Nigeria : 39 morts dans de nouvelles violences entre chrétiens et musulmans
Trente-neuf personnes ont été tuées et 30 gravement blessées dans des affrontements entre chrétiens et musulmans dans le centre du Nigeria, un pays régulièrement meurtri par des violences religieuses.
Les affrontements se sont produits vendredi dans la localité de Wukari, située à 200 kilomètres de Jalingo, capitale de l’Etat de Taraba. Les participants au cortège funèbre d’un chef traditionnel de l’ethnie Jukun, à majorité chrétienne, ont traversé un quartier musulman en criant des slogans que des musulmans ont jugé provocants, ont expliqué des habitants.
"Jusqu’à présent notre bilan s’élève à 39 morts et 30 blessés graves", a déclaré samedi à l’AFP un porte-parole de la police, Joseph Kwaji.
Un précédent bilan communiqué par un secouriste faisait état de 20 morts. Mais le bilan pourrait être plus élevé encore que celui de la police, selon des habitants.
"32 maisons ont été détruites dans les violences", a ajouté le porte-parole de la police, précisant qu’un couvre-feu avait été décrété et que 40 suspects avaient été arrêtés.
Le porte-parole du gouverneur de l’Etat, Kufas Sule, avait annoncé plus tôt la mise en place d’un "couvre-feu de 24 heures à Wukari, en attendant le retour au calme".
De plus, des troupes supplémentaires ont été déployées dans la ville, a assuré le chef de l’Information de l’Etat de Taraba, Emmanuel Bello. Il s’agit, selon lui, de "s’assurer que la situation (sécuritaire), qui a été ramenée sous contrôle, soit renforcée".
Ces violences se produisent deux semaines après un bain de sang dans la localité de Baga, dans le nord-est du pays, où l’armée a affronté des membres présumés du groupe islamiste radical Boko Haram, les combats faisant environ 200 morts.
Le Nigeria, divisé entre un Nord à dominante musulmane et un Sud majoritairement chrétien, connaît régulièrement des violences inter-religieuses meurtrières, et le pays fait face en particulier à une insurrection de la secte Boko Haram, très active dans le nord et le centre du pays.
3 600 morts depuis 2009
A Wukari, une ville majoritairement chrétienne, les tensions entre les deux communautés se sont avivées depuis février. Des affrontements avaient alors éclaté entre chrétiens et musulmans à la suite d’une querelle sur l’utilisation d’un terrain de football par des équipes des deux communautés, faisant plusieurs morts.
Les affrontements de vendredi sont intervenus au lendemain de la mise en place par le gouvernement de l’Etat d’une commission pour enquêter sur ces violences de février.
De nombreux kidnappings sont aussi perpétrés dans le cadre des violences religieuses. Dernier en date, celui d’un ancien ministre nigérian du Pétrole, Shettima Ali Monguno, 87 ans, enlevé vendredi par des hommes armés à l’extérieur d’une mosquée dans la ville de Maiduguri, selon sa famille.
Maiduguri, située dans le nord-est du Nigeria, est le fief historique de Boko Haram.
Dans ce contexte de recrudescence de la violence, l’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW) a réclamé mercredi l’ouverture d’une enquête par la Cour pénale internationale sur le massacre de Baga.
HRW a publié des images satellitaires de destructions massives dans cette localité, soupçonnant l’armée nigériane de chercher à masquer l’ampleur des abus qu’elle aurait commis.
L’ONG, qui estime que l’armée nigériane s’est rendue coupable de crimes contre l’humanité dans sa répression de l’insurrection lancée en 2009 par Boko Haram, estime que "les événements de Baga devraient être ajoutés à l’enquête préliminaire du procureur" de la Cour pénale internationale ouverte en 2010.
L’armée nigériane a reconnu la mort de 37 personnes, tandis que la Croix-Rouge a mentionné un bilan de 187 morts et qu’un sénateur de la région a parlé de 228 morts.
L’armée a démenti les accusations de HRW.
Donnant un nouveau bilan des violences depuis 2009, incluant les victimes des islamistes de Boko Haram comme celles de la répression menée par les forces de sécurité nigérianes, HRW estime désormais que 3.600 personnes ont été tuées.
En début de semaine, le président nigérian Goodluck Jonathan a affirmé que son pays connaissait actuellement une "période éprouvante" au plan sécuritaire.
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