Au Cameroun anglophone, exécutions, tortures et viols « récurrents » dans les deux camps

L’ONG Amnesty International dénonce des « atrocités » relevant de « graves violations des droits humains » pratiquées par le camp indépendantiste et par l’armée camerounaise, en conflit depuis plus de six ans dans l’ouest du pays.

L’armée et la police, elles, sont régulièrement accusées par l’ONU et les ONG d’attaquer et de dévaster des villages (ici Buea, dans la région du Sud-Ouest, en 2018). © MARCO LONGARI / AFP.

Publié le 4 juillet 2023 Lecture : 2 minutes.

Les civils dans les régions administratives du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun, peuplées principalement par la minorité anglophone camerounaise, sont régulièrement victimes d’« atrocités », dont des exécutions, torture et viols, commises par les forces de l’ordre et les séparatistes armés, s’est alarmée ce 4 juillet Amnesty International.

À la fin de 2016, le régime du président Paul Biya avait commencé à réprimer violemment des manifestations pacifiques d’anglophones s’estimant ostracisés et marginalisés par le pouvoir central dominé par la majorité francophone. Puis de nombreux groupes armés indépendantistes anglophones avaient pris les armes et proclamé en 2017 l’« indépendance » d’une région qu’ils appellent l’« Ambazonie ». Et Paul Biya y dépêche massivement des troupes depuis.

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Dans un nouveau rapport intitulé : « Avec ou contre nous. La population prise en étau entre l’armée, les séparatistes armés et les milices dans la région anglophone du Nord-Ouest », Amnesty répertorie des « exécutions extrajudiciaires », des « homicides » de civils dont des femmes et des enfants, des « tortures », des « viols et autres violences sexuelles » perpétrés par les deux camps. Des « atrocités récurrentes » relevant de « graves violations des droits humains ».

Le rapport d’Amnesty se base sur les témoignages de « plus de cent victimes » et de responsables d’ONG locales et journalistes.

Kidnappings quasi-quotidiens

Parmi les cibles des séparatistes, qui pratiquent également quasi-quotidiennement les kidnappings contre rançon, figurent des civils qu’ils accusent de « collaborer » avec Yaoundé, et particulièrement de l’ethnie peule des Mbororos.

L’armée et la police, elles, sont régulièrement accusées par l’ONU et les ONG d’attaquer et de dévaster des villages dont les habitants sont soupçonnés de sympathie avec les séparatistes, et d’y commettre bavures et crimes. Amnesty accuse aussi des « milices mbororos » d’épauler les militaires dans ces attaques.

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Amnesty accuse également de « violation des droits humains » les « autorités politiques et judiciaires », notamment en faisant emprisonner « arbitrairement » des civils, des journalistes, des responsables de la société civile, et en les faisant juger par des tribunaux militaires pour des faits liés à du « terrorisme ».

Absence de réaction des partenaires internationaux

L’ONG s’inquiète également du fait que « les partenaires internationaux du Cameroun, notamment la Belgique, la Croatie, les États-Unis, la France, Israël, le Royaume-Uni, la Russie et la Serbie ont continué de coopérer avec le pays sur le plan militaire, y compris en fournissant des armes et du matériel militaire » qui « risquent » d’être « utilisés par les forces armées, les milices ou les séparatistes armés pour commettre des exactions ».

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Amnesty demande à ces « partenaires internationaux » de « condamner ces atteintes aux droits fondamentaux » commises par les deux camps, et au gouvernement de « diligenter de toute urgence des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales ».

« Les demandes de rendez-vous avec des ministres du gouvernement », sollicités dans le cadre de ce rapport, « sont restées sans réponse », assure Amnesty. Le gouvernement ne réagit jamais auprès de la presse à la publication régulière de rapports des ONG, et le fait généralement plusieurs jours ou semaines après leur publication.

Le conflit a fait plus de 6 000 morts et forcé plus d’un million de personnes à se déplacer, selon le centre de réflexion International Crisis Group (ICG), qui n’a toutefois pas actualisé ce bilan depuis trois ans.

(Avec AFP)

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