Les éleveurs aux prises avec le changement climatique
En Afrique, en 2020, pas moins de 250 millions de personnes n’auront peut-être pas suffisamment d’eau pour couvrir leurs besoins essentiels en raison du changement climatique, a déclaré un spécialiste de la pauvreté, de l’environnement et du changement climatique.
« Les conséquences quotidiennes du changement climatique, notamment les températures plus élevées et les précipitations erratiques, rendent beaucoup de gens plus vulnérables aux risques climatiques », a déclaré Charles Ehrhart, coordinateur du réseau de CARE International sur la pauvreté, l’environnement et le changement climatique, à l’attention des décideurs et des représentants des éleveurs de la Corne de l’Afrique, d’Afrique centrale et d’Afrique orientale rassemblés à l’occasion d’une réunion consultative sur les moyens d’atténuer les effets humanitaires du changement climatique dans les régions pastorales.
Cette réunion de deux jours s’inscrivait dans le cadre d’une série de rencontres organisées par le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et l’Union africaine (UA) et visant à définir un cadre de politiques applicable à l’ensemble du continent, pour garantir et protéger les vies, les moyens de subsistance et les droits des éleveurs d’Afrique.
D’ici à 2020, selon M. Ehrhart, les changements climatiques auront contribué au stress hydrique, à la détérioration des terres, à la diminution du rendement des cultures et à l’accroissement du risque d’incendies de forêt, ce qui provoquera une diminution de 50 pour cent de la productivité agricole. Cela se traduira, a-t-il ajouté, par des pénuries graves de vivres et d’eau, et les populations touchées subiront de fortes pressions qui les inciteront à migrer.
« Ce sont les sécheresses prolongées qui incitent le plus les familles à partir, et en particulier à quitter les régions rurales pour s’installer en milieu urbain », a-t-il expliqué.
« Rien que dans la Corne de l’Afrique, plus de 20 millions d’éleveurs ont actuellement un mode de vie centré sur la quête de pâturages et d’eau qui se font de plus en plus rares ».
Selon M. Ehrhart, au cours des 20 à 30 prochaines années, les régions déjà touchées par les risques climatiques verront augmenter la fréquence et/ou l’intensité de ces événements. En outre, les régions déjà frappées par la sécheresse et les crues gagneront en superficie. Si les risques climatiques s’aggraveront, la capacité décroissante des populations à faire face à ces événements sera sans doute encore plus problématique.
« Avec les changements climatiques, nous devrons nous préparer à davantage de catastrophes, qui se déclareront rapidement ou lentement », a-t-il expliqué.
« Une aide humanitaire sera particulièrement nécessaire dans les régions déjà qualifiées de zones à risque. Avec le changement climatique, il est impératif d’augmenter les investissements dans la préparation et les interventions en cas de catastrophes, et d’améliorer la qualité et la responsabilité dans ces domaines ».
Lors de la réunion consultative, les représentants des éleveurs d’Ethiopie, du Kenya, de Tanzanie, du Sud-Soudan et d’Ouganda ont donné des présentations sur les mécanismes de survie et d’adaptation que pourraient utiliser les éleveurs pour faire face aux conséquences du changement climatique.
Ils ont invoqué la mauvaise gouvernance, la marginalisation, le manque d’accès (ou l’accès insuffisant) à l’éducation, et l’insécurité, entre autres obstacles aux efforts déployés par les éleveurs en vue de s’adapter et de faire face à l’évolution du climat.
Moses Ndiyaine, éleveur en Tanzanie, a suggéré la création d’un fonds mondial spécialement consacré aux éleveurs, pour les aider à concevoir des systèmes d’alerte précoce, à améliorer les services vétérinaires et à faire pression auprès de leurs gouvernements pour assurer l’adoption de législations qui leur soient adaptées.
Stratégies de survie
Selon Jeanine Cooper, directrice du bureau d’OCHA-Kenya, il faut traiter d’urgence les facteurs chroniques à l’origine de l’insécurité alimentaire dans les régions agricoles marginales, pour permettre aux populations vulnérables de se forger une résistance en soutenant les stratégies de survie et d’adaptation.
Les précipitations, insuffisantes et erratiques, la production de maïs réduite par les violences post-électorales du début de l’année 2008, et les prix élevés des intrants agricoles et des carburants ont précipité la crise alimentaire au Kenya.
« Le changement climatique va progressivement aggraver les risques et les vulnérabilités, mettant ainsi à rude épreuve des stratégies de survie qui fonctionnent déjà aux limites de leurs possibilités, et grossissant par là même les inégalités », a déclaré Mme Cooper.
Soutenus par l’Agence suisse pour le développement et la coopération, OCHA et l’UA espèrent obtenir, au cours de l’année à venir, un ensemble de résultats centrés sur le plaidoyer en faveur d’une amélioration de la réduction des risques de catastrophes et de la gestion du changement climatique sur le continent, pour aboutir finalement à l’élaboration d’une politique sur le pastoralisme, qui soit commune à l’ensemble du continent.
Un autre atelier a été prévu pour la mi-2009, qui portera sur les moyens de renforcer la résistance des éleveurs et leur capacité d’adaptation face à un climat en pleine évolution.
« Il faut se faire une idée claire du besoin humanitaire que le changement climatique engendre et engendrera dans les régions pastorales d’Afrique », a indiqué Besida Tonwe, directrice du bureau régional d’OCHA pour l’Afrique orientale et centrale.
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