Soudan du Sud : nouveaux crimes de guerre dans la capitale pétrolière

Femmes violées en groupe puis exécutées sur leur lit d’hôpital, enfants abattus, réfugiés tués dans les églises : la capitale pétrolière du Soudan du Sud, Malakal, a été le théâtre de nouveaux crimes de guerre.

Dans la rue de Makalal, au Soudan du Sud. © AFP

Dans la rue de Makalal, au Soudan du Sud. © AFP

Publié le 23 février 2014 Lecture : 3 minutes.

Ces crimes de guerre à Malakal, dans le nord d’un pays où pareilles exactions sont devenues habituelles, ont été rapportés par des témoins, des travailleurs humanitaires et d’autres sources indépendantes. Ces sources, dont beaucoup ont demandé à ne pas être identifiées pour leur sécurité, décrivent les rues de Malakal constellées d’un nombre incalculable de cadavres, abandonnés aux chiens et aux vautours.

Jeudi, deux jours après la reprise de la ville par les rebelles de l’ancien vice-président Riek Machar aux forces gouvernementales, l’ONG Médecins sans frontières (MSF) a été la première à raconter ce qui s’est passé à l’hôpital universitaire de la ville. "Beaucoup d’habitants de la ville ont dû chercher refuge dans la base surpeuplée de l’ONU, à cause de l’insécurité très élevée dans la zone", a expliqué MSF, faisant référence à l’enceinte des Nations unies où s’entassent plus de 20. 000 civils. "Certains de ces déplacés ont signalé à nos équipes des meurtres et des viols de patientes et leurs proches dans le seul hôpital fonctionnant en ville", selon l’ONG.

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"Plusieurs femmes violées et tuées"

Une autre source, qui a requis l’anonymat, a fourni plus de détails. "Plusieurs femmes étaient coincées dans l’hôpital universitaire de Malakal. (. . . ) Elles ont été violées à de nombreuses reprises et tuées", a-t-elle raconté, précisant que "quelques femmes" avaient péri sans pouvoir préciser le nombre. "Les corps montraient des signes de violences sexuelles extrêmes, inimaginables", dont des traces de morsures et de coups de couteau.

Les violences ciblent essentiellement des groupes ethniques : les membres de la communauté Dinka, à laquelle appartient le président Salva Kiir, ont été pris pour cibles par les rebelles Nuer, tandis que les troupes gouvernementales ont été accusées d’avoir massacré des Nuer.

Les deux camps ont commis des atrocités depuis le premier jour du conflit le 15 décembre, au début des combats dans la capitale Juba, et durant les longues batailles pour la ville de Bor, plus au nord, et pour les cités pétrolières de Bentiu et Malakal.

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Des enfants exécutés

Dans un autre incident à Malakal, des miliciens auraient tué par balle des personnes réfugiées dans l’église principale. Plusieurs sources indépendantes citent des "témoins crédibles" selon lesquels un groupe d’hommes, de femmes et d’enfants ont été tués. Ces témoins n’ont pu préciser le nombre de victimes, en raison des difficultés de mouvement dans la ville.

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Selon le porte-parole de la Mission de l’ONU au Soudan du Sud (Minuss) à Djouba, Joe Contreras, les responsables de l’ONU "ne peuvent réellement dire" si les morts jonchant les rues de Malakal sont en majorité des civils ou des soldats, car ils ne peuvent sortir de leurs véhicules en raison de la présence de jeunes rebelles menaçants.

La Minuss affirme aussi que son équipe à Malakal a été témoin jeudi de "l’exécution extra-judiciaire de deux enfants en dehors de l’enceinte" de l’ONU, "par de jeunes gens armés qui seraient des alliés" de la rébellion.

La haine entre les ethnies est tellement exacerbée par les violences passées que même des non-combattants auraient participé aux meurtres, ce qui a stupéfié les observateurs chevronnés du jeune État, indépendant depuis 2011. Martin Plaut, un chercheur de l’Institut d’études du Commonwealth, a indiqué que, selon une source bien informée, des membres de l’ONU "recrutés localement s’étaient enfermés à clé dans un bunker de la base pour empêcher d’autres employés de l’ONU de les tuer". "Ce sont des personnes qui ont travaillé ensemble depuis des années et que toutes les épreuves traversées avaient soudées", a dit M. Plaut.

Samedi, la Minuss a fait un rapport préliminaire pour le Conseil de Sécurité sur la situation des droits de l’homme dans le pays jusqu’à fin janvier. Elle dit disposer de témoignages documentés sur des "meurtres extra-judiciaires, y compris des tueries de masse, des disparitions, des violences sexuelles, notamment des viols en bandes organisées, des cas de mauvais traitement et de torture commis par les deux parties en conflit".

Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a qualifié jeudi de "catastrophique" la situation à Malakal.

(AFP)

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