Quand la guerre Russie-Ukraine s’exporte au Sénégal : polémique autour du projet Thiès-Sébastopol
Un projet de partenariat entre la ville sénégalaise de Thiès et celle de Sébastopol, en Crimée, ravive les positionnements nationaux sur le conflit ukrainien.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 11 juillet 2023 Lecture : 2 minutes.
Revendiquée par un large nombre de décideurs africains, la neutralité dans le conflit entre l’Ukraine et la Russie est une ligne de crête étroite, y compris dans les enceintes politiques locales. Au pays de la Teranga, l’annonce d’une possible « coopération » entre les villes de Thiès et de Sébastopol suscite la polémique. Tout a commencé par la visite de Dmitry Kurakov, ambassadeur de Russie au Sénégal, dans la « cité du rail » sénégalais, le 4 juillet dernier…
Sébastopol, russe ou occupée ?
À l’issue de cet événement local, dont la dimension politique aurait pu paraître anodine, notamment en dehors de Thiès, le diplomate russe évoque, via Facebook, des « perspectives de coopération entre Thiès et l’une des villes de Russie dans les domaines économique, éducatif, culturel, y compris la possibilité de conclure des accords de partenariat ».
Rapidement, l’ambassade d’Ukraine à Dakar dénonce un « soi-disant jumelage ». Sébastopol était ukrainienne jusqu’à l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, évènement qui préfigura les tensions actuelles. Suite à un référendum unilatéral, la ville de Sébastopol fut présentée comme la troisième ville d’importance fédérale de Russie, au même titre que Moscou et Saint-Pétersbourg.
Après la rencontre entre le maire de Thiès, Babacar Diop, et l’ambassadeur russe, la représentation d’Ukraine à Dakar rappelle, par voie de communiqué, qu’elle considère que « Sébastopol est occupée par les troupes russes ». Elle prend l’édile sénégalais à partie en demandant si celui-ci « profite […] d’une occasion opportuniste […] pour se “jumeler” avec un “grand État terroriste et criminel de guerre” ».
Les ambitions de Babacar Diop
Le 10 juillet, la mairie de Thiès réagit à deux niveaux. Comme pour botter en touche, elle explique, références officielles à l’appui, que la visite du diplomate russe faisait suite à une demande du ministère sénégalais des Affaires étrangères, ceci « dans le cadre de la coopération décentralisée ». Plus offensive, l’institution municipale dénonce des « attaques discourtoises et diffamatoires », de la part de la représentation ukrainienne, et des « insinuations infondées et aux antipodes de la bienséance en matière de la diplomatie internationale ».
En attendant la formalisation ou non d’un jumelage, le bras de fer local sera sans doute noyé dans la suite du pugilat géopolitique international. Il reste à savoir si cette mise en lumière nationale du maire de Thiès servira ses ambitions de leader des Forces démocratiques du Sénégal (FDS – Les Guelwaars). Dès le mois d’avril, tentant de se détacher du peloton de la coalition d’opposition Yewwi Askan Wi, Babacar Diop annonçait sa candidature à la magistrature suprême, comme « candidat des pauvres ».
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