Kabiné Komara : « Dadis a fait des erreurs, mais il m’a donné ma chance »

Kabiné Komara a été élu à la tête de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal en avril 2013. Ce gestionnaire de formation, qui a été Premier ministre sous Dadis Camara, veut donner un nouvel élan à l’institution.

Kabiné Komara a obtenu début novembre un soutien de 240 millions de dollars de la Banque mondiale. © Vincent Fournier/JA

Kabiné Komara a obtenu début novembre un soutien de 240 millions de dollars de la Banque mondiale. © Vincent Fournier/JA

ProfilAuteur_ChristopheLeBec

Publié le 5 décembre 2013 Lecture : 3 minutes.

Kabiné Komara est plus à l’aise dans ses habits de haut-commissaire de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) que dans ceux de Premier ministre – poste qu’il a occupé du temps de la junte militaire. Élu en avril (grâce à l’appui du président Alpha Condé) à la tête de cette institution vieille de 41 ans, il est le premier Guinéen jamais parvenu à ce poste.

Fièrement, il égrène les projets de barrages et d’aménagements dans les quatre pays qui se partagent le fleuve et ses affluents : le Sénégal, la Mauritanie, le Mali et la Guinée. De passage à Paris début novembre, il a obtenu un soutien de 240 millions d’euros de la Banque mondiale. « C’est un bon début, même si nous avons besoin de trois fois plus pour bâtir un nouveau barrage à Koukoutamba [Guinée] », commente-t-il, tout en se disant confiant pour la suite de ses discussions entamées avec l’Agence française de développement (AFD).

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Difficile d’imaginer cet homme calme travaillant en tandem avec Moussa Dadis Camara, le très agité capitaine devenu président fin 2008. Gestionnaire de formation, passé par la Banque centrale guinéenne puis par la Banque africaine d’import-export en Égypte, il s’étonne encore de sa nomination à la primature il y a presque cinq ans : « J’ai été choisi par accident. Dans l’avion qui me menait à Conakry, en décembre 2008, après la prise du pouvoir par les militaires, je ne savais même pas quelles étaient les responsabilités qui allaient m’être confiées. Ce n’est qu’à mon arrivée que le président m’a parlé du poste et m’a convaincu de l’accepter », raconte ce Malinké né à Kankan, non loin du fief d’Alpha Condé, et qui a grandi… en Guinée forestière, la région d’origine de Dadis Camara.

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Premier ministre pendant un peu plus d’un an, de décembre 2008 à janvier 2010, Kabiné Komara a, dit-il, « tenté de faire avancer le navire, avec le soutien des institutions internationales. Mais, progressivement, la primature a perdu les commandes, les ministères clés étant rattachés à la présidence ou aux militaires ». Cette période a été marquée par les viols et les massacres perpétrés le 28 septembre 2009 contre des militants de l’opposition par des soldats proches de la junte. Un événement douloureux qui n’a pas poussé l’ancien Premier ministre à la démission – ce que ses détracteurs lui reprochent.

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Ce n’est qu’après la tentative d’assassinat de Dadis Camara en décembre 2009 et la reprise en main du pouvoir par le général Sékouba Konaté que Komara a rendu son tablier et quitté le pays quelque temps. « Mais je ne suis jamais parti bien longtemps. Même quand j’étais au Caire, je m’arrangeais pour rentrer régulièrement en Guinée. »

Après l’élection d’Alpha Condé fin 2010, Kabiné Komara est donc revenu en Guinée, en prenant bien soin de rester à bonne distance du marigot politique et en n’adhérant à aucun parti. Il y a entamé une carrière de consultant dans le secteur des infrastructures et des mines, en s’appuyant sur sa connaissance du secteur acquise à la fin des années 1990. « Aujourd’hui, mon fils a repris cette activité », confie-t-il, regrettant au passage le discours peu favorable aux investisseurs qui a prévalu ces derniers mois. Discret, Kabiné Komara n’en reste pas moins fidèle à ses deux grands soutiens : « Les législatives ont donné au pays un Parlement équilibré, prouvant l’attachement du président Alpha Condé à la démocratie », fait-il valoir. Et de réaffirmer une certaine gratitude envers Dadis Camara : « C’est lui qui m’a donné ma chance. Il a commis des erreurs de jeunesse, mais c’est quelqu’un de courageux, je ne peux pas l’oublier. »

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