Au Niger, fake news et armes de désinformation massive

En attendant une éventuelle confrontation militaire, la guerre de communication à propos du putsch du général Tiani bat son plein sur les réseaux sociaux. Son but : décrédibiliser la junte, ou la défendre.

© Depuis le coup d’État au Niger, les réseaux sociaux véhiculent une grande quantité d’informations fausses et de propagande.

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Publié le 12 août 2023 Lecture : 2 minutes.

Dans la guerre de communication qu’impliquent les conflits contemporains, opacité, propagande et irrationalité sont les trois mamelles d’une narration orientée. La crise nigérienne « sous-régionalisée » n’échappe pas à la règle. Les trolls de tout poil s’en donnent à cœur joie, notamment sur TikTok et X (anciennement Twitter). Les contenus sont sophistiqués ou simplissimes, la technique la plus triviale consistant à couper le son d’une vidéo ou à changer la date d’un post. Inutile d’élaborer un fake en convoquant des talents de pots-synchronisation ou de manipulation numérique.

Tantôt les manœuvres essaient de diaboliser les putschistes nigériens, tantôt elles visent à leur dresser des lauriers — avec des effets parfois inverses…

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Ces derniers jours, au moment où le traitement réservé au président Bazoum faisait l’objet de spéculations inquiètes ou d’injonctions menaçantes, la diffusion d’une vidéo virale d’une trentaine de secondes semblait démontrer la magnanimité de la junte du général Tchiani à l’égard du chef de l’État renversé. Sur les images en question, le successeur de Mahamadou Issoufou déambule en effet à l’air libre avec un niveau de décontraction qui a permis à certains internautes de présumer une libération du président déchu. Vérification faite, la première diffusion de cette captation date du mois d’avril…

Faux mercenaires et avion soudanais

Sans incriminer tel ou tel responsable politique, il est clair que les anti-pustchs usent tout autant de ce genre de décontextualisation que les pro-coups d’État pour parvenir à leurs fins. Même si l’effet d’une opération de désinformation n’est pas toujours univoque. Diaboliser une junte, c’est la dénoncer autant que lui servir la soupe…

Le service de fact-checking de la chaîne britannique BBC a notamment décortiqué un certain nombre de fake news destinées à démontrer le soi-disant débarquement au Niger de mercenaires de Wagner. Les posts trompeurs apportent de l’eau au moulin des autorités étasuniennes, qui dénoncent un rapprochement présumé de Niamey avec la société paramilitaire russe. BBC Verify a ainsi démasqué d’anciennes images présentées comme récentes et nigériennes : l’atterrissage d’un avion militaire russe IL 76 au… Soudan en 2006, des mouvements de présumés combattants de Wagner au… Mali en janvier dernier, ou encore une photographie, prise en Ukraine, de mercenaires russes censés être en partance pour le Niger.

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Deux autres fausses déclarations de nature à effaroucher ou conforter les internautes occidentaux circulent abondamment, notamment sur le réseau d’Elon Musk. L’une affirme que la junte a d’ores et déjà « interdit l’exportation d’uranium vers la France avec effet immédiat », tandis que l’autre évoque la détention d’Européens par l’armée nigérienne. Le groupe français Orano assure pourtant que ses activités d’extraction d’uranium n’ont pas été perturbées par les évènements politiques. Et rien ne permet de confirmer la seconde infox, le général Tiani ayant déclaré, à propos des ressortissants français, qu’ils « n’ont jamais fait l’objet de la moindre menace ». Manipulation, quand tu nous tiens…

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