Une mission diplomatique de la Cedeao au Niger ?

Une « possible » délégation diplomatique pourrait se rendre ce samedi à Niamey pour tenter d’apporter une solution pacifique à la crise que traverse le pays, où la force de l’organisation régionale s’est dite, vendredi, prête à engager une intervention armée.

Le commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de la Cedeao, Abdel-Fatau Musah, annonce aux médias les conclusions des délibérations à Accra le 18 août 2023. © GERARD NARTEY / AFP

Publié le 19 août 2023 Lecture : 4 minutes.

À l’issue d’une réunion des chefs d’état-major des armées ouest-africaines, réunis depuis jeudi à Accra, le commissaire aux affaires politiques, à la paix et à la sécurité de la Cedeao, Abdel-Fatau Musah, a annoncé une « possible » mission diplomatique à Niamey ce samedi 19 août afin de « continuer à suivre la voie pacifique pour rétablir l’ordre constitutionnel ». Selon une source proche de la Cedeao, la délégation souhaite transmettre « un message de fermeté » aux militaires à Niamey et rencontrer le président Bazoum, toujours retenu prisonnier. « Nous sommes prêts à résoudre le problème pacifiquement, mais il faut être deux pour danser le tango », a déclaré Abdel-Fatau Musah. Et « nous n’allons pas être ceux qui frappent à la porte alors qu’ils nous la claquent », a-t-il toutefois ajouté.

Les précédentes délégations de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest n’ont jusqu’à présent pas réussi à rencontrer le général Abdourahamane Tiani, le nouvel homme fort du pays, où la force de la Cedeao s’est dite vendredi prête à une intervention. « Nous sommes prêts à intervenir dès que l’ordre sera donné. Le jour de l’intervention a aussi été fixé », a déclaré Abdel-Fatau Musah. Selon lui, ont été convenus lors de cette réunion « les objectifs stratégiques, l’équipement nécessaire et l’engagement des États membres » pour cette possible intervention.

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« De sérieuses conséquences »

Le 10 août, la Cedeao avait ordonné, lors d’un sommet à Abuja, le déploiement de sa « force en attente » pour restaurer l’ordre constitutionnel au Niger, sans dévoiler les modalités, ni le calendrier. La Cedeao a dans le même temps continué de privilégier la voie du dialogue avec le régime militaire. Les appels à un règlement pacifique de cette crise se sont d’ailleurs multipliés ces derniers jours, en particulier de la part des États-Unis. Le nouveau régime militaire à Niamey reste pour l’heure inflexible et estime qu’une intervention armée contre leur pays serait une « agression illégale et insensée ».

Et les militaires ayant pris le pouvoir continuent de retenir séquestré le président déchu, qu’ils comptent poursuivre pour « haute trahison ». Interrogé sur le sort de Mohamed Bazoum, qui inquiète la communauté internationale, le nouveau Premier ministre nigérien, Ali Mahaman Lamine Zeine, a assuré vendredi soir au New York Times que « rien ne lui arrivera car nous n’avons pas de tradition de la violence au Niger », ajoutant par ailleurs que les militaires nigériens n’ont « aucune intention » de collaborer avec la Russie, ni avec les mercenaires du groupe Wagner.

L’Union européenne ne reconnaîtra pas les autorités issues du putsch.

« Les conditions de détention du président Bazoum se détériorent. Toute nouvelle détérioration de son état de santé aura de sérieuses conséquences », a averti le président du Nigeria, Bola Tinubu, qui préside actuellement la Cedeao, lors d’un entretien jeudi avec le président du Conseil européen, Charles Michel, selon les propos rapportés vendredi par une responsable de l’Union européenne.

De son côté, Charles Michel a « réitéré le soutien et l’appui total de l’UE aux décisions de la Cedeao, ainsi que la condamnation ferme du coup de force inacceptable au Niger », selon cette responsable. « L’UE ne reconnaîtra pas les autorités issues du putsch. Le président Bazoum, démocratiquement élu, reste le chef d’État légitime du Niger », a-t-il insisté.

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« Sur un coup de tête »

Depuis Genève, la volonté affichée de poursuivre Mohamed Bazoum pour « haute trahison » a été dénoncée par le haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk. « Cette décision n’est pas seulement motivée par des considérations politiques à l’encontre d’un président démocratiquement élu, mais elle n’a pas de fondement juridique puisque le fonctionnement normal des institutions démocratiques a été entravé », a-t-il déclaré.

Dans son communiqué, Volker Türk a souligné que l’élection en 2021 du président Bazoum constituait « la première transition démocratique dans l’histoire du pays, marquée par les coups d’État ». Appelant les généraux à le libérer et à « rétablir immédiatement l’ordre constitutionnel », le responsable leur a dit qu’ils « ne pouvaient pas s’arroger le droit de défier – sur un coup de tête – la volonté du peuple ».

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Également depuis Genève, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a demandé la mise en place d’un couloir humanitaire qui permette de délester les centres de transit installés au Niger, où des milliers de migrants sont coincés. En raison de sa position géographique, le Niger est l’un des principaux pays de transit de la région pour les migrants. Au moins 28 civils ont par ailleurs été tués en début de semaine dans des violences dans plusieurs villages du sud-ouest du Niger, près du Mali, selon une source officielle locale. L’origine de ces violences n’a pas été indiquée.

(avec AFP)

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