Soudan du Sud : les rivaux Kiir et Machar sous pression pour stopper la violence
Le président sud-soudanais Salva Kiir et l’ex-vice président Riek Machar étaient sous pression samedi pour entamer des pourparlers et arrêter l’escalade de la violence dans leur jeune pays, au bord de la guerre civile depuis près de deux semaines.
Vendredi, les dirigeants de pays de la Corne de l’Afrique et d’Afrique de l’Est réunis dans l’organisation régionale Igad (Autorité intergouvernementale sur le développement) ont donné jusqu’au 31 décembre aux deux rivaux pour se parler et arrêter les combats. Les deux hommes ont accepté le principe des pourparlers, sans fixer aucune date.
Selon les dirigeants de l’Igad, Salva Kiir s’est par ailleurs dit prêt à un cessez-le-feu "immédiat". Mais Riek Machar refuse pour l’instant de s’engager : dans un entretien à la BBC, il a réclamé la supervision de toute trêve et la libération de tous ses alliés actuellement détenus.
L’Igad a demandé "aux parties de négocier dans un délai de quatre jours, à compter de vendredi", a souligné samedi à l’AFP le porte-parole des Affaires étrangères éthiopiennes, Dina Mufti.
"Nous attendons les résultats"
Addis Abeba est, depuis le début de la crise, au coeur des efforts est-africains de médiation. "Nous attendons les résultats", a-t-il poursuivi. "La communication (de l’Igad) est adressée aux deux parties, et je pense que les deux parties l’ont clairement entendue".
Le Soudan du Sud est déchiré depuis le 15 décembre par d’intenses combats qui menacent de dégénérer en guerre civile. Au coeur de ce conflit : une rivalité entre le président Kiir et son ex-vice président, limogé en juillet. Le premier accuse le second de tentative de coup d’Etat. Riek Machar nie et reproche à Salva Kiir de chercher à éliminer ses rivaux. Les forces rebelles ont pris en quelques jours le contrôle de capitales régionales comme Bentiu, dans l’Etat pétrolier d’Unité (nord), et Bor, dans celui du Jonglei (est), reprise par l’armée mardi.
Premiers renforts onusiens
Samedi, le porte-parole de l’armée sud-soudanaise, Philip Aguer, assurait à l’AFP que la situation était calme dans les principaux foyers de tensions des derniers jours : Malakal, capitale de l’Etat du Haut-Nil (nord-est), riche en pétrole, Bor ou encore l’Etat d’Unité, où l’armée dit avoir repoussé vendredi des attaques de rebelles.
M. Aguer a assuré que ses troupes mettraient en oeuvre tout accord que le gouvernement scellerait avec les rebelles. Mais il a aussi promis de répliquer en cas d’attaque : "Si vous êtes attaqués, vous devez répondre," a-t-il dit.
Moses Ruai Lat, porte-parole de la rébellion, a de son côté insisté sur la nécessité de libérer les proches de Riek Machar, notamment Pagan Amum, désigné, selon lui, pour "mener l’équipe" de négociations par l’ex-vice président.
Secrétaire général suspendu du parti au pouvoir (SPLM), M. Amum était aussi négociateur en chef pour Juba dans les pourparlers destinés à résoudre les différends post-indépendance avec Khartoum.
Le récent conflit dans la jeune nation, indépendante du Soudan depuis juillet 2011, est alimenté par une vieille rivalité politique qui utilise et exacerbe la dimension ethnique: les Dinka de Salva Kiir contre les Nuer de Riek Machar.
Depuis plusieurs jours, des informations émergent sur des violences entre communautés : meurtres, viols, massacre. Sur l’ensemble du pays, le bilan est déjà de plusieurs milliers de morts et l’ONU a annoncé la découverte d’au moins un charnier.
Toujours selon les Nations unies, plus de 120 000 personnes ont aussi été déplacées depuis une dizaine de jours. Au-delà des dirigeants de la région, d’autres pays sont engagés dans une course diplomatique pour tenter d’enrayer la crise.
Les États-Unis, parrains de l’indépendance du Soudan du Sud et principal soutien économique et politique du pays depuis, sont en constante discussion avec les deux parties. Ils les ont clairement menacées d’un arrêt de leur aide en cas de coup de force militaire. La Chine, qui possède d’importants intérêts dans le secteur pétrolier sud-soudanais, a elle aussi annoncé l’envoi d’un émissaire. Les Nations unies, dont le secrétaire général Ban Ki-moon menace de sanctions les responsables d’exactions, ont, elles, commencé à envoyer des renforts.
L’ONU, débordée aux premiers jours des combats, a décidé d’envoyer 6.000 Casques bleus supplémentaires et des moyens aériens pour mieux protéger les dizaines de milliers de civils réfugiés dans ses bases. Ce renfort portera à 12 500 le nombre de soldats de la Mission de l’ONU au Soudan du Sud (Minuss).
Vendredi, un premier contingent de 72 policiers du Bangladesh est arrivé sur place, a indiqué un porte-parole de l’ONU à New-York.
(AFP)
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