Le chanteur malien Salif Keïta indésirable en Côte d’Ivoire ?
Les organisateurs d’un concert ivoirien de la star malienne viennent d’annoncer le « report » de l’événement. Chacun y va de son interprétation…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 26 octobre 2023 Lecture : 2 minutes.
Le communiqué du 25 octobre laisse ses lecteurs sur leur faim. Dans un texte qui n’est pourtant pas laconique, les responsables de la société FCS Events informent que « le concert de Salif Keïta prévu pour le 17 novembre », en Côte d’Ivoire, est reporté « à une date ultérieure ». Soucieux de se dédouaner, les signataires précisent par deux fois que la décision est due à des « circonstances indépendantes de [leur] volonté ».
Si des artistes posent parfois des lapins, l’interprète de Folon se réjouissait, lui, de venir en Côte d’Ivoire : « Deux ans que je ne me suis pas produit sur le sol ivoirien. Ça a été long ! C’est donc avec une grande joie que je vous annonce mon prochain spectacle à Abidjan. En live au Palais de la culture de Treichville. »
Report sine die
Le communiqué des organisateurs évoque des « problèmes » dont la nature n’est pas précisée. Il esquisse tout de même la difficulté à « garantir la sécurité et la satisfaction » du public. Quel enjeu sécuritaire pourrait donc menacer la prestation du chanteur ? La nature ayant horreur du vide communicationnel, les internautes ne se privent pas d’extrapoler sur un registre politique. Un appel au boycott du concert avait commencé à circuler.
Si Salif Keïta entendaient célébrer « la fraternité et l’amitié entre les peuples frères de la Côte d’Ivoire et du Mali », certains rappellent, sur les réseaux sociaux, l’épisode des 49 soldats ivoiriens longtemps détenus à Bamako et le soutien du chanteur aux autorités maliennes actuelles. Le 11 août dernier, après quelques mois passés au Conseil national de transition, Keïta était nommé conseiller spécial du colonel Assimi Goïta. Les choix idéologiques du chanteur le rendent-ils indésirable sur les bords de la lagune Ébrié ? En 2015 pourtant, à Grand Bassam, le griot avait chanté en chœur avec le président ivoirien Alassane Ouattara.
« Contrainte » à sa décision, la société FCS Events a-t-elle reçu des injonctions ? Tout en présentant des excuses et des remerciements à l’artiste, au public, aux partenaires et à toutes les institutions pour leur compréhension, les organisateurs insistent sur le fait qu’il ne s’agit que d’un report. Sans précision de calendrier…
Attention à ce qu’entre-temps, Salif Keïta ne mette pas un terme à sa carrière. Même s’il n’a pas formellement annoncé sa retraite, c’est en 2018 que l’artiste aujourd’hui âgé de 74 ans a publié ce qu’il présente toujours comme l’ultime album de sa longue discographie. Et ce qui apparaît comme un épisode de mauvaise diplomatie musicale ne risque-t-il pas d’enclencher une diplomatie sportive équivalente ? La Coupe d’Afrique des nations ivoirienne dite « 2023 » est en effet prévue au mois de janvier prochain. Ceux qui auraient sifflé le concert de Salif Keïta hueront-ils les footballeurs maliens ?
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