Stanis Bujakera Tshiamala : selon RSF, la note de l’ANR venait bien des services de renseignement
La cellule investigation de Reporters sans frontières a publié le 2 novembre une enquête qui conclut que notre journaliste n’est pas l’auteur de la note de l’ANR au cœur de l’affaire. Il ne serait même pas le premier à en avoir signalé l’existence.
Alors que la troisième audience de notre correspondant est prévue à Kinshasa ce vendredi 3 novembre, l’ONG Reporters sans frontières (RSF) a publié une enquête sur l’affaire qui a conduit Stanis Bujakera Tshiamala devant les tribunaux. D’après la cellule investigation de RSF, dont une délégation s’est rendue en RDC fin octobre, le journaliste « n’est pas l’auteur de la note pour laquelle il risque dix ans de prison ».
Cela fait bientôt deux mois que Stanis, correspondant de Jeune Afrique, collaborateur de Reuters et directeur adjoint du site Actualité.cd, a été arrêté. Incarcéré le 14 septembre à la prison de Makala, Stanis Bujakera Tshiamala est notamment accusé d’avoir « contrefait ou falsifié les sceaux, timbres, poinçons ou marques de l’État et des administrations publiques », et d’en avoir « fait usage ».
« Même pas le premier à avoir reçu la note »
En cause, une note de l’Agence nationale du renseignement (ANR) congolais : le document en question, auquel Jeune Afrique a consacré un article, retraçait les circonstances de l’assassinat de l’ancien ministre Chérubin Okende, et mettait en cause les renseignements militaires. L’article en question, publié le 31 août, ne porte pas la signature de Stanis Bujakera Tshiamala.
L’authenticité de cette note est contestée par les autorités congolaises, comme en a été informé Jeune Afrique par courrier du ministère de l’Intérieur le 8 septembre, au lendemain de l’arrestation de Stanis Bujakera Tshiamala.
Déjà entendu deux fois par le tribunal de grande instance de Kinshasa-Gombe, notre journaliste est accusé d’avoir fabriqué ladite note de l’ANR, et de l’avoir par la suite diffusée, ce que conteste la défense de Stanis Bujakera Tshiamala. L’enquête de RSF vient appuyer ce démenti. « Il n’aura fallu que quelques jours sur place, à Kinshasa, pour constater que Stanis, détenu depuis près de deux mois, n’est même pas le premier à avoir reçu la note de l’ANR qu’on lui reproche d’avoir conçue et transmise à la rédaction de Jeune Afrique, affirme l’ONG. Selon notre enquête, le document a largement circulé dans les milieux sécuritaires, les chancelleries et les médias avant même que Stanis ou sa rédaction en aient connaissance. »
Lors du séjour de la délégation de RSF dans la capitale congolaise, plusieurs sources ont affirmé que le document « ressemblait en tout point à ce que peut produire l’ANR sur ce type d’évènement », et ont indiqué que la note provenait bien des renseignements nationaux. Des sources diplomatiques ont également confirmé à RSF avoir reçu la note au cours du mois d’août. L’enquête cite aussi un agent de l’ANR, qui décrit une « note adressée à la hiérarchie attendant vérification, analyse et enquête minutieuse ».
Victime collatérale
L’ONG relève également que Jeune Afrique qui a, tout comme Radio France internationale (RFI), écrit sur les conclusions de cette note, n’est pas le premier à l’avoir évoquée : le 5 août, un député de la majorité, Léon Nembalemba, avait pointé du doigt « l’incompétence des services » soupçonnés d’avoir tué Chérubin Okende et déguisé sa mort. Les résultats de l’enquête laissent en tout cas penser que la diffusion de la note confidentielle de l’ANR, datée du 14 juillet, « avait pour objectif de jeter le discrédit sur le patron de l’Agence, sur fond de luttes internes ».
RSF relève ainsi que, le 1er août, l’administrateur général des renseignements congolais a été démis de ses fonctions. « Les conséquences au sein de l’Agence sont bien réelles depuis plusieurs semaines. Selon plusieurs sources, des sanctions ont été prises à la suite de la diffusion de la note, y compris au sein de l’ANR, accréditant une fois de plus le fait qu’elle y aurait été produite. » Stanis Bujakera Tshiamala serait alors, d’après cette version des faits, la victime collatérale des règlements de comptes au sein de l’Agence nationale de renseignement.
Notre journaliste, dont l’ONG a dénoncé la détention « arbitraire », s’est vu refuser toutes ses demandes de remise en liberté provisoire. Le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a été saisi. Jeune Afrique, comme plus de 100 personnalités et organisations de la société civile, demande la libération de Stanis Bujakera Tshiamala et l’abandon des charges retenues à son encontre.
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