son déploiement dépend de son fort ancrage local en même temps que de son alignement sur les outils internationaux de la RSE et du développement durable. L’un des enjeux clés réside dans l’élaboration une solution de labellisation adaptée aux différentes catégories d’entreprises, et plus particulièrement aux PME, cela avec des coûts raisonnables.
Rôle des marchés publics
Ainsi, le label de la CGEM s’aligne sur la norme internationale ISO 26 000 sur la responsabilité sociétale des organisations tout en s’appuyant sur la charte locale RSE du patronat. De même, le Doing Good in Africa s’articule autour des exigences de la norme ISO 26 000 tout en suivant un processus graduel de mise en œuvre en trois temps (initiation, maîtrise et excellence) adapté au tissu économique local, qui compte TPE/PME mais aussi filiales de multinationales et de grands groupes africains.
Au niveau national, les États devraient valoriser les entreprises labelisées ou certifiées RSE dans le cadre des marchés publics en octroyant à celles-ci un bonus lors de l’évaluation des offres. Avec le levier des achats publics, les exécutifs, collectivités territoriales et entreprises publiques encourageraient ainsi l’essor des sociétés ayant les meilleurs indicateurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).
Si aucun pays africain ne semble encore engagé dans cette dynamique, il existe des exemples qui pourraient inspirer le continent. La France a adopté un Plan national pour les achats durables, qui fixe deux objectifs d’ici à 2025 : que tous les contrats de la commande publique lancés durant l’année comprennent au moins une considération environnementale, et que 30 % d’entre eux comportent au moins un critère social.
Éviter le dumping social
La labellisation ayant un caractère volontaire, il est difficile de voir les différentes initiatives existantes se déployer à grande échelle. Pour franchir ce palier, il faudrait envisager une certification RSE qui serait une condition obligatoire pour entrer dans la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Cela permettrait d’encourager l’engagement des sociétés autant que la circulation de produits et services respectant un socle commun en matière de durabilité.
Pour mettre une telle mesure en œuvre, la première chose à faire consisterait à définir les produits prioritaires concernés, avant, dans un second temps, d’identifier les indicateurs et critères de durabilité. Avec un enjeu principal : éviter au sein de la zone un dumping social et écologique selon lequel des produits fabriqués selon des minimas sociaux et environnementaux et vendus peu chers concurrenceraient des produits plus chers car réalisés en respectant des standards plus exigeants.
En attendant l’émergence d’une démarche au niveau continental, les entreprises africaines sont déjà soumises aux critères de durabilité dans le cadre de leurs relations commerciales avec les filiales françaises – et bientôt européennes – de groupes avec lesquels elles travaillent. En effet, le devoir de vigilance, initié en 2017 par la loi française, est en cours de ratification par le Parlement européen. Cette législation imposera aux entités européennes d’identifier au sein de leur sphère d’influence les activités à risque concernant les droits humains, l’environnement et la bonne gouvernance, puis de mettre en place une réponse, publique, incluant l’ensemble des parties prenantes. De quoi faire bouger les lignes.
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Dans le domaine RSE, la lente montée en régime des entreprises africaines
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