Centrafrique : 400 morts à Bangui, l’armée française réclamée dans les quartiers
Les habitants de Bangui attendaient fiévreusement dimanche que les militaires français déployés dans la capitale rentrent désormais dans les quartiers pour neutraliser les hommes en armes, après le massacre de 400 personnes au cours des dernières 72 heures.
Après une nuit relativement calme, ponctuée de rares tirs isolés, la ville est restée sans grande activité dimanche matin. La majorité des églises, habituellement bondées pour la messe dominicale, étaient désertes, à l’exception notable des quelques lieux de culte où des milliers de déplacés ont trouvé refuge ces derniers jours.
À bord de véhicules blindés ou à pied, les soldats français de l’opération "Sangaris" étaient désormais très visibles sur les boulevards, les grandes artères et les carrefours stratégiques. Les hommes en armes et les pick-ups de combattants de l’ex-rébellion Séléka (au pouvoir) ont quant à eux quasiment disparu des rues. "Le calme est revenu dans Bangui, même s’il y a encore ici ou là des exactions", a déclaré le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, interrogé sur la chaine de télévision française France 3.
"On dénombre dans les trois derniers jours 394 morts", a indiqué M. Fabius, après les massacres inter-religieux qui ont ensanglanté la ville jeudi. Un précédent bilan de la Croix-Rouge locale faisait état d’environ 300 morts. "Il y a un certain nombre d’opérations qui sont en cours dans l’ensemble du pays, et les opérations de désarmement (des ex-rebelles) de la Séléka vont commencer", a assuré M. Fabius.
>> Voir aussi notre carte interactive, 1960-2013, 53 ans d’interventions françaises en Afrique.
Parallèlement à son déploiement dans la capitale, l’armée française a également commencé samedi à prendre position dans le nord-ouest du pays, où les affrontements à caractère inter-religieux sont réguliers depuis septembre et tension reste extrêmement vive. Samedi matin, une colonne de blindés français, arrivée par la route depuis le Cameroun voisin, avait fait son entrée à Bouar (ouest), où les militaires ont été accueillis en libérateurs par la population.
"On est fatigué d’avoir peur"
"On attend que les Français rentrent dans nos quartiers pour qu’on ne voit plus tous ces gens armés", expliquait dimanche matin à l’AFP un habitant de Bangui, ajoutant: "quand on voit un pick-up (de combattants surarmés), on change de direction". Dans la ville, la peur est toujours dans les esprits. "On est fatigué d’avoir peur. On veut que ça s’arrête", ajoutait un autre.
Dans un message à la radio nationale, le président centrafricain Michel Djotodia – arrivé au pouvoir en mars à la tête de la coalition rebelle Séléka, qu’il a ensuite dissoute – a décrété un deuil national de trois jours à compter de dimanche, en mémoire des victimes "de ces tragiques évènements". "Au moment où je vous parle, la situation est sous le contrôle des forces de défense et de sécurité (…) Plus rien ne s’oppose à la reprise des activités", a assuré le président Djotodia, appelant ses compatriotes à "vaquer sans crainte" à leurs occupations.
L’ancien chef rebelle a exprimé ses condoléances "à toutes les populations centrafricaines, et plus particulièrement aux populations banguissoises qui ont été éprouvées par les évènements des dernières 48 heures".
La Centrafrique est plongée dans le chaos et un engrenage de violences communautaires et inter-religieuses entre chrétiens et musulmans depuis le renversement en mars du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka. Ces violences se sont multipliées à Bangui comme en province, dans un pays de 4,6 millions d’habitants en totale décomposition, précipitant ces derniers jours l’intervention française dans le pays.
Dans la foulée d’un feu vert de l’ONU, l’opération "Sangaris avait été lancée jeudi soir, en appui à une force africaine sur place, la Misca. Samedi, le président français François Hollande a annoncé que le contingent français avait atteint 1 600 soldats, et ne dépasserait désormais pas ce chiffre. Il a déclaré que les soldats de Sangaris auront désormais pour mission prioritaire de mettre fin aux massacres et de "désarmer toutes les milices et groupes armés qui terrorisent les populations".
Ils demeureront dans le pays "autant que nécessaire pour cette mission", et jusqu’à la tenue d’élections, a souligné M. Hollande, alors que Paris n’évoquait jusqu’à présent qu’une intervention limitée dans le temps, autour de six mois.
Après avoir subi des mois durant les exactions des ex-rebelles Séléka, venus du nord du pays et pour la plupart musulmans, beaucoup de Centrafricains, très majoritairement chrétiens, aspirent à la vengeance. Cette colère des populations contre les Séléka s’est progressivement reportée contre les civils musulmans, avec massacres et cycle infernal des représailles.
Jeudi, des groupes armés anti-Séléka infiltrés dans Bangui avaient lancé une offensive dans plusieurs quartiers. Ces incidents avaient débuté quelques heures avant le vote de la résolution de l’ONU donnant mandat à la force africaine et à l’armée française pour rétablir la sécurité en RCA.
(AFP)
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