Au Burkina Faso, la justice ordonne la libération d’un homme enlevé par des agents du renseignement
Le tribunal administratif de Ouagadougou a ordonné lundi la libération de l’homme d’affaires Anselme Sansan Kambou, enlevé devant chez lui à la mi-septembre.
« L’enlèvement de monsieur Anselme Sansan Kambou par des agents de l’Agence nationale de renseignement (ANR) est manifestement illégal et constitutif d’une grave atteinte à sa liberté d’aller et de venir », selon une ordonnance rendue publique à l’issue d’une audience en référé.
En conséquence, il a enjoint l’État burkinabè « à travers l’ANR, de mettre immédiatement un terme à la détention de monsieur Anselme Sansan Kambou et lui permettre de regagner son domicile ».
Influent homme d’affaires à la tête d’une centrale d’achat qui vend de l’armement, Anselme Kambou a été enlevé dans la nuit du 20 septembre devant son domicile ouagalais par des hommes armés se présentant comme des agents de l’ANR, avant d’être conduit vers une destination inconnue, selon des membres de sa famille.
Des enlèvements ciblés
Anselme Kambou est un proche de l’ancien chef d’état-major de la gendarmerie du Burkina Faso, le lieutenant-colonel Evrard Somda, limogé au début du mois d’octobre après l’arrestation de deux de ses anciens collaborateurs pour leur implication présumée dans une tentative de coup d’État déjouée par les autorités militaires.
Plusieurs cas d’enlèvements ont été rapportés ces derniers mois par des sources locales à Ouagadougou. Des voix s’élèvent également pour dénoncer des « réquisitions » récentes de citoyens critiques du pouvoir par les autorités militaires.
En avril, un décret de mobilisation générale avait été adopté, permettant, si besoin, la réquisition des « jeunes de 18 ans et plus » afin de lutter contre les jihadistes qui mènent régulièrement des attaques sanglantes dans le pays.
L’opposition vent debout
Lundi, le Front patriotique, une coalition de plusieurs dizaines de partis politiques et d’organisations citoyennes burkinabè, a constaté que des « réquisitions pour le front de guerre ont été adressées à des citoyens burkinabè, pour la plupart des acteurs de la société civile qui ont exprimé des voix discordantes vis-à-vis des autorités de la transition ». La coalition « s’inquiète et condamne » une « dérive autoritariste » du régime.
Le mouvement Le balai citoyen, à l’origine de l’insurrection populaire qui a conduit à la chute de l’ancien président Blaise Compaoré en 2014, a, de son côté, indiqué que deux de ses membres avaient été « réquisitionnés ». Dimanche, c’est une association de défense des droits humains au Burkina Faso qui dénonçait une « réquisition massive et ciblée de citoyens » critiques du pouvoir. Un collectif de syndicats a également déploré « un acharnement contre des citoyens ayant exprimé des opinions critiques vis-à-vis des autorités de la transition ».
« Les libertés individuelles ne priment pas sur celles de la Nation », a affirmé lundi le président de la transition, le capitaine Ibrahim Traoré, arrivé au pouvoir par le biais d’un coup d’État en septembre 2022, dans le contexte d’un Burkina Faso pris depuis 2015 dans une spirale de violences attribuées à des groupes jihadistes affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique, dont les attaques ont fait plus de 17 000 morts civils et militaires et plus de deux millions de déplacés internes.
(avec AFP)
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Politique
- Le livre « Algérie juive » soulève une tempête dans le pays
- Maroc-Algérie : que contiennent les archives sur la frontière promises par Macron ?
- L’Algérie doit-elle avoir peur de Marco Rubio, le nouveau secrétaire d’État améric...
- En Algérie, le ministre Ali Aoun affaibli après l’arrestation de son fils pour cor...
- Au Bénin, arrestation de l’ancien directeur de la police