Au Liban, « mission (presque) impossible » pour Jean-Yves Le Drian
Pour son premier déplacement, l’envoyé personnel d’Emmanuel Macron a rencontré les principaux dirigeants. Le pays est géré par un gouvernement démissionnaire et n’a toujours pas de président.
« À Beyrouth, Le Drian face à une mission (presque) impossible », titre le quotidien indépendant L’Orient-Le Jour. « Pas de grands espoirs fondés sur la visite de Le Drian », écrit pour sa part le quotidien Al-Akhbar, proche du Hezbollah.
Le décor est planté de la visite de l’envoyé spécial du président français Emmanuel Macron pour le Liban, Jean-Yves Le Drian, qui depuis le 21 juin, rencontre les principaux dirigeants libanais pour tenter de les convaincre de surmonter leurs divergences et ouvrir la voie à l’élection d’un chef de l’État.
En plein effondrement économique, le Liban est sans président depuis près de huit mois et dirigé par un gouvernement démissionnaire aux pouvoirs réduits.
« C’est une mission de concertation, une mission d’écoute (…) pour faire en sorte que ce pays sorte de l’impasse politique », a déclaré l’émissaire français. Il a assuré qu’il venait « mener des consultations nécessaires avec tous les acteurs pour sortir immédiatement du blocage politique ».
Depuis la fin le 31 octobre du mandant de Michel Aoun, le puissant Hezbollah pro-iranien et ses adversaires tentent chacun d’imposer un candidat à sa succession. Mais aucun des deux camps ne dispose d’une claire majorité au Parlement, qui s’est déjà réuni à douze reprises sans parvenir à élire un chef de l’État.
« Je ne viens porteur d’aucune option. Je veux écouter tout le monde », a assuré Le Drian, martelant que « la solution vient d’abord des Libanais ».
Le Hezbollah incontournable
L’émissaire français a rencontré le Premier ministre Najib Mikati avant de se rendre auprès du patriarche maronite Béchara Raï, chef spirituel de la communauté chrétienne la plus influente, dont doit être issu le président de la République conformément au partage communautaire du pouvoir.
Dès son arrivée le 21 juin, Jean-Yves Le Drian s’est entretenu avec le président du Parlement Nabih Berri, allié du Hezbollah et figure incontournable de la vie politique libanaise. « Le plus important est de commencer un processus de négociation », estime l’analyste Michael Young, du centre Carnegie pour le Moyen-Orient, selon lequel « la mission de Le Drian pourrait être de mettre en marche un mécanisme » pour une négociation.
Depuis 2020, la France, ancienne puissance mandataire, s’est impliquée sans succès dans la recherche d’une solution au Liban. « Ce n’est pas Le Drian qui va changer un système politique sclérosé, des politiques corrompus qui ne voient que leurs intérêts propres », estime une source familière du dossier à Paris. Il n’y a pas de solution possible « tant qu’il n’y a pas de pression sur le Hezbollah ».
« Suicide collectif »
L’ancien ministre français des Affaires étrangères n’a pas mâché ses mots à l’adresse de la classe politique libanaise, restée solidement en place malgré un soulèvement populaire à l’automne 2019 qui n’avait pas abouti. Lors d’une visite en mai 2021 au Liban, il avait accusé les responsables politiques d’organiser un « suicide collectif ». Quelques mois plus tôt, il avait comparé le Liban au naufrage du « Titanic, sans l’orchestre ».
Le Liban a été au centre des discussions le 15 juin à l’Élysée entre Emmanuel Macron et le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, qui on appelé « à mettre rapidement un terme à la vacance politique ».
Pour Michael Young, la solution doit se jouer notamment au niveau des pays de la région. Elle pourrait porter sur une proposition qui comprendrait non seulement l’élection d’un président, mais aussi la nomination « d’un Premier ministre, d’un gouverneur de la Banque centrale et d’un commandant en chef de l’armée ».
(avec AFP)
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