Abdelmadjid Tebboune, le grand timonier panafricain ?
En visite en Chine, le président algérien a comparé son pays à l’empire du Milieu. Non sans susciter quelques réactions plus ou moins ironiques.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 26 juillet 2023 Lecture : 2 minutes.
Pour qui frappe, parmi tant d’autres, à la porte des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), quoi de plus logique que de se comparer à l’un d’eux ? Au dernier jour de sa récente visite en Chine, Abdelmadjid Tebboune déclarait à la chaîne chinoise CCTV : « L’Algérie est pour l’Afrique ce que la Chine est pour le monde. »
Mais comparaison est rarement raison. La population algérienne s’élève à 44,18 millions d’individus, contre 1,412 milliard pour la Chine. L’Algérie couvre une superficie de 2,382 millions de km2 et son PIB atteint 163 milliards de dollars environ, contre 9,597 millions de km2 et 18 100 milliards de dollars de PIB, côté chinois…
Sur le réseau X – anciennement Twitter –, les internautes s’en donnent à cœur joie : « Il aime beaucoup se bercer d’illusions extrêmes, celui-là ! » « C’est pas l’inverse plutôt ? Tout pour réussir : une rente d’hydrocarbures, des infrastructures, une position géographique incroyable, mais en 2023 toujours aucune industrie ou diversification de l’économie. » Ou encore : « L’entrée de l’Algérie dans les Brics a été refusée donc au lieu de faire de grands discours, mieux vaudrait réaliser les actions correctives demandées. »
Comparaison hasardeuse
C’est accompagné d’une dizaine de ministres et de chefs d’entreprise que Tebboune s’est rendu en Chine, du 17 au 21 juillet, pour y parler notamment d’économie et de diplomatie. Accident vasculaire cérébral d’Abdelaziz Bouteflika oblige, c’était le premier séjour d’un chef d’État algérien à Pékin depuis dix-sept ans.
Conscient que son pays n’a ni la dimension ni l’histoire de celui de Mao Zedong, Abdelmadjid Tebboune a orienté sa comparaison hasardeuse selon un angle dynamique : « Nous aussi sommes partis de rien. » Et d’annoncer un approfondissement des relations de l’Algérie avec une Chine qu’il qualifie de « grand pays qui a d’énormes moyens et qui respecte les autres », porté par une « politique dénuée d’arrière-pensée » elle-même mue par le seul souci d’« aider ceux qui le demandent ». Avant de conclure : « Rien ne se fait dans le monde sans la Chine. »
Car l’adhésion de l’Algérie aux Brics ne se fera pas sans la Chine. L’Inde a fait montre d’une certaine réticence à cette idée et si Moscou considère avec bienveillance la candidature d’Alger, des observateurs critiquent la taille du pays, la faiblesse de son tissu industriel, sa dépendance à l’égard des hydrocarbures et le contrôle étatique persistant sur une partie significative de l’économie nationale.
L’initiative du président algérien intervient à moins d’un an et demi d’une présidentielle à laquelle tout porte à croire qu’il sera candidat. En visite en Russie en juin, puis en Chine en juillet, et annoncé en France, Tebboune surfe sur la tendance actuelle d’un non-alignement en filigrane duquel certains Occidentaux lisent tout de même des préférences…
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