Syrie : les experts internationaux se préparent à lancer le désarmement
Des experts internationaux en armes chimiques se préparent à lancer en Syrie l’une des opérations de désarmement les plus ambitieuses, dans un pays plongé dans la guerre civile, après la promesse du régime de se débarrasser de son arsenal chimique.
Alors que ces inspecteurs doivent entamer leur travail mardi, les violences ne connaissent aucun répit dans le pays, avec un raid aérien du régime contre un lycée dimanche dans le nord qui a fait au moins 16 morts dont dix élèves, et des combats entre rebelles et soldats sur plusieurs fronts, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
Par ailleurs, dans le sud, à l’issue de quatre jours de violents combats, au cours desquels 26 militaires et un "très grand nombre" d’insurgés, dont "sept non-syriens" ont été tués, les rebelles se sont emparés d’un poste de douane et occupent désormais une bande de terrain allant de la localité de Deraa vers le plateau du Golan à l’est, a affirmé l’OSDH, qui s’appuie sur un large réseau de militants à travers la Syrie. Amman a protesté auprès de Damas, après la chute d’un obus à Ramtha, sur son territoire, jeudi soir.
Après deux ans et demi d’un conflit dévastateur qui a fait plus de 110.000 morts et poussé à la fuite des millions de Syriens, Bachar al-Assad et la rébellion sont déterminés à se battre jusqu’au bout malgré les efforts internationaux pour une solution politique. Le patron de l’ONU Ban Ki-moon, qui a rencontré samedi pour la première fois le chef de l’opposition syrienne Ahmad Jarba, a annoncé qu’une conférence de paix se tiendrait à la mi-novembre pour amorcer une transition politique, mais les protagonistes ont des objectifs différents pour un tel forum maintes fois reporté. Le ministre syrien des Affaires étrangères Walid Mouallem a jugé qu’une telle conférence ne pouvait décider du sort du président alors que pour l’opposition M. Assad n’a plus sa place dans la transition.
Inspection à hauts risques
Si un règlement politique s’annonce très difficile, la communauté internationale s’active à détruire les armes chimiques du régime, accusé par Washington, de les avoir utilisées le 21 août dans une attaque contre un bastion rebelle qui a fait des centaines de morts. Des experts de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) doivent entamer l’une des opérations de désarmement les plus dangereuses jamais tentées, au beau milieu de la Syrie en guerre.
Il s’agit d’éliminer plus de 1.000 tonnes de produits toxiques (sarin, gaz moutarde) stockés dans tout le pays. L’ONU et l’OIAC cherchent des candidats prêts à travailler d’arrache-pied pour tenir des délais. Tous les sites répertoriés dans la liste remise par la Syrie le 19 septembre à l’OIAC devront avoir été inspectés au plus tard dans 30 jours. La résolution du Conseil de sécurité adoptée vendredi fait obligation au régime Assad de détruire la totalité de ses stocks d’ici la mi-2014. Mais les détails du plan élaboré par les Russes et les Américains le 14 septembre pour inspecter et nettoyer 45 sites de stockage restent à préciser, selon des diplomates.
Pour Dina Esfandiary, une spécialiste de l’Institut international pour les études stratégiques de Londres, "il est très difficile de s’assurer qu’Assad a bien déclaré tout son arsenal. Et puis les inspecteurs feront des cibles parfaites dans cette guerre civile. Quiconque voudra saboter l’opération –et je suis sûr que beaucoup voudront le faire– pourra les prendre en joue".
Moscou et Pékin ont proposé leurs services pour l’opération syrienne. Les États-Unis, l’Allemagne et d’autres pays ont aussi offert leur aide technique ou financière. L’Italie a mis à disposition des appareils militaires C-130 pour transporter depuis les Pays-Bas jusqu’en Syrie les experts en armes chimiques, avec leur matériel. Le régime syrien a assuré qu’il veillerait à la sécurité des inspecteurs mais affirmé que les rebelles pourraient chercher à saboter leur mission.
‘Entente à l’ONU’
Parallèlement, des experts de l’ONU actuellement en mission en Syrie poursuivaient leur enquête pour déterminer si des armes chimiques ont été utilisées dans certaines zones du pays, après avoir confirmé à la mi-septembre le recours à ces armes prohibées le 21 août. Ces experts doivent conclure leur travail lundi et rendre un rapport vers la fin octobre.
La résolution 2118 votée après d’âpres négociations russo-américaines, est la première du Conseil de sécurité depuis le début du conflit en Syrie. Elle contraint le régime à détruire son arsenal chimique, sans cependant stipuler de sanctions automatiques en cas de manquement à ses engagements. Il faudra alors une deuxième résolution, ce qui laisse à Moscou, un allié du régime syrien, une possibilité de blocage.
Cette résolution fait suite à l’accord russo-américain conclu le 14 septembre afin d’éviter une frappe américaine en Syrie, une menace brandie par Washington en réponse à l’attaque chimique du 21 août. Réagissant à cette résolution, M. Mouallem a affirmé à New York que son pays avait adhéré à la convention sur l’interdiction des armes chimiques indépendamment de la résolution de l’ONU, soulignant le "sérieux" de son pays dans l’application de ses engagements en matière chimique.
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