Mamadou Dia, un monument de l’histoire politique du Sénégal

APA-Dakar (Sénégal) L’ancien président du Conseil du Sénégal (équivalent de Premier ministre), Mamadou Dia, décédé dimanche 24 janvier à Dakar à l’âge de 98 ans, était l’un des hommes politiques qui ont le plus marqué l’histoire du Sénégal.

Publié le 25 janvier 2009 Lecture : 3 minutes.

Instituteur sorti de la célèbre Ecole Normale William Ponty (Ecole normale fédérale de l’Afrique occidentale française), Mamadou Dia est entré très tôt en politique en se faisant élire, dès 1946, au poste de conseiller général. Il sera para la suite successivement élu grand conseiller de l’Afrique occidentale française (AOF) en 1948, et sénateur (1949-1955), avant de devenir, en 1956, député à l’Assemblée nationale française, en même temps que son ami, Léopold Sédar Senghor. Avec Senghor, il crée en 1948 le Bloc Populaire Sénégalais (BPS) puis, en janvier 1957, le Parti de la Convention africaine (PCA) qui militait pour un Etat fédéral en Afrique, une idée remise au goût du jour par l’Union africaine lors de ses derniers sommets. Il est président du Conseil des ministres en 1960, aux premières heures de l’indépendance du Sénégal, ce qui lui donne le pouvoir d’établir les tous premiers plans de développement économique du Sénégal. A côté de Dia, chef du gouvernement et chargé des questions économiques, Léopold Sédar Senghor était président de la République, en charge de la politique extérieure. Ce bicéphalisme instauré à la tête du jeune Etat sénégalais vivant sous le régime parlementaire ne tarde pas à être source de problèmes. Les relations entre les deux hommes deviennent heurtées, culminant avec une accusation de tentative de coup d’Etat porté contre lui en décembre 1962. Pour sa défense, Dia avait affirmé à l’époque : « On ne fait pas un coup d’Etat quand on détient le pouvoir ». Pour ce délit qui lui est reproché, il fut attrait devant la Haute Cour de Justice, condamné à perpétuité et emprisonné à Kédougou (dans le sud-est du Sénégal) avant d’être libéré en 1974 (par grâce présidentielle), soit douze années de détention durant lesquelles il refusa de demander la grâce présidentielle comme on l’y invitait. La Constitution fut révisée à la lumière de ces événements, pour asseoir un présidentialisme fort. A sa sortie de prison, il se lance à nouveau dans la politique en s’opposant à Senghor, puis à Abdou Diouf contre qui il se présente à l’élection présidentielle de 1983 sous la bannière du Mouvement démocratique populaire (MDP). Il accepta de fusionner par la suite son parti avec la Ligue communiste des travailleurs (Lct) pour mettre sur pied le Mouvement pour le socialisme et l’unité (Msu), un parti membre du Front Siggil Senegaal, qui réunit aujourd’hui les partis de l’opposition dite significative. Après avoir soutenu, en 1988 et en 1993, la candidature de Landing Savané à l’élection présidentielle, il fera partie, en 2000, des leaders de l’opposition à avoir soutenu Me Abdoulaye Wade, élu à la magistrature suprême. L’idée de la révision de son procès avait été agitée par le président Abdoulaye Wade (qui faisait partie de ses avocats en 1963) à son arrivée au pouvoir, avant de l’abandonner à cause notamment de l’opposition de M. Dia lui-même, qui ne partageait pas sa façon de conduire le pays. D’où sa brouille avec le président Abdoulaye Wade. Chantre du socialisme autogestionnaire, le président Mamadou Dia a mené le combat jusqu’au dernier souffle. Affaibli par le poids de l’âge, il prenait régulièrement position, à travers des sorties épistolaires dans la presse sénégalaise, sur des questions d’intérêt national, continental et international. Réputé pour sa rigueur, son patriotisme, son engagement et sa piété, Mamadou Dia laisse un héritage politique incommensurable aux nouvelles générations.

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