L’UE lève les sanctions contre Kalev Mutond et Emmanuel Ramazani Shadary
Ces deux Congolais proches de Joseph Kabila ont été retirés de la liste des personnalités visées par des mesures restrictives de Bruxelles.
Un an après avoir levé les sanctions contre Ferdinand Ilunga Luyoyo, ancien général de la police congolaise visé pour son rôle dans la répression qui a précédé les élections de 2018, l’Union européenne (UE) a annoncé, le 19 juin, qu’elle retirait Kalev Mutond et Emmanuel Ramazani Shadary de sa liste.
Sous sanctions depuis 2017
Ces deux incontournables de l’ère Kabila faisaient l’objet de mesures de restriction depuis le 29 mai 2017. L’UE leur reprochait alors de « faire obstacle » au processus électoral et de « contribuer […] à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ». Respectivement patron de l’Agence nationale de renseignement (ANR) et ministre de l’Intérieur à l’époque des faits, ils avaient alors rejoint la liste des sécurocrates déjà épinglés par Bruxelles en décembre 2016.
Chaque année depuis, les deux hommes ont déposé des recours pour tenter de mettre un terme à ces mesures, qui incluent « une interdiction de pénétrer sur le territoire de l’UE » et « un gel des avoirs », mais essuyaient systématiquement un refus de Bruxelles.
Le revirement de l’UE n’est toutefois pas surprenant. La Cour de justice de l’UE avait, le 8 mars dernier, rendu un arrêt ouvrant la voie à une levée des sanctions : « Le Conseil de l’UE n’a pas été en mesure d’établir le bien-fondé du maintien des mesures restrictives en cause à [leur] égard », pouvait-on lire dans ses conclusions.
« Faits trop anciens »
Les faits reprochés à Emmanuel Ramazani étaient « devenus trop anciens pour justifier, à eux seuls, le maintien [de ces sanctions] ». Remplacé à la tête de l’ANR en 2019, « Kalev » était pour sa part devenu conseiller du Premier ministre de l’époque, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, jusqu’à la chute de ce dernier, en janvier 2021.
Mis en cause quelques mois plus tard pour des faits de « tortures physiques et morales, arrestations arbitraires, détention illégale, menaces de mort, et tentative d’assassinat », et visé par une plainte de l’ex-bâtonnier de Lubumbashi, Jean-Claude Muyambo, Kalev Mutond avait pris la route de l’exil, avant de rentrer dans la plus grande discrétion au début d’août 2022. Le Conseil de l’UE a échoué à démontrer qu’il « exerce toujours une influence sur certaines fractions des forces de sécurité », selon le jugement rendu par la cour de justice de l’UE, le 8 mars.
Nouveaux critères
Consciente de la difficulté croissante à justifier un maintien des mesures restrictives prises en 2016 et en 2017, Bruxelles tente depuis plus d’un an de modifier son système de sanctions, raison pour laquelle elle a intégré de nouveaux critères en 2022. Elle s’autorise désormais à cibler des personnalités jouant un rôle dans les violences dans l’Est. En décembre dernier, elle a ainsi inscrit plusieurs nouveaux noms sur sa liste, dont ceux de l’homme d’affaires belge Alain Goetz, du porte-parole militaire du M23, Willy Ngoma, ou encore de l’ex-ministre Justin Bitakwira.
Plusieurs personnalités sanctionnées en 2016 et 2017 le sont néanmoins toujours. C’est le cas de l’actuel inspecteur général des Forces armées de la république démocratique du Congo, Gabriel Amisi Kumba (alias Tango Four), de l’ancien patron de la Garde républicaine, Gaston Hugues Ilunga Kampete, ou encore de l’ex-ministre Évariste Boshab, qui a depuis rallié le président actuel, Félix Tshisekedi.
Dans son communiqué du 19 juin, l’UE se dit prête à inscrire « toute personne qui fait obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC, qui est impliquée dans de graves violations des droits de l’homme ou dans des atteintes graves à ces droits, ainsi que les personnes responsables d’entretenir le conflit armé, l’instabilité et l’insécurité ou d’inciter à la violence ».
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