La menace de grève des avocats algériens est levée

S’estimant entendus par les autorités, qui ont retiré les projets de loi de réforme des codes pénal et de procédure pénale, les avocats ont suspendu la grève annoncée. Mais les robes noires restent sur leurs gardes.

Le ministre de Justice de l’Algérie, Abderrachid Tabi. © DR

Publié le 21 septembre 2023 Lecture : 3 minutes.

Le bras de fer qui s’annonçait entre le ministère de la Justice algérien et les avocats, à partir du 24 septembre et pour une durée d’une semaine, autour des projets de loi relatifs au code pénal et au code de procédure pénale, n’aura finalement pas lieu. L’Union nationale des ordres des avocats (UNOA) vient de décider de geler son mouvement de grève, à la suite du retrait des deux textes du Parlement, alors qu’ils étaient bel et bien programmés pour la session d’automne de l’Assemblée nationale.

L’annonce par les avocats, le 14 septembre, de leur mouvement de protestation semble donc avoir contraint l’exécutif à faire marche arrière. Ce geste d’apaisement a été suivi d’une réunion entre les deux parties, trois jours plus tard, durant laquelle il a été convenu de créer une commission mixte pour examiner les articles controversés du code de procédure pénal et du code pénal. Le ministre de la Justice s’est aussi engagé à maintenir un dialogue permanent avec le conseil de l’ordre des avocats. En signe de bonne foi, une commission mixte a déjà été mise en place pour enrichir les futurs code de procédure civile et administratif et celui du commerce.

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Si le ministère de tutelle consent à dialoguer, il ne transigera pas sur tout. « Le projet du code pénal et celui relatif aux procédures pénales ont été déprogrammés, mais cela ne veut pas qu’ils vont connaître des changements conséquents après nos discussions avec les avocats. La tutelle reste souveraine dans ses décisions », confie à Jeune Afrique une source judiciaire. L’Union nationale des ordres des avocats conteste, sur la forme, onze articles du projet de code pénal et sur le fond une quarantaine d’articles du projet de code de procédure pénal, dont ceux portant sur la comparution immédiate et la suppression des jury des tribunaux criminels, remplaçant cette disposition par l’obligation du magistrat à motiver ses décisions.

Les avocats protestent aussi contre l’instauration d’une médiation au niveau des services de police limitée aux affaires d’insultes, d’atteintes aux biens et de non-paiement de la pension alimentaire. Une médiation qui se fera, précise le projet de code de procédure pénale, sous le contrôle du procureur de la République. Si l’une des partie s’y oppose, l’affaire sera renvoyée devant un tribunal, rassure-t-on. Autre objet de litige : l’aveu de culpabilité devant le procureur, démarche qui peut être annulée si l’accusé refuse de s’y soumettre. Même si la procédure est prévue pour se dérouler en présence de la défense, les avocats l’assimilent à une pression exercée par le parquet et à une atteinte aux droits des justiciables.

Durcissement des peines

Le projet de code pénal prévoit, en outre, le durcissement des peines applicables en « matière de fraude et de falsification sous toutes ses formes, notamment la falsification de documents de résidence pour l’obtention indue d’un foncier ou d’un logement » et octroie au parquet la prérogative de mettre en mouvement d’office l’action publique dans les infractions d’insulte et de diffamation commises à l’encontre des corps constitués.

Le texte contient aussi des dispositions aggravant les peines relatives aux infractions d’outrage et de violences envers les enseignants et les imams et, dans ce dernier cas, supprime l’exigence que l’agression se déroule à l’intérieur de la mosquée. Le projet de loi portant sur le Code de procédure pénale prévoit, lui, la numérisation des procédures judiciaires et la réforme du tribunal criminel. Les deux textes, estime l’ordre des avocats « violent le principe de la séparation des pouvoirs et ne garantissent pas des procès équitables»

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Les robes noires ont protesté, à plusieurs reprises, au cours de l’année 2023, contre leur exclusion de l’élaboration des textes de loi par le ministère de la Justice. Ils ont exigé début juillet le retrait immédiat des projets du code pénal et du code de procédure pénale en brandissant la menace de recourir à la paralysie des tribunaux et de suspendre les visites aux établissements pénitenciers. Ils sont déterminés à aller jusqu’au bout, si les pourparlers en cours n’aboutissent pas à la satisfaction de leurs revendications.

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