Égypte : le parquet ordonne l’arrestation d’un humoriste de la télévision

Le procureur général égyptien a ordonné samedi l’arrestation d’un célèbre animateur de télévision satirique accusé d’insulte au président islamiste Mohamed Morsi, dernier épisode en date d’une série d’offensives contre les médias critiques.

Des affiches de l’animateur égyptien Bassem Youssef devant un théâtre du Caire. © AFP

Des affiches de l’animateur égyptien Bassem Youssef devant un théâtre du Caire. © AFP

Publié le 31 mars 2013 Lecture : 3 minutes.

Bassem Youssef est accusé d’offense à l’islam pour s’être "moqué du rituel de la prière" dans son émission télévisée, et d’insulte envers le président Morsi pour avoir "raillé son image à l’étranger", ont indiqué des sources judiciaires, précisant que plusieurs plaintes avaient été déposées contre l’humoriste.

L’auteur d’une des plaintes a demandé que des mesures légales soient prises contre lui afin de dissuader d’autres personnes de suivre son exemple, selon une des sources.
"Al-Bernameg", l’émission satirique hebdomadaire de M. Youssef, inspirée du "Daily Show" américain de Jon Stewart, tourne en dérision les figures politiques du pays et n’épargne ni le président ni les dirigeants des Frères musulmans.

la suite après cette publicité

Avec l’humour qui lui est propre, M. Youssef a confirmé ce mandat d’arrêt contre lui.

"Le mandat d’arrêt contre moi est vrai. J’irai demain au bureau du procureur général à moins qu’il ne m’envoie une voiture de police aujourd’hui, ce qui me permettra d’économiser de l’argent en transport", a-t-il indiqué sur son compte twitter.

Selon la loi égyptienne, les plaintes sont déposées auprès du procureur général qui décide ensuite s’il existe des preuves suffisantes pour porter l’affaire devant la justice. Et les suspects peuvent être détenus lors de cette période d’enquête.

Cardiologue reconverti en comédien, M. Youssef est devenu célèbre avec un show diffusé sur Internet durant le soulèvement populaire qui a conduit à la chute du président Hosni Moubarak en février 2011, engrangeant plus de cinq millions de "vues" après seulement sept épisodes.

la suite après cette publicité

Il a ensuite été engagé par la chaîne de télévision satellitaire privée ONTV, puis a travaillé pour une autre, CBC, où il a monté le premier programme égyptien à être filmé en direct avec public.

"Explosion" des plaintes contre les médias

la suite après cette publicité

M. Youssef et son équipe d’humoristes sont alors devenus célèbres dans toute l’Egypte avec leurs critiques acérées des personnalités publiques et son humour intrépide.

Il n’a épargné aucun dirigeant du pays, de Hosni Moubarak et son entourage aux islamistes arrivés au pouvoir en juin, en passant par l’armée qui géré la période de transition entre-temps.

Mais ce type de programme n’est pas particulièrement du goût des nouvelles autorités et l’humoriste a rejoint les rangs de plusieurs membres des médias visés par des plaintes pour insulte au président.

"Depuis l’élection de Mohamed Morsi, le nombre de plaintes à l’encontre de journalistes a littéralement explosé. Les enquêtes et procès visent clairement à restreindre la liberté de l’information", note l’organisation Reporters sans frontières.

Selon l’avocat Gamal Eid, il y a eu quatre fois plus de plaintes pour "insulte au président" lors des 200 premiers jours de M. Morsi au pouvoir que pendant les 30 ans de règne de M. Moubarak.

La semaine dernière, un mandat d’arrêt a été délivré contre le blogueur pro-démocratie Alaa Abdel Fattah pour incitation à la violence, alors que des procureurs ont indiqué qu’ils allaient enquêter sur trois présentateurs d’émissions politiques –Lamis al-Hadidi, Amr Adib et Youssef al-Husseini– pour incitation au chaos.

Alors que le respect de la liberté d’expression était une revendication-clé du soulèvement populaire de 2011, M. Morsi s’était engagé lors de sa campagne électorale à garantir la liberté des médias.

Mais l’opposition dénonce une dérive autoritaire de M. Morsi, également accusé d’être incapable de faire face à la grave crise économique et sociale.
 

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires