Alger dit « non » à une intervention militaire au Niger

Après avoir condamné le putsch contre le président Mohamed Bazoum, l’Algérie réitère son soutien à ce dernier tout en mettant en garde contre une opération de force pour déloger les putschistes.

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune, à Alger, le 27 août 2022. © Ludovic MARIN/AFP

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Publié le 3 août 2023 Lecture : 3 minutes.

L’Algérie suit la situation au Niger comme on surveille le lait sur le feu. Mardi 1er août, elle a mis en garde contre une intervention étrangère au Niger, alors que l’ultimatum lancé par la Cedeao expire dimanche 6 août. Le ministère algérien des Affaires étrangères affirme dans un communiqué « le profond attachement » de l’Algérie « au retour à l’ordre constitutionnel au Niger et au respect des exigences de l’État de droit. »

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Surcroît d’insécurité et d’adversité

Le mercredi 26 juillet, quelques heures après l’annonce du putsch contre Mohamed Bazoum, le gouvernement algérien avait déjà condamné le coup de force et exigeait qu’il soit mis fin instamment « à cette atteinte inacceptable à l’ordre constitutionnel et à cette violation grave des exigences de l’État de droit ». Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a chargé son chef de la diplomatie, Ahmed Attaf, de s’entretenir avec son homologue nigérien Hassoumi Massaoudou.

En renouvelant son soutien à Mohamed Bazoum en tant que « président légitime », le gouvernement algérien précise que « le retour à l’ordre constitutionnel doit impérativement s’accomplir par des moyens pacifiques qui éviteront au Niger frère et à l’ensemble de la région un surcroît d’insécurité et d’instabilité et à nos peuples un surcroît d’adversité et d’épreuves. »

Situation hautement explosive

La perspective d’une intervention militaire au Niger, pour obliger les putschistes à rétablir Mohamed Bazoum dans ses fonctions, inquiète Alger. « L’Algérie met en garde et appelle à la prudence et à la retenue face aux intentions d’interventions militaires étrangères qui sont, malheureusement, considérées comme des options envisageables et utilisables alors qu’elles ne sont que des facteurs de complication et d’aggravation de la crise actuelle », ajoute le communiqué du ministère des Affaires étrangères.

Un coup d’État au Niger et, de là, une situation hautement explosive, c’est la dernière chose que les autorités algériennes souhaitent dans cette région du Sahel. Avec le chaos en Libye et le Mali déstabilisé depuis le coup d’État contre président Ibrahim Boubacar Keïta en août 2020, voilà qu’un autre voisin plonge dans l’insécurité et l’instabilité. Un voisin avec lequel l’Algérie partage 951 kilomètres de frontières.

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Jihadisme, trafic, immigration clandestine…

Cette nouvelle situation à Niamey mettrait en effet l’armée algérienne et les services de sécurité sous de nouvelles pressions, alors qu’ils ont déjà fort à faire avec les groupes jihadistes et les contrebandiers qui sévissent dans ces vastes étendues désertiques, mais aussi avec les réseaux d’immigration clandestine.

Selon l’ONG Alarm Phone Sahara, l’Algérie a renvoyé plus de 11 000 personnes vers le Niger entre janvier et avril 2023. Ces expulsions se font sur la base d’un accord de coopération sécuritaire signé en octobre 2021, considéré comme stratégique pour les deux pays voisins – il prévoit une coopération dans la lutte contre le terrorisme, la criminalité transfrontalière et le banditisme organisé.

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Dans la foulée, un mémorandum de jumelage entre les écoles de police de Tamanrasset et de Niamey a été conclu pour former des agents et cadres de la police nigérienne, le patron de la sureté nationale, Farid Bencheikh, soulignant alors que la police algérienne s’engageait à fournir un appui à son homologue au Niger en matière de formation de base et spécialisée et l’appui logistique.

Quid du gazoduc transsaharien ?

Cet accord sécuritaire intervenait après la visite, en juillet 2021, à Alger, du président Mohamed Bazoum, qui s’est longuement entretenu avec son homologue algérien. À l’occasion de ce séjour du président nigérien, les deux parties ont convenu d’accélérer le projet du gazoduc Nigeria-Niger-Algérie (Nigal) ou « Transsaharien », qui ambitionne également d’approvisionner l’Europe via le Sahel. Un projet de 13 milliards de dollars, porté par l’Algérie, qui court sur 4 100 kilomètres et pourrait acheminer jusqu’à 30 milliards de mètres cubes de gaz par an.

Ce coup d’État au Niger et ses conséquences régionales pourraient donc compromettre ce projet et, également, menacer les activités du groupe pétrolier algérien Sonatrach au Niger, où il possède plusieurs permis d’exploration, notamment le bloc Kafra, près de la frontière avec l’Algérie.

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