WikiLeaks : Bradley Manning veut devenir une femme en prison

Bradley Manning, le jeune soldat responsable de la plus grande fuite de l’histoire des États-Unis, a attendu jeudi, le lendemain de sa condamnation à trente-cinq ans de prison, pour révéler au grand jour qu’il se sentait femme et voulait désormais se faire appeler Chelsea.

Bradley Manning portant une perruque de femme et du maquillage sur une photo non datée. © AFP

Bradley Manning portant une perruque de femme et du maquillage sur une photo non datée. © AFP

Publié le 23 août 2013 Lecture : 3 minutes.

"A partir de maintenant, pour cette nouvelle phase de ma vie, je veux que tout le monde sache qui je suis vraiment. Je suis Chelsea Manning, je suis une femme", a annoncé Manning, dans une brève déclaration lue sur NBC, en présence de son avocat, David Coombs.

"Etant donné la manière dont je me sens depuis que je suis enfant, je veux commencer un traitement hormonal dès que possible. J’aimerais aussi qu’à partir d’aujourd’hui on m’appelle par mon nouveau prénom et que l’on utilise le pronom féminin pour parler de moi".

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Cette annonce intervient après trois mois de procès en cour martiale et plus de trois ans de détention préventive. "Chelsea ne voulait pas que cela devienne quelque chose qui perturbe son dossier", a dit Me Coombs.

Il n’était pas clair dans l’immédiat si Manning avait engagé des démarches légales pour changer de prénom, alors que l’annonce suscite un débat médiatique quant à la manière de le désigner.

Son avocat lui-même, lors de cette interview, a utilisé le pronom masculin s’agissant du dossier judiciaire, avant de parler d’"elle" concernant son désir de vivre en tant que femme.

Les troubles d’identité sexuelle de Bradley Manning avaient émaillé les débats, clos mercredi sur la base militaire de Fort Meade, près de Washington.

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Sa défense avait souvent invoqué cette fragilité pour expliquer l’état d’esprit dans lequel se trouvait le jeune analyste du renseignement en Irak lorsqu’il a transmis plus de 700.000 documents confidentiels au site WikiLeaks qui les a publiés, déclenchant une tempête dans la diplomatie mondiale.

A la barre, psychiatres et confidents avaient souligné combien Manning bataillait avec sa féminité piégée dans un corps d’homme. Une photo intitulée "mon problème", la bouche fardée et la tête couverte d’une perruque blonde, avait été projetée au tribunal.

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"L’armée ne fournit pas de traitement hormonal"

Mais, une fois tombée la sentence de 35 ans pour des faits d’espionnage, de vol et de fraude, Manning, désormais reclus dans la prison militaire de Fort Leavenworth au Kansas, a demandé à recevoir un traitement hormonal.

"J’espère que Fort Leavenworth va faire ce qu’il faut pour lui permettre d’avoir accès à ce traitement, sinon je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour m’assurer qu’ils y soient contraints", a commenté David Coombs.

"Le but ultime est qu’elle se sente bien dans sa peau et qu’elle soit la personne qu’elle n’a jamais eu la possibilité d’être", a ajouté le défenseur.

Interrogé par l’AFP, un porte-parole de la prison de Fort Leavenworth a affirmé que "l’armée ne fournit pas de traitement hormonal ou de chirurgie de changement de sexe pour les troubles d’identité sexuelle".

Il a souligné que la population carcérale était exclusivement masculine dans cet établissement du centre du pays mais Me Coombs ne craint pas pour son client car les autres détenus y sont tous là pour une première condamnation.

"Nous sommes conscients que l’avocat du soldat condamné sous le nom de Bradley Manning a rapporté que son client s’identifie maintenant ouvertement comme une femme. Il n’y a pas de mécanisme en place au sein de l’armée américaine pour fournir de (tels) traitements (…) pour elle", a déclaré à l’AFP Todd Breasseale, porte-parole du Pentagone.

Des déclarations des autorités militaires qui soulèvent de "graves problèmes constitutionnels", selon l’Union de défense des libertés (ACLU), selon laquelle "la dysphorie du genre peut causer une grande détresse psychologique" pouvant aller jusqu’au suicide.

Dans la justice de droit commun, de plus en plus de juges fédéraux ont tranché que refuser un traitement à des prisonniers transsexuels constituait une punition cruelle. L’an dernier, un juge du Massachusetts a ordonné aux autorités de l’Etat qu’elles payent l’opération de changement de sexe d’un meurtrier. Et tous les détenus du Maryland, de Virginie, de Virginie-Occidentale, de Caroline du Nord et du Sud ont la possibilité de recevoir une telle opération, depuis une décision d’une cour d’appel de janvier 2013.

Selon David Coombs, Manning n’a pas pour l’instant évoqué cette opération.

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