La grève des avocats va paralyser la justice algérienne

Inquiets du contenu de la réforme des Codes pénal et de procédure pénale, les avocats estiment qu’ils ne sont pas entendus. Ils cesseront le travail pour une semaine à compter du 24 septembre prochain.

Le tribunal algérien Dar Al-Baida à Alger, le 4 février 2021. © RYAD KRAMDI / AFP

Publié le 20 septembre 2023 Lecture : 3 minutes.

L’Union nationale des ordres des avocats (Unoa) vient de mettre à exécution sa menace de boycotter les tribunaux et cours de justice, après le refus de l’exécutif de retirer le projet de réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale qui devraient être votés prochainement par Parlement. Les avocats protestent contre des textes qui ont été élaborés sans concertation avec les professionnels du droit.

À l’issue d’une réunion qui s’est tenue le 14 septembre, l’organisation professionnelle a décidé de paralyser l’activité judiciaire sur l’ensemble du territoire national, du 24 au 30 septembre, à l’exception des affaires concernées par une expiration des délais de recours. Elle a également prévu de suspendre les visites dans les établissements pénitentiaires durant cette période.

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Doléances

Début juillet, le Conseil de l’ordre des avocats algériens avait menacé de recourir à la grève si le ministère de la Justice n’entamait pas de pourparlers autour de ses doléances. À l’époque, il avait aussi protesté contre ce qu’il qualifiait de négation des droits de la défense et contre le fait qu’il n’était pas associé aux discussions sur les projets de loi concernant le secteur de la justice et ce, « malgré les promesses constantes des ministres » successifs.

Suite à ses demandes, l’Unoa indique avoir seulement été conviée, le 18 juin, par la commission juridique de l’Assemblée nationale à une séance de travail, bien après l’adoption des deux projets de loi par le conseil des ministres. Lors de cette réunion, qui s’est déroulée en présence du vice-président de l’Assemblée, Ouahid Al Sid Cheikh, la commission a écouté non seulement les représentants des ordres des avocats, mais aussi ceux des huissiers de justice et du ministère de la Justice.

« Refus de dialoguer »

En réaction à ce processus jugé insatisfaisant, le bureau des ordres des avocats a rejeté « les deux projets de loi dans leur mouture actuelle » et maintenu sa session ouverte pour suivre les développements de l’affaire. Lors de son assemblée générale ordinaire, qui s’est déroulée ce 14 septembre, l’organisation a imputé la responsabilité de « l’impasse » au « refus du ministre de la Justice de dialoguer avec la défense en dépit des efforts fournis».

L’actuel projet de réforme du Code pénal prévoit le durcissement des peines applicables « en matière de fraude et de falsification sous toutes ses formes, notamment la falsification de documents de résidence pour l’obtention indue d’un foncier ou un logement », et octroie au Parquet la prérogative de mettre en mouvement d’office l’action publique dans les infractions d’insulte et de diffamation commises à l’encontre des corps constitués.

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Contraire aux principes constitutionnels

Le texte contient aussi des disposition aggravant les peines relatives aux infractions d’outrage et de violences envers les enseignants et les imams et, dans ce dernier cas, supprime l’exigence que l’agression se déroule à l’intérieur d’une mosquée. Le projet de réforme du Code de procédure pénale prévoit, lui, la numérisation des procédures judiciaires et la réforme du tribunal criminel.

Globalement, le contenu de ces projets, estime l’ordre des avocats, « est contraire aux principes constitutionnels, aux libertés individuelles et collectives, viole le principe de la séparation des pouvoirs et ne garantit pas des procès équitables». Le ministre de la Justice, Abdelrrachid Tabi, n’en démord pourtant pas : « La révision du Code de procédure pénale tend plutôt à améliorer la performance de la justice à travers la simplification des procédures de justiciabilité et l’allégement des pressions sur les magistrats et le justiciable», a-t-il argumenté devant le Parlement en juillet, sans pour autant reprendre langue avec les représentants des avocats.

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À ce stade, le chef de l’exécutif n’a pas réagi à la menace de grève brandie par l’Unoa.

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