Le président soudanais Béchir prône le « dialogue » lors d’une rare visite à Juba

Le président soudanais Omar el-Béchir a prôné vendredi le « dialogue » avec le Soudan du Sud pour résoudre les différends entre les deux pays, lors d’une visite à Juba, sa première depuis celle effectuée en juillet 2011 à l’occasion de la proclamation d’indépendance sud-soudanaise.

Omar el-Béchir (g) et le président du Soudan du Sud Salva Kiir (d), à Juba le 12 avril 2013. © AFP /Ali Ngethi

Omar el-Béchir (g) et le président du Soudan du Sud Salva Kiir (d), à Juba le 12 avril 2013. © AFP /Ali Ngethi

Publié le 13 avril 2013 Lecture : 4 minutes.

Le président soudanais Omar el-Béchir a prôné vendredi le "dialogue" avec le Soudan du Sud pour résoudre les différends entre les deux pays, lors d’une visite à Juba, sa première depuis celle effectuée en juillet 2011 à l’occasion de la proclamation d’indépendance sud-soudanaise.

Son homologue sud-soudanais Salva Kiir a de son côté assuré que les deux hommes s’étaient engagés à mettre en oeuvre une série d’accords, signés en septembre à Addis Abeba et très largement restés lettre morte, devant permettre notamment la reprise de la production pétrolière et des échanges commerciaux transfrontaliers, ainsi que la création d’une zone-tampon démilitarisée à leur frontière.

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Cette visite de M. Béchir était la première depuis les graves affrontements frontaliers qui avaient opposé les armées des deux pays au printemps 2012, au paroxysme des tensions entre les deux capitales, et fait craindre une reprise d’un conflit à grande échelle entre Juba et Khartoum."Nous avons le dialogue pour principe et la seule voie pour résoudre les problèmes entre nos deux pays est le dialogue", a déclaré le président soudanais devant la presse, en compagnie de M. Kiir, à l’issue d’entretiens.

Les deux présidents, qui se rencontraient pour la quatrième fois en six mois, ont convenu de la "mise en oeuvre totale et inconditionnelle des accords de coopération signés à Addis" en septembre, a assuré vendredi M. Kiir sans plus de précision. Un nouvel accord, signé en mars, toujours dans la capitale éthiopienne, a déjà permis la reprise début avril de la production pétrolière sud-soudanaise. Selon les médias soudanais, ce brut devrait pouvoir à nouveau être exporté depuis Port-Soudan, sur la mer Rouge, d’ici fin mai.

A son indépendance, le Soudan du Sud a hérité des trois-quarts des réserves de pétrole du Soudan d’avant la partition mais, enclavé, est resté tributaire des oléoducs soudanais pour l’exporter. Juba avait arrêté net en janvier 2012 le pompage de son brut, furieux que Khartoum ait prélevé du pétrole sud-soudanais pour se payer, faute d’accord alors sur les frais de transit. Cet arrêt a mis les économies des deux pays à genoux.

Le Soudan du Sud a conquis son indépendance à l’issue de décennies de guerre civile entre une rébellion sudiste, dont M. Kiir était l’un des commandants, et le pouvoir de Khartoum, dont M. Béchir fut l’un des chefs de l’armée avant de s’emparer du pouvoir en 1989. Les hostilités ont pris fin en 2005 avec la signature d’un "Accord de paix global" qui a débouché sur la partition du Soudan mais a laissé de nombreuses questions sensibles en suspens, notamment la démarcation de la frontière commune ou le statut de la région contestée d’Abyei.

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Les deux pays s’accusent également mutuellement de soutenir des groupes rebelles actifs sur le territoire de l’autre. Au coeur du blocage de l’application des accords de septembre figurait ainsi l’exigence soudanaise que le Soudan du Sud condamne la Branche Nord du Mouvement de libération des peuples du Soudan (SPLM-N), une rébellion active dans les Etats soudanais du Kordofan-Sud et du Nil-Bleu.

Khartoum accuse Juba de soutenir ces rebelles qui combattaient au côté de la rébellion sudiste durant la guerre civile (1983-2005). Vendredi, en pleine visite de M. Béchir, cinq obus sont tombés sur la capitale du Kordofan-Sud, Kadougli, un bombardement attribué au SPLM-N, dont le porte-parole a toutefois indiqué ne pas être au courant. Deux personnes ont été tuées et huit blessés selon des habitants.

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Cet incident n’a pas été évoqué par M. Béchir. "Nous ne soutiendrons aucune opposition chez le voisin. Dans le passé, cela a pu arriver, mais cela restera du passé", a-t-il simplement affirmé, interrogé sur le soutien que Juba l’accuse de son côté d’apporter aux rebelles de David Yau Yau, qui combattent l’armée sud-soudanaise dans l’Etat du Jonglei.

La visite de M. Béchir à Juba avait été plusieurs fois annoncée, puis annulée ou reportée, depuis un an. M. Kiir, qui avait à nouveau invité M. Béchir après les accords de mars, a annoncé avoir été à son tour convié vendredi à se rendre à Khartoum. Selon le ministre soudanais de l’Information Ahmed Bilal Osman, cité par l’agence officielle soudanaise Suna, la visite de M. Béchir visait à permettre de surmonter "le manque de confiance" entre les deux parties.

Le président soudanais, arrivé en milieu de matinée à Juba à la tête, selon Suna, "d’une délégation de haut niveau", comprenant notamment ses ministres de la Défense, de l’Intérieur, du Pétrole et le chef des services de renseignements, devait repartir en fin d’après-midi vers Khartoum.

Juba avait été placée sous très haute sécurité vendredi. Excepté les convois officiels, aucun véhicule ne circulait dans les rues de la capitale, flanquées de nombreux policiers, et les piétons étaient soumis à de nombreux contrôles.
 

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