Eduardo Camavinga, des camps de réfugiés au Real Madrid

À 20 ans, Eduardo Camavinga porte les maillots de l’équipe de France et du Real Madrid, le plus grand club du monde. Mais son histoire, racontée dans « Bleu solaire », a débuté dans l’enclave angolaise du Cabinda, où le prodige est né de parents ayant fui la guerre civile en RDC.

Le milieu de terrain français Eduardo Camavinga, devenu titulaire du Real Madrid, le 20 mars 2023. © Franck Fife/AFP

Alexis Billebault

Publié le 11 août 2023 Lecture : 3 minutes.

Quand, le 6 avril 2019, Eduardo Camavinga devient à 16 ans, 4 mois et 27 jours le plus jeune joueur de l’histoire du Stade Rennais à évoluer en Ligue 1, les marques d’intérêt pour cet élégant milieu de terrain gaucher commencent à apparaître. Les mois suivant, il devient plusieurs fois titulaire au sein de l’équipe rennaise, et obtient en novembre de la même année la nationalité française avec toute sa famille, avant d’être appelé dans la foulée chez les Espoirs tricolores (catégorie des moins de 21 ans).

La progression fulgurante de ce jeune prodige, capable d’évoluer défenseur ou milieu de terrain, n’a cessé de se poursuivre, quand Didier Deschamps l’a appelé en équipe de France, en septembre 2020, puis quand le Real Madrid a versé 45 millions d’euros à Rennes un an plus tard pour l’attirer au sein de la Maison blanche.

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Né dans la jungle

Aujourd’hui, Eduardo Camavinga est titulaire au Real, et Deschamps le convoque régulièrement chez les Bleus. Lors de l’été 2021, alors qu’il inaugurait un stade portant son nom à La Chappelle-Janson, une petite commune de Bretagne, il avait rappelé, pendant son discours, qu’il vient « de loin, de très loin… Qui aurait cru que j’aurais autant de chance ? »

Loin, c’est à Miconje, dans un camp de réfugiés de l’enclave du Cabinda, où il est né dans la forêt tropicale, le 10 novembre 2002. Ses parents, Sofia Simao et Celestino Camavinga (un angolo-congolais), ont déjà deux enfants, et ont décidé de fuir la RDC ravagée par une guerre civile ayant fait près de 5 millions de morts entre 1998 et 2003. C’est sur ce pan de l’histoire personnelle de ce jeune joueur, qui n’était pas destiné à devenir l’un des plus talentueux de sa génération, que se concentre Eduardo Camavinga, Bleu solaire (éd. Marabout, 2023), signé Cyril Collot et Luca Caioli.

Ni le stade Santiago-Bernabéu ni le maillot du Real ne semblent trop grands pour lui

Pour essayer d’offrir à leurs trois enfants une vie meilleure, le jeune couple décide de fuir le Cabinda et de gagner la France. Les détails de ce long périple restent flous, mais Eduardo Camavinga et une partie de sa famille arrivent dans le nord de la France en novembre 2004. Une partie seulement, car beaucoup de ses proches sont restés en Afrique, où le joueur s’est promis de revenir un jour, quand son emploi du temps le lui permettra. Il souhaite y rencontrer ses grands-parents dont il ne connaît que le son de la voix, grâce à de fréquentes conversations téléphoniques, apprend-on dans le livre.

Un talent repéré au périscolaire

En France, les premiers mois sont difficiles. Une nuit à dormir dans la rue, des logements provisoires, un autre, a priori plus durable, à Amiens, en Picardie. Rapidement, cette opportunité s’écroule, et les Camavinga, qui ont vu la famille s’agrandir entre-temps, s’installent dans une cité HLM décatie à Fougères, en Bretagne. Une ville qui possède depuis longtemps un centre d’accueil réservé aux demandeurs d’asile. Le père de famille enchaîne les petits boulots, avant de travailler dans des abattoirs de porcs, dans une ville voisine. Le jeune Eduardo, qui commence à faire du judo, est repéré dans la cour de récréation de son école par une animatrice périscolaire, surprise par l’aisance du gamin avec un ballon.

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Elle conseillera plus tard à ses parents de l’inscrire en club. Ce sera au Drapeau de Fougères, un des clubs de la ville. La vie des Camavinga, enfin stabilisée, est pourtant bouleversée en février 2013, quand la nouvelle maison qu’ils occupent est partiellement détruite par un incendie. La famille bénéficie d’un vaste élan de solidarité, et quelques mois plus tard, Eduardo Camavinga intègre le centre de formation du Stade Rennais, un apprentissage qui ne l’empêchera pas d’obtenir son bac ES à 17 ans.

Mais ses études s’arrêteront à ce diplôme. Eduardo Camavinga, qui a participé à la dernière Coupe du monde au Qatar, aura largement le temps d’étoffer un palmarès déjà bien garni puisqu’il a remporté six titres avec le Real depuis son arrivée, dont le championnat d’Espagne, la Ligue des Champions et la Coupe du monde des clubs (en 2022). Il est en effet lié avec le club espagnol jusqu’en 2027. Interviewé par les auteurs du livre, l’Argentin Jorge Valdano, une légende d’un club dont il fût consécutivement joueur, entraineur et directeur sportif, lui a rendu le plus bel hommage qui soit. « Le stade Santiago-Bernabéu ne semble pas trop grand pour lui ni le maillot du Real. »

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Éd. Marabout, 272 pages, 18,90

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