Au Soudan, l’appel au secours des civils pris entre Burhane et Hemetti
Des habitants ont lancé dimanche un appel aux dons de nourriture pour survivre, alors que le pays est ravagé par une guerre sanglante entre les forces des généraux Abdel Fattah al-Burhane et Mohamed Hamdan Dagolo, dit Hemetti.
En raison des combats incessants en particulier dans la capitale Khartoum, des millions d’habitants se retrouvent bloqués chez eux et pour certains privés d’eau, notamment dans la banlieue de Khartoum-Nord. Ils n’ont de l’électricité que par intermittence et presque plus de nourriture, rapportent des habitants.
Pour leur venir en aide, un comité de quartier à Khartoum a lancé dimanche un « appel urgent » à la population : « Il faut qu’on se soutienne les uns les autres, donnez de la nourriture et de l’argent à ceux qui sont autour de nous », a écrit le comité d’al-Danaqla.
Abbas Mohammed Babiker, un habitant de Khartoum-Nord, a raconté que sa famille devait se limiter à un repas par jour. « Et il ne nous reste plus que de quoi tenir deux jours », a-t-il ajouté.
3,3 millions de déplacés
« Avec les combats, il n’y a plus de marché et, de toute façon, nous n’avons plus d’argent », a renchérit un autre habitant, Essam Abbas. Pour tous les fonctionnaires au moins, les salaires n’ont pas été versés depuis mars.
La semaine dernière, le violoniste Khaled Senhouri, figure de la musique à Khartoum, est « mort de faim » à Omdourman, ville qui fait face à la capitale Khartoum, ne pouvant plus sortir de chez lui pour s’approvisionner, ont rapporté plusieurs de ses amis sur Facebook.
Depuis le 15 avril, les raids aériens de l’armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane et les tirs d’artillerie et de drones des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdan Dagolo, dit Hemetti, ont fait 3 900 morts, selon un nouveau bilan de l’ONG Acled, et 3,3 millions de déplacés et de réfugiés.
Avant la guerre, un Soudanais sur trois souffrait déjà de la faim. Aujourd’hui, plus de la moitié des 48 millions de Soudanais ont besoin d’aide humanitaire pour survivre, mais les ONG et l’ONU disent être privées d’accès.
Vers un retrait de MSF ?
Cet appel intervient alors que, vendredi, l’ONG Médecins sans frontières (MSF) a prévenu qu’elle pourrait cesser d’aider un des rares hôpitaux de Khartoum toujours en fonctionnement après trois mois de guerre après l’agression de ses employés par des hommes armés.
Dans un communiqué, l’ONG a précisé que 18 de ses employés ont été « battus et fouettés » et l’un d’eux « détenu et menacé de mort » par leurs agresseurs, à l’hôpital Turc, dans le sud de la capitale soudanaise.
« En l’absence de garanties de sécurité suffisantes, la continuité des activités médicales et la présence de MSF dans cet hôpital sont gravement remises en cause », avertit l’ONG qui dit avoir soigné plus de 1 600 blessés de guerre à Khartoum depuis que la guerre civile a démarré, le 15 avril.
« Nos équipes travaillent 24 heures sur 24 dans des conditions extrêmement difficiles (…) elles ne peuvent pas en plus être exposées à ces agressions et violences à proximité de l’hôpital », souligne l’ONG. Or « la situation sécuritaire s’est gravement détériorée ces dernières semaines. »
L’aéroport d’El-Obeid au coeur des combats
Les combats se sont intensifiés à Khartoum où l’armée de l’air pilonne des zones résidentielles, visant les bases installées depuis plusieurs années par les paramilitaires, lesquels répliquent avec des drones. Vendredi, les raids aériens ont ciblé plusieurs quartiers de la capitale, de même qu’à El-Obeid, à 350 km au sud, selon des habitants. Ce carrefour commercial se trouve sur la route qui relie Khartoum au Darfour – vaste région de l’ouest, fief des FSR, où la guerre est sûrement la plus violente.
L’aéroport d’El-Obeid, le troisième du pays, est convoité par les deux camps, tandis que ses silos de stockage d’aide humanitaire mais aussi de gomme arabique – dont le Soudan est le premier producteur mondial– ont probablement été emportés en grande partie par les pillages.
Les FSR souhaitent s’en emparer pour couper la route aux renforts de l’armée dépêchés de Khartoum vers le Darfour, et sécuriser leur propre route d’approvisionnement vers la capitale.
(Avec AFP)
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