Afghanistan: Charcutées au nom de l’honneur
Maryam, 14 ans, a été violée par un homme à Yakawlang, une région de la province de Bamyan, dans le centre de l’Afghanistan, il y a cinq mois. Sa mère et son frère lui ont ouvert le ventre au rasoir, en ont retiré le fœtus qu’elle portait, et l’ont enterré vivant pour dissimuler leur déshonneur, selon Habiba Surabi, gouverneur de Bamyan.
Au début, Maryam n’avait parlé à personne du viol, craignant que cela n’accable sa famille et ne lui coûte peut-être la vie. Mais cinq mois plus tard, lorsqu’il est devenu apparent qu’elle attendait un bébé, sa famille a décidé de « remédier » au problème.
« Le bébé était vivant lorsqu’ils l’ont retiré de mon ventre… et ils l’ont enterré alors qu’il pleurait », a confié Maryam, dont les propos étaient rapportés ainsi dans les médias locaux.
« L’intervention » a été pratiquée violemment, imprudemment et sans aucune précaution médicale. « Elle a été charcutée, comme un animal », a déclaré un médecin de l’hôpital Yakawlang, où la victime se trouvait en soins intensifs.
Après cette « intervention » douloureuse qui a duré près d’une heure, l’abdomen de Maryam a été recousu avec une aiguille et du fil de couture ordinaire, ont rapporté les experts médicaux. Mais les plaies de la jeune fille s’étant infectées, son état s’est rapidement aggravé. Elle a été emmenée à l’hôpital cinq jours plus tard, à moitié morte, selon des témoins.
« Ils [ses parents] ont dit qu’elle avait été mordue au ventre par un chien il y a quelques jours », a rapporté à IRIN Ehsan Shaheer, directeur des autorités sanitaires de Bamyan, depuis Bamyan, le 8 janvier.
Un rapide coup d’œil à son corps défiguré a néanmoins suffi pour convaincre les médecins que ces mutilations n’étaient pas le fait d’une morsure de chien. « Nous avons alerté la police et les autorités, et maintenant, sa mère et son frère sont en détention », a indiqué M. Shaheer.
Le violeur présumé a été arrêté, selon les habitants de la région. Quant à Maryam, elle a eu la vie sauve mais pour se rétablir complètement, elle aura besoin de traitements et de soins importants, qui ne sont pas administrés dans la province de Bamyan, a indiqué M. Shaheer.
« Des crimes monstrueux »
La Commission indépendante des droits de l’homme d’Afghanistan (CIDHA) a confirmé la tragédie de Maryam en déclarant avoir recensé plus de 2 000 cas de violence contre les femmes au cours des 10 derniers mois – une augmentation marquée par rapport aux précédentes années.
« Nous sommes particulièrement inquiets de voir que la nature et les caractéristiques de la violence envers les femmes s’aggravent », a déclaré à IRIN Soraya Rahim Subhrang, commissaire chargée du droit des femmes à la CIDHA, ajoutant que les femmes et les filles étaient souvent victimes de « crimes monstrueux ».
Une culture générale de l’impunité et le manque de soutien aux victimes de violence sexiste n’ont fait qu’aggraver d’autant plus la situation, a expliqué Mme Subhrang, ajoutant : « la culture de la violence s’est développée car la loi ne fait pas peur ».
La CIDHA a appelé le gouvernement à exercer une justice « transparente et impartiale » face au violeur de Maryam, ainsi qu’à la mère et au frère de la jeune fille.
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus
- Au Mali, le Premier ministre Choguel Maïga limogé après ses propos critiques contr...
- CAF : entre Patrice Motsepe et New World TV, un bras de fer à plusieurs millions d...
- Lutte antiterroriste en Côte d’Ivoire : avec qui Alassane Ouattara a-t-il passé de...
- Au Nigeria, la famille du tycoon Mohammed Indimi se déchire pour quelques centaine...
- Sexe, pouvoir et vidéos : de quoi l’affaire Baltasar est-elle le nom ?